Les employés de soutien des commissions scolaires signent leur nouvelle convention collective

Les employé-es de soutien des commissions scolaires affiliés à la Fédération des employées et employés de services publics (FEESP–CSN) ont signé leurs nouvelles conventions collectives. Alors que ceux des commissions scolaires anglophones l’ont fait hier, c’était au tour de ceux des commissions scolaires francophones aujourd’hui.

Le personnel de soutien pourra désormais bénéficier d’un meilleur aménagement d’horaire pour motif de conciliation famille-travail-études. Aussi, lorsque possible, les commissions scolaires devront favoriser la fusion de postes à temps partiel de façon à lutter contre la précarité d’emploi en créant des postes comportant davantage d’heures. La contribution de l’employeur au régime d’assurance collective a également pu être bonifiée. Les ouvriers spécialisés pourront dorénavant bénéficier d’une prime de rétention de 10 % pour chaque heure travaillée.

L’ensemble des salarié-es de soutien des commissions scolaires bénéficieront de hausses salariales de 1,5 %, 1,75 % et 2 %, en 2016, 2017 et 2018, ainsi que de montants forfaitaires de 0,30 $ pour chaque heure travaillée en 2015 et de 0,16 $ l’heure en 2019. En 2019, dans le cadre des relativités salariales, les hausses seront de 2,4 % en moyenne. La convention collective viendra à échéance le 31 mars 2020.

Au plus tard en septembre, les employé-es de soutien affiliés à la FEESP–CSN pourront toucher l’ensemble des sommes rétroactives au 1er avril 2015.

« Au cours de cette négociation, nous sommes parvenus à amener le gouvernement à discuter de nos priorités et à abandonner sa volonté de charcuter des pans entiers de nos conventions collectives, affirme Danielle Beaulieu, présidente du secteur scolaire à la FEESP–CSN. Le gouvernement voulait nous ramener des années en arrière en mettant en péril des balises importantes de nos conventions collectives. Non seulement nous avons pu préserver nos acquis, mais nous avons également obtenu des gains importants pour nos membres, ce qui n’aurait été possible sans la grande détermination dont ils ont fait preuve tout au long de cette négociation. »

À propos

Le secteur scolaire regroupe 37 syndicats, affiliés à la Fédération des employées et employés de services publics (FEESP–CSN ), représentant environ 30 000 employés-es de soutien présents dans 31 commissions scolaires francophones et deux commissions scolaires anglophones.

 

 

30 ans de négociations coordonnées dans le secteur de l’hôtellerie

Pour souligner cet anniversaire, rappelons-nous comment ce modèle a contribué, depuis ses débuts en 1986, à faire avancer les conditions de travail et de vie des professionnel-les de l’hôtellerie partout à travers la province.

Le préalable historique est l’arrivée massive à la CSN de syndicats d’hôtels, au début des années 80. Ces hôtels étaient auparavant affiliés au local 31 d’un syndicat américain, rongé par la corruption et les pratiques antidémocratiques. Entre 1980 et 1986, jusqu’à 10 000 travailleurs sont ainsi passés à la CSN par petits groupes lorsque leur convention collective arrivait à échéance. C’est en 1986 que des pionniers comme Lise Poulin, Gilles Duceppe, Jacques Lessard et plusieurs militants du secteur de l’hôtellerie ont pensé à unir les forces de tous ces syndicats pour négocier. Jean Lortie, secrétaire général de la CSN depuis 2011, également présent à l’époque, se souvient des discussions centrées sur l’idée de cesser de mettre les syndicats des différents hôtels en compétition et sur la nécessité de collaborer pour créer un rapport de force suffisant pour obtenir des gains pour tous les travailleurs et travailleuses.

Le début d’un temps nouveau

Le 10 avril 1986, les syndicats des hôtels membres de la Fédération du commerce (FC–CSN) se réunissent et adoptent le principe d’une négociation coordonnée pour l’année suivante. Le but principal de ces négociations étant évidemment d’établir un rapport de force avec les employeurs, vu le nombre important de syndicats et de travailleurs pouvant allier leurs forces. Chaque syndicat membre est ainsi libre d’adhérer ou non à une plateforme de revendications communes, qui ont pour but d’améliorer les conditions de travail dans tous les hôtels. Chaque syndicat profite tout de même de l’autonomie nécessaire pour négocier avec son propre employeur à sa table de négociation, mais ne peut accepter une proposition inférieure à la plateforme préétablie sans consulter les comités de négociation des autres syndicats, réunis dans un comité de coordination. C’est sur le thème « On est 4000 en ville » qu’a donc lieu, au printemps 1987, la première négociation coordonnée du secteur de l’hôtellerie. C’est d’ailleurs dans le cadre de cette campagne qu’a été créé le logo comportant cinq étoiles, qui est demeuré un symbole très fort dans le secteur de l’hôtellerie.

Au printemps 1990, alors que les conventions collectives émanant de la première négociation coordonnée viennent à échéance, se tient la première grande négociation provinciale des syndicats hôteliers, menée par Gilles Duceppe, coordonnateur du secteur de l’hôtellerie à la CSN. On élabore alors un système de classification des hôtels par catégorie et on avance le principe que les employé-es des hôtels d’une même catégorie doivent se regrouper et bénéficier de conditions de travail similaires. Effectivement, jusqu’à maintenant, les hôteliers étaient toujours en compétition entre eux par rapport aux conditions de travail des employé-es et non pas par rapport à la qualité du service offert. Ainsi, harmoniser les conditions de travail permettait d’avoir un certain standard dans l’industrie hôtelière et une saine concurrence entre les hôtels de même catégorie.

Se sortir de la misère

L’objectif premier des négociations coordonnées, affirme Jean Lortie, était de sortir les travailleurs de l’hôtellerie de la misère. Lorsqu’ils sont arrivés à la CSN dans les années 1980,plusieurs syndicats étaient mal en point. Travail au salaire minimum, pas de régime de retraite ni assurance collective, pas de congés maladie ni vacances, M. Lortie se souvient de ses débuts dans le domaine : « Quand vous étiez un travailleur de l’hôtellerie et que vous vouliez emprunter, vous aviez besoin d’un endosseur. On considérait que vous étiez à un point tel dans la misère, que vous ne seriez pas capable de rembourser un prêt, de financer une voiture ou une maison. Heureusement, ce n’est plus le cas aujourd’hui », affirme-t-il avec enthousiasme.

En 1999, après six ans de sacrifices de la part des travailleuses et travailleurs en raison du ralentissement de l’économie, l’industrie se porte mieux et est même en croissance. Les travailleurs du secteur de l’hôtellerie réclament donc que les bénéfices se reflètent également sur leurs conditions de travail. Les syndicats ont vite réalisé qu’ils avaient la capacité de paralyser une industrie qui recommençait à être lucrative après plusieurs années de crise. « Il y avait une volonté de lutter pour récupérer les gains perdus pendant ces six ans difficiles », soutient Jean Lortie. Ainsi, les négociations coordonnées ont permis de presque doubler les salaires entre 1999 et 2008, un gain substantiel pour les professionnels-les de l’hôtellerie.

La CSN derrière les travailleurs

Évidemment, l’implication de la CSN tant sur le plan financier que logistique est déterminante lorsqu’il s’agit du succès d’une négociation coordonnée. Le Fonds de défense professionnelle de la CSN (FDP) a effectivement été un outil de taille pour la mobilisation, la négociation, la formation et pour la visibilité avec laquelle les syndicats locaux ont pu faire valoir leurs revendications et gagner leurs luttes. À elle seule, une négociation coordonnée entraîne des coûts approximatifs de quatre millions de dollars. Au total, plus d’une dizaine de milliers de dollars du FDP ont été investis dans chaque syndicat à un moment ou à un autre où ces ressources étaient cruciales à l’obtention d’un gain pour les travailleurs.

Victoires et sacrifices

Les négociations coordonnées ont mené à la victoire les syndicats de l’hôtellerie, mais elles ont aussi apporté leur lot de défis en cours de route. « Les syndicats ont dû sacrifier une partie de leur autonomie pour assurer cette forte solidarité, un compromis politique important qui a exigé beaucoup de maturité des acteurs impliqués, explique Jean Lortie. Ce type de négociation a amené les syndicats à travailler ensemble, ce qui n’est pas naturellement acquis dans cette industrie compétitive, et à faire des compromis sur leurs objectifs de négociation à court terme pour l’intérêt collectif du secteur, à long terme. Effectivement, l’immense rapport de force qu’exerçait la négociation coordonnée sur l’employeur a permis plusieurs gains sur le plan des conditions de travail. La sixième semaine de vacances, l’ajout d’une journée de maladie, des hausses de salaire importantes, la reconnaissance des travailleurs par leur employeur et une prime de départ à la retraite ne sont que quelques-unes des victoires obtenues par les salarié-es du secteur hôtelier.

De nos jours, les jeunes qui commencent à travailler dans l’hôtellerie ne gagnent plus le salaire minimum pendant les vingt premières années de leur carrière, ils ne commencent pas leur vie professionnelle dans la misère, ils font partie de la classe moyenne, ont de bonnes conditions de travail et sont considérés comme essentiels au bon roulement de l’industrie du tourisme. Ils peuvent fièrement dire qu’ils participent à la création d’une richesse locale primordiale et irremplaçable pour la santé économique et sociale du Québec. Le tout, grâce au succès du modèle des négociations coordonnées et des luttes acharnées des travailleuses et des travailleurs syndiqués du secteur de l’hôtellerie. L’appui que leur a apporté la CSN a évidemment été d’une importance capitale tout au long de ces combats pour de meilleures conditions de travail. Tant pour la négociation et la mobilisation que pour la reconnaissance des travailleurs, les négociations coordonnées ont prouvé être un modèle efficace et un outil de taille pour mener à terme les luttes dans le secteur de l’hôtellerie.

Des cibles ambitieuses, des moyens trop modestes

La politique proposée est sous la responsabilité du ministre de l’Énergie et des Ressources naturelles. D’ailleurs, même si le document de présentation de la politique laisse la parole au premier ministre, au ministre de l’Énergie et des Ressources naturelles, à la ministre de l’Économie, de la Science et de l’Innovation et au ministre responsable des Affaires autochtones, il ignore complètement le ministre de l’Environnement. C’est à croire que la question énergétique peut être examinée sans égard aux enjeux environnementaux.

Pour Pierre Patry, trésorier de la CSN et responsable politique des questions environnementales et du développement durable, le contexte d’urgence écologique commande qu’on agisse avec force si nous voulons infléchir le cours des choses. « En décembre dernier, à la conférence de Paris, nous avons entendu le chant des nations alors qu’elles convenaient toutes qu’il fallait maintenir le réchauffement de la planète à moins de 2 °C, voire à moins de 1,5 °C. Il est maintenant temps de définir comment ». Ainsi, pour le trésorier de la CSN, la mise en place d’une nouvelle politique énergétique est certainement une façon d’y arriver. Alors que le gouvernement a déjà pris l’engagement de réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES) de 37,5 % par rapport au niveau de 1990, et ce, d’ici 2030, et sachant que 70 % de nos émissions totales de GES découlent de la production, du transport et de notre consommation d’énergie, il est impossible de ne pas aborder la question énergétique. « Énergie et environnement sont intimement liés, que le gouvernement fasse preuve d’aveuglement volontaire n’y change rien », renchérit monsieur Patry.

Le temps d’agir concrètement

Au nombre de cinq, les objectifs ne manquent pas d’ambition. Améliorer de 15 % l’efficacité avec laquelle l’énergie est utilisée; réduire de 40 % la quantité de produits pétroliers consommés ; éliminer l’utilisation du charbon thermique ; augmenter de 25 % la production totale d’énergies renouvelables et augmenter de 50 % la production de bioénergie : voilà les cibles que le gouvernement s’est fixées, et pour lesquelles il y a peu à redire. « L’enjeu ne repose pas sur les objectifs à atteindre, ça, on y adhère », dira Mireille Pelletier, chimiste et spécialiste des questions environnementales au Service des relations du travail de la CSN. Selon elle, la question fondamentale est de savoir quels seront les moyens que le gouvernement mettra en place pour assurer l’atteinte de ces objectifs. En effet, augmenter de près de 28 % notre consommation d’énergies renouvelables et réduire de 40 % celle de produits pétroliers n’est pas une mince tâche. Au Québec, contrairement à plusieurs autres économies, 47,6 % de l’énergie utilisée provient déjà d’énergies renouvelables. De plus, 75 % de la totalité des produits pétroliers utilisés à des fins énergétiques est consommé dans le secteur des transports. À l’heure de l’auto en solo, des VUS et du just in time, la transition proposée apparaît encore plus incertaine si des actions concrètes ne sont pas mises en place.

Pourtant, c’est justement au chapitre des actions concrètes que le programme gouvernemental montre ses failles. Certes, il y a la création d’un organisme visant l’économie d’énergie et la transition énergétique, responsable de coordonner l’ensemble des services et des programmes offerts. Ce guichet unique devrait favoriser la cohérence des actions gouvernementales et un accès plus grand des citoyennes et des citoyens aux programmes gouvernementaux. Il y a aussi des projets-pilotes pour l’installation de stations multi­carburants et un projet de loi pour bannir définitivement l’utilisation du charbon. La politique énergétique propose de son côté l’expansion du réseau gazier et le développement d’un réseau d’approvisionnement en gaz naturel liquéfié, ce qui devrait permettre à des entreprises de se procurer des ressources moins polluantes. Par ailleurs, même si on reconnaît l’importance de l’économie d’énergie en la hissant au rang de filière de production, bien peu de mesures sont proposées à cet égard. Pour Mireille Pelletier, il n’y a aucun doute, l’énergie la moins coûteuse est celle qu’il n’est pas nécessaire de produire. Ainsi, l’État pourrait être beaucoup plus proactif sur cette question. « Le volontariat a ses limites. Il serait temps que le gouvernement revoie la réglementation de façon à obliger la prise en compte de cette dimension, notamment lors de constructions neuves », précise-t-elle. Finalement, même si la question du transport est abordée, on s’en réfère pour l’essentiel aux annonces déjà rendues publiques, dont celle concernant le plan d’action sur l’électrification des transports. Faut-il pourtant rappeler tout le scepticisme qui entoure la capacité réelle d’atteindre ces cibles, particulièrement celle de voir plus de 100 000 véhicules électriques et hybrides rechargeables immatriculés au Québec d’ici 2020 ?

Des moyens à la mesure de la tâche

On décèle aussi à la lecture de la politique, que le gouvernement est favorable à l’exploitation des hydrocarbures en territoire québécois. La proposition d’un cadre légal pour régir ce type d’activité et les hypothèses quant à l’utilisation des redevances qui découleraient de cette exploitation laissent peu de doute sur les intentions réelles du gouvernement en la matière. Pourtant, il est de plus en plus évident que l’exploitation de cette ressource se situe en porte-à-faux avec la volonté affirmée de réduire nos émissions de GES. À coup sûr, elle retarderait notre transition énergétique qu’on affirme par ailleurs poursuivre.

Le Québec doit aussi avoir les moyens de ses ambitions. Une transition de l’envergure de celle qui nous est proposée ne peut se faire sans délier les cordons de la bourse. Et justement, le gouvernement a annoncé qu’il consacrerait 4 milliards de dollars à ce projet de transition énergétique, mais ce montant sera déboursé sur une période de 15 ans, soit une moyenne de 267 millions par année. C’est là que le bât blesse, de l’avis de Pierre Patry. « C’est vraiment peu quand on pense à l’ampleur de la tâche et notamment au passage obligé vers l’électrification des transports. C’est encore moins crédible quand le gouvernement ne peut garantir qu’il s’agira d’argent frais », souligne-t-il.

Les questions énergétiques ne sont pas détachées des questions économiques. À maintes reprises au cours de notre histoire, les ressources énergétiques ont servi de levier au développement économique. Tous le reconnaissent, notre électricité apparaît pour plusieurs un avantage comparatif indéniable qui a permis la création de plusieurs emplois de qualité. De même, plusieurs ont foi en l’énergie éolienne pour développer des régions comme la Gaspésie. Pourtant, et malgré ce constat évident, la question de l’emploi et celle de l’importance des travailleuses et des travailleurs pour opérer cette transition énergétique sont tout à fait absentes du décor ! « Le gouvernement doit voir la transition énergétique comme une occasion de développement. Un moyen de s’engager vers un développement durable », indique le trésorier de la CSN.

Une croyance populaire à nuancer

Selon la formule, une baisse du taux de change ($ US/$ CA) permettrait d’accroître les exportations en direction des pays où la monnaie est plus forte. Inversement, un taux de change trop élevé les réduirait. Si cette logique semble implacable, la réalité n’est pas aussi simple. En effet, le boom attendu dans les exportations canadiennes depuis la chute du taux de change n’est pas au rendez-vous. Selon François Bélanger, économiste au Service des relations du travail de la CSN, « certains analystes reconnaissent que la faiblesse du taux de change n’a plus un impact aussi important qu’avant sur les exportations manufacturières au Canada ».

Bien qu’il soit vrai que le taux de change influence le niveau des exportations, plusieurs autres éléments affectent aussi le commerce international. Par exemple, la crise économique de 2007-2008 qui a sévi chez nos voisins du Sud semble avoir fait diminuer fortement les exportations, et cela, même si le dollar canadien s’est déprécié entre 2008-2009. Aussi, après une longue période de baisse des exportations vers le marché américain, la place qui revenait au Canada est maintenant chaudement disputée par certaines économies émergentes, comme la Chine et le Mexique. « Nous avons déjà exporté plus de 80 % de notre production vers les États-Unis, maintenant, c’est un peu plus de 70 %. Cette place a été prise par d’autres et c’est désormais à nous de les déloger », explique François Bélanger. D’ailleurs, il faut comprendre que le dollar américain ne s’est pas seulement apprécié face au dollar canadien, mais également face aux monnaies de ces nouveaux concurrents, annulant ainsi l’effet de levier dont auraient pu bénéficier les produits canadiens.

Certaines décisions politiques prises par nos voisins pèsent aussi très lourd dans la balance. À la suite de la récession de 2008, les États-Unis ont décidé de développer une politique industrielle visant à accroître la production et à rapatrier certains secteurs. « Cette pratique s’appelle on shoring, par opposition aux off shoring qui consistent à délocaliser des industries, et ils la mènent de façon particulièrement vigoureuse. Nous l’avons vu au Québec quand la ville de Memphis est venue chercher Electrolux. Ils accordent plusieurs avantages afin de rapatrier la production », note François Bélanger. Pour soutenir son secteur industriel, Washington a mis en place certaines mesures protectionnistes comme en fait foi le Buy American : « On a sous-estimé le protectionnisme américain, nous étions persuadés qu’à 70 cents, les carnets de commandes allaient déborder, et ça n’a pas été le cas », indique Alain Lampron, président de la Fédération de l’industrie manufacturière (FIM–CSN).

Notre industrie en partie responsable

S’il est vrai que la situation socioéconomique des États-Unis joue un rôle majeur pour comprendre la situation actuelle des exportations canadiennes, il serait simpliste de s’arrêter là. Les compagnies canadiennes sont aussi responsables de la situation actuelle. Plusieurs grandes entreprises ont, pour de multiples raisons, créé des filiales sur le territoire américain. « Une tendance semble se dégager pour les grandes entreprises : au lieu d’exporter de façon traditionnelle à partir d’un pays X, elles choisissent de produire directement sur le marché visé en y implantant des filiales », observe François Bélanger.

La chute des exportations a grandement affecté le secteur manufacturier canadien et québécois. « La capacité industrielle n’est plus la même. Plus de 160 000 emplois ont été perdus depuis 2002 pour se situer, en 2013, à 490 000 emplois. Au-delà de ces pertes, il faut savoir que des usines ont fermé et que des chaînes de production ont été démantelées. Notre capacité industrielle n’est plus la même, et cela, au moment où notre place sur certains marchés est plus que jamais concurrencée », soutient François Bélanger. De son côté, Alain Lampron est catégorique : « Les entreprises auraient dû profiter de la force du dollar pour investir, mais elles ne l’ont pas fait et aujourd’hui, nous sommes moins compétitifs, quand on ne se fait pas carrément dire que nous sommes désuets. »

Un prétexte pour s’attaquer aux salariés

Bien que de nombreux spécialistes s’entendent pour minimiser les impacts du taux de change, il semble que celui-ci ait maintes fois servi de justification aux employeurs pour rouvrir les conventions collectives et imposer des reculs importants aux salarié-es.

« L’ensemble de nos syndicats subissaient ce type de menaces : “On a de la misère” ou “on n’a plus la même marge de manœuvre”, etc. Il y en a eu des renégociations et même des ralentissements », se souvient Alain Lampron. Pour sa part, François Bélanger appelle à relativiser l’impact d’un dollar fort sur les entreprises. « S’il est vrai que la masse salariale augmente, les coûts liés aux importations ou à l’acquisition de nouvelles machineries, eux, diminuent, la volatilité des taux de change comporte donc des avantages et des inconvénients. »

Pour un virage qualitatif

Là où le taux de change intervient, c’est sur le prix des produits. Un taux de change faible permet d’offrir des marchandises à moindre prix. Les entreprises exportatrices pourraient, si elles le voulaient, opérer un changement qualitatif. « Plutôt que d’espérer que le taux de change leur donne un avantage quantitatif, pourquoi ne pas s’orienter vers une production de marchandises à forte valeur ajoutée ? », se questionne François Bélanger. Il faudrait donc investir davantage dans la recherche et le développement, tout en s’assurant que les innovations contribuent à la production industrielle canadienne plutôt que d’être envoyées ailleurs dans le monde. Ce virage permettrait de compenser la fluctuation du taux de change en offrant sur le marché international des produits incontournables, peu importe leur prix, à forte valeur ajoutée.

Plutôt que de voir le taux de change comme une fatalité, positive ou négative, il serait grand temps d’innover et de développer l’économie canadienne et du Québec afin de les immuniser le mieux possible face à ces fluctuations des cours monétaires.

Secteurs du tourisme de l'hôtellerie

Ces deux secteurs sont probablement les plus sensibles aux soubresauts du dollar. Un taux de change trop fort entraîne rapidement un ralentissement de l’activité pour deux raisons. D’une part, le touriste étranger évitera les destinations où le taux de change est trop élevé, puisqu’il lui en coûtera plus cher pour voyager. D’autre part, les touristes locaux vont profiter de la force de la monnaie pour sortir et voyager à l’étranger.

Bien entendu, la faiblesse actuelle du dollar, parce qu’elle attire les touristes étrangers, tout en gardant « captifs » les vacanciers du Canada, a un effet positif sur ces secteurs. Selon Michel Valiquette, trésorier de la Fédération du commerce (FC–CSN) et responsable du secteur de l’hôtellerie, l’effet est non seulement immédiat, mais il est également projeté dans le temps. « L’année 2014 fut une bonne année, 2015 fut une excellente année, les hôteliers ont enfin réussi à augmenter les taux d’occupation au-dessus des moyennes, chose qu’ils n’avaient pas réussi à faire depuis la crise de 2008. Si l’on se projette dans le temps, 2016 et 2017 s’annoncent également très bien. En effet, même si l’on ne connaît pas encore le taux de change, plusieurs événements internationaux, congrès et autres, auront lieu à Montréal, auxquels vont s’ajouter les activités entourant le 375e anniversaire de la ville de Montréal, preuve que la valeur du dollar n’est pas le seul facteur à influencer la vigueur de ces secteurs », explique-t-il.

Ma place en santé, j’y tiens

C’est sous l’impulsion du mouvement syndical, notamment celle des ouvrières et des ouvriers du secteur privé, que s’est mis en place au Québec un système public où les citoyens ont dorénavant droit à des services en fonction de leurs besoins, sans égard à leur situation financière familiale, ce que seuls leurs patrons pouvaient jusqu’alors se payer. Cet acquis précieux est en danger.

C’est pourquoi, fin mai, la CSN lançait une vaste campagne : Ma place en santé, j’y tiens. Certes, le gouvernement libéral de Philippe Couillard n’est pas le premier à appliquer au réseau une médecine de cheval néolibérale. Toutefois, par son ampleur et par son opacité, la réforme pilotée par le Dr Gaétan Barrette, plus que jamais, ouvre la voie à un système à deux vitesses. Ce sont les fondements mêmes de notre réseau public qui sont menacés.

Ainsi, la CSN entend bien démontrer au cours des prochains mois qu’il est totalement faux de prétendre, comme le fait le gouvernement, que sa réforme améliore les services et qu’elle renforce le réseau. C’est bien le contraire. Et ce qui est inacceptable, par-dessus tout, c’est que ce démantèlement s’opère sans débat public : le gouvernement n’en a certainement pas le mandat!

Le 24 mai, la CSN lançait une vaste offensive contre le démantèlement du réseau public de santé et de services sociaux. Ci-dessus : le 19 mai, à Trois-Rivières, des militants du Cœur-du-Québec ont manifesté pour la sauvegarde de notre réseau de santé et de services sociaux. | Photo : Thierry Charland
Le 19 mai, à Trois-Rivières, des militants du Cœur-du-Québec ont manifesté pour la sauvegarde de notre réseau de santé et de services sociaux. | Photo : Thierry Charland

Des attaques concertées

Ces deux dernières années, les attaques ont été nombreuses et elles visent toutes les sphères du réseau. Les choix du gouvernement libéral posent des enjeux cruciaux. En voici quelques exemples.

CLSC • Les CLSC devraient être tout désignés pour améliorer l’accès à des services de proximité, puisqu’ils existent déjà sur tout le territoire et qu’ils fonctionnent en interdisciplinarité, c’est-à-dire que les professionnel-les de divers horizons travaillent en équipe pour répondre aux besoins de la population. Le gouvernement a plutôt choisi de créer une cinquantaine de supercliniques privées subventionnées et dirigées exclusivement par des médecins. De plus, il finance directement le déménagement de ressources professionnelles des CLSC vers les groupes de médecine de famille, des cliniques à but lucratif. Faudra-t-il être inscrit à un GMF pour obtenir les services auparavant offerts au CLSC ? Faudra-t-il consulter un médecin pour être référé à une travailleuse sociale ? Ces questions et plusieurs autres sont sans réponse à l’heure actuelle et inquiètent.

Laboratoires • Actuellement, chaque établissement ou presque bénéficie des services d’un laboratoire qui permet au personnel soignant d’obtenir rapidement des analyses sanguines ou autres. Ces services, essentiels, sont donc disponibles dans toutes les communautés sur l’ensemble du territoire. Or, le gouvernement, pour des raisons budgétaires, et ce, sans preuve d’économies à la clé, a décidé de procéder à un regroupement des laboratoires, par région.

Les risques d’erreurs et liés à la sécurité sont nombreux : certains cas ont déjà été recensés dans les médias bien que le processus débute à peine. Dans le milieu, on considère qu’un échantillon doit être analysé dans un délai de deux heures, ce qui sera la plupart du temps impossible.

Soins à domicile • L’État se désengage des soins à domicile. Des entreprises d’économie sociale sont appelées à prendre la place du personnel du secteur public, bien formé au soutien à domicile et expérimenté dans le domaine. La pression se fait également sentir du côté du personnel professionnel qui, faute des ressources, assiste impuissant à l’allongement des listes d’attente tout en sachant fort bien que la conséquence directe sera une dégradation de l’état de santé de leurs bénéficiaires.

Réadaptation • Dans les centres de réadaptation en déficience intellectuelle et troubles envahissants du développement (CRDITED), la poursuite de transferts massifs de résidentes et de résidents vers des ressources intermédiaires et de type familial (RI-RTF) pourrait reprendre. En 2011, la CSN avait obtenu un moratoire sur ces transferts, en faisant valoir que la mission des RI-RTF — maintenir et intégrer les usagères et usagers dans leur communauté — est très différente de celle des CRDITED, seuls établissements véritablement en mesure d’offrir les services spécialisés nécessaires à la réadaptation.

En réadaptation physique et en dépendance, les compressions budgétaires ont entraîné un fort alourdissement de la tâche chez les professionnel-les. Orthophonistes, physiothérapeutes et psychologues, entre autres, voient les listes d’attente s’allonger et les cas s’alourdir.

Centres jeunesse • En quatre ans, les Centres jeunesse ont subi des compressions de 50 millions de dollars. De plus en plus de jeunes sont livrés à eux-mêmes ou placés trop tard en centre jeunesse. Le traitement des demandes est ralenti. Les cas moins urgents, comme la négligence ou les mauvais traitements psychologiques, sont délaissés, afin de pouvoir traiter tous les cas prioritaires, avec moins de ressources qu’avant. Dans plusieurs centres, on n’est plus en mesure d’assurer les interventions de groupe comme celles sur les habiletés parentales ou encore le soutien aux parents de jeunes toxicomanes.

Frais accessoires • Les frais accessoires, bien qu’illégaux selon la loi canadienne, ne sont pas nouveaux. Ce qui est nouveau, c’est la volonté du Dr Barrette de légaliser ces frais que des médecins peuvent facturer lors de consultations, en plus de ce qu’ils reçoivent du régime public. Tout récemment, le ministre faisait volte-face et promettait d’abolir les frais accessoires en profitant des négociations actuellement en cours avec les représentants des médecins… À suivre.

Les structures mammouths • En fusionnant tous les établissements du Québec, de toutes les missions, en quelques méga­établissements, le gouvernement nuit aux communautés éloignées qui ne sont plus représentées dans les conseils d’administration. Tous les services d’une région sont maintenant centralisés autour d’un hôpital. La réforme donne encore plus de pouvoirs aux médecins. Le ministre Barrette va plus loin dans sa quête du contrôle absolu en abolissant le poste de Commissaire à la santé et au bien-être qui a un rôle de chien de garde complètement indépendant du ministère.

Santé publique • La santé publique a été fortement mise à mal par les compressions budgétaires. À la suite de la réforme, il n’y a plus d’organisme régional dédié à la santé publique. Il est à craindre que la santé publique écope, surtout que le travail qui y est associé est souvent accompli dans l’ombre. Et pourtant, comme société, nous gagnons quand le tabagisme recule, quand la violence faite aux femmes diminue, quand des mesures de prévention font diminuer le nombre de chutes des personnes aînées.

Effritement du secteur public

Ce ne sont que quelques exemples, car force est d’admettre que, globalement, le gouvernement a un fort préjugé favorable envers le secteur privé. Les services auxiliaires et administratifs, notamment, sont dans la ligne de mire de celles et ceux qui y voient des occasions d’affaires. La CSN sera là pour les défendre, comme elle a su stopper la privatisation des services de buanderie de Lanaudière et de Québec.

Enfin, ces privatisations vont de pair avec une pression croissante imposée aux salarié-es du réseau public. Dans toutes les catégories de personnel, les surcharges de travail et la dégradation des conditions de travail rendent la tâche encore plus difficile. Les bilans d’accidents de travail et de cas de lésions psychologiques s’alourdissent chaque année dans de nombreux titres d’emploi du réseau public.

Travailler avec la CSN-Construction

Le secteur de la construction vient tout juste de traverser sa période légale de maraudage. S’étendant du 1er au 31 mai 2016, celle-ci précédait le vote postal prévu entre le 1er et le 20 juin.

Le thème retenu par la fédération, TRAVAILLER avec la CSN-Construction, expose bien la dynamique des travailleuses et des travailleurs de ce secteur. Ce scrutin syndical organisé par la Commission de la construction du Québec touche plus de 175 000 travailleuses et travailleurs qui œuvrent dans les quatre secteurs de la construction. Les résultats devraient être connus au courant du mois d’août.

Durant tout le mois de mai, les élu-es, les délégué-es, les militantes, les militants et tous les salarié-es de la fédération et de la confédération ont parcouru les chantiers afin d’expliquer les différences fondamentales qui existent entre le syndicalisme pratiqué par la CSN–Construction et celui, bien différent, pratiqué par les autres syndicats de la construction.

Que ce soit la structure démocratique, l’ouverture de ses instances, l’approche et les suivis personnalisés, la qualité des services offerts ou tous les combats menés sur le terrain afin de défendre la diversité des réalités de ses membres, la CSN-Construction se distingue clairement des autres organisations syndicales.

Michel Giroux
Michel Giroux

La structure des délégués

La structure des délégué-es régionaux de la CSN-Construction qui a été mise en place depuis plus de deux ans a été reconduite lors du dernier congrès. Des militantes et militants continueront donc à sillonner les chantiers du Québec afin de rencontrer les membres de la fédération et non pas, comme d’autres le font, uniquement en période de maraudage. En collaboration avec les conseillers syndicaux, les délégué-es régionaux sont là pour veiller à l’application des normes de santé et de sécurité et des conventions collectives, et pour conseiller les membres dans différents dossiers qui les préoccupent.

La négociation

Au delà de tout le travail accompli par la fédération en soutien à ses membres, la CSN-Construction participe aux négociations avec les autres centrales. Toutefois, le type de négociation préconisé par la CSN se démarque complètement des autres approches. La fédération élabore d’abord ses demandes dans le cadre d’assemblées qui regroupent entre eux les métiers et les occupations afin de bien cerner leurs revendications.

L’ancienneté et la sécurité d’emploi

La CSN-Construction revendique la reconnaissance de l’ancienneté ou une forme de sécurité d’emploi depuis très longtemps. Que ce soit l’entrée et la sortie d’un chantier, le droit de rappel ou l’avancement des conditions salariales, la reconnaissance de l’ancienneté et la sécurité d’emploi améliorent toujours la condition des salarié-es.

La fédération demande le renforcement des mécanismes liés au droit de rappel des présentes conventions collectives, en lui associant une forme d’ancienneté par métier ou par occupation ou par entrepreneur, c’est-à-dire, l’ancienneté qu’un travailleur ou une travailleuse accumule auprès d’un même entrepreneur, calculée sur une période de 12 mois, une fois la période d’essai du travailleur complétée. Ainsi, lors de mises à pied, les travailleurs ne bénéficiant pas de cette sécurité d’emploi seront les premiers touchés ; ensuite, les autres travailleurs suivront par ordre décroissant d’ancienneté, pour autant que ceux qui demeureront en emploi puissent effectuer les tâches normalement associées au travail disponible.

Le droit de rappel s’effectue, quant à lui, dans l’ordre inverse des mises à pied, tant que le travailleur rappelé est apte à effectuer les tâches normalement associées au travail disponible au moment de son rappel.

La CSN-Construction travaille à ce que cette demande, toujours d’actualité, intègre les conventions sous une forme ou sous une autre, et ce, quoi qu’en disent certaines autres organisations.

Pour une véritable reconnaissance des sages-femmes

Les sages-femmes exercent une profession exceptionnelle. Dotées de compétences multiples et d’un grand sens de l’empathie, elles peuvent être appelées à assister un accouchement ou à répondre à une situation urgente à tout moment. En quelques mots : les sages-femmes concrétisent à elles seules le sens du mot vocation.

« Nous ne savons jamais de quoi la journée sera faite », souligne d’emblée Claudia Faille, qui quitte le poste de la présidence du Regroupement Les sages-femmes du Québec (RSFQ), après sept ans à en assurer les fonctions. Lorsqu’une sage-femme reçoit un appel, elle doit être en mesure d’évaluer très rapidement la situation. Et elle peut être demandée à toute heure pour un accouchement ou un suivi urgent. « Il nous arrive de rentrer très tard après une nuit de travail et de nous faire rappeler deux ou trois heures après. Ça aussi, c’est notre réalité. »

Pour pouvoir pratiquer au Québec, les étudiantes sages-femmes doivent compléter une formation de quatre ans à l’Université du Québec à Trois-Rivières. Bon an mal an, de 20 à 25 sages-femmes obtiennent leur diplôme, mais le manque d’accessibilité aux services dans plusieurs régions demeure criant. Selon un sondage CROP réalisé en 2010, une femme sur quatre souhaiterait accoucher à domicile ou dans une maison de naissance. « Les sages-femmes sont les seules professionnelles à répondre à leur demande, souligne Claudia Faille. À certains endroits, les femmes ne s’inscrivent même plus sur les listes d’attente, car elles sont convaincues de ne pouvoir obtenir de place. Et on ne parle que des régions où les services sont disponibles ! »

Claudia Faille, présidente sortante du RSFQ | Photo : Cédric Martin
Claudia Faille, présidente sortante du RSFQ | Photo : Cédric Martin

La Politique de périnatalité 2008-2018 du gouvernement du Québec prévoit pourtant que les sages-femmes devraient assister 10 % de tous les accouchements d’ici 2018. « On est passé de huit maisons de naissance en 2008 à treize en 2016, alors que le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) en prévoyait vingt et une pour 2018. De plus, le nombre de suivis complets et d’accouchements, qui se situe autour de 3 % par année, est encore bien en deçà de l’objectif fixé », déplore la présidente sortante du RSFQ.

Pour atteindre cette cible, le gouvernement devrait donner un soutien concret au programme universitaire, pour l’attraction et la rétention des sages-femmes, pour la promotion de la pratique et celle de l’accouchement naturel qui diminue les interventions obstétricales non nécessaires. Ces éléments sont cruciaux. « Malheureusement, il faut se battre contre le lobbyisme médical et la méconnaissance de notre pratique chez bien des professionnel-les de la santé », renchérit Claudia Faille.

Les conditions de pratique des sages-femmes laissent quant à elles encore à désirer, même si leur ténacité leur a permis de réaliser certains gains.

Une première négociation difficile

« La première entente conclue en 2004 avec le MSSS, alors sous l’autorité de Philippe Couillard, devait être complètement revue, puisqu’elle avait été négociée sans aucun rapport de force », précise Claudia Faille, qui s’est impliquée au comité de négociation en 2006, un an après avoir reçu son diplôme. Lors de cette première négociation, les salaires sont revus à la baisse. Alors que les sages-femmes gagnaient de 50 000 $ à 55 000 $ entre 1994 et 1999, époque où des projets-pilotes étaient en place avant la légalisation de la profession en 1999, leur salaire au premier échelon chute à 42 000 $ en 2004. Les sages-femmes sont outrées. C’est alors que le RSFQ prend une entente de service en 2009 avec la Fédération des professionnèles (FP–CSN) afin d’accompagner les sages-femmes dans l’amélioration de leurs conditions de travail et le développement de la profession. C’est à ce moment que Claudia devient présidente du RSFQ.

Lorsque Claudia Faille prend la relève de la présidence, elles sont prêtes à livrer la bataille. « On doit à Céline Lemay avant moi d’avoir fixé les fondements de la pratique », tient-elle à préciser. On arrivait à une deuxième étape. Avec le soutien indéfectible de la FP-CSN, la pression s’accentue et les actions de visibilité se multiplient pour sensibiliser l’opinion publique à leur réalité. Des comités de relations de travail, de mobilisation et de négociation sont mis en place. À l’époque, de nombreuses sages-femmes accumulent les heures supplémentaires sans être payées en retour. N’ayant pas encore acquis le réflexe de revendiquer leurs droits, elles n’utilisent pas les mécanismes prévus à l’entente. Une sage-femme est donc désignée pour la faire respecter.

Photo : Maxime Picard
Photo : Maxime Picard

En 2004, la prime qu’elles recevaient pour la garde s’élevait à 3600 $ par année. Autant dire qu’elles étaient rémunérées 1 $ l’heure de garde pour être disponibles 10 jours sur 14, 24 heures sur 24, afin de répondre à toute éventualité. « Il a fallu se battre pour défendre notre modèle de pratique centré sur la continuité, donc sur la garde », évoque Claudia Faille. Cette continuité favorisée par la garde permet aux sages-femmes de répondre directement aux besoins des femmes et des familles ; elle apporte d’excellents résultats, diminue les coûts de suivis et d’accouchement et favorise une plus grande satisfaction de la clientèle. Il en résulte également une augmentation des accouchements naturels, de l’allaitement maternel, de l’autonomie et de l’empowerment pour les femmes et les familles.

Des lacunes à corriger

Des lacunes importantes subsistent pour que les conditions de travail des sages-femmes, notamment celles qui sont reliées à la garde, soient à la hauteur de leur travail et de leur responsabilité.

En 2010, alors que s’amorce la deuxième négociation de leur entente avec le gouvernement, l’ampleur de la tâche est très vaste. Certes, elles réalisent certaines avancées, dont l’obtention de congés sans solde, le financement d’activités de perfectionnement, la prime de consolidation et d’attraction pour la responsable des services de sage-femme, mais des demandes importantes restent toujours lettre morte, tel le modèle de rémunération qu’elles souhaitent plutôt basé sur les suivis complets que sur les heures supplémentaires, à l’image des pratiques autonomes à travers le Canada.

Une des demandes centrales lors de la dernière négociation était la bonification du forfait de garde, qui finalement sera modifié à la hausse pour atteindre 8250 $. « Ceci représente dans les faits un peu plus de 2 $ l’heure de garde. C’est un peu mieux, mais toujours largement insuffisant. »

Photo : Michel Giroux
Photo : Michel Giroux

La politique de remboursement du kilométrage n’est toujours pas adaptée à la réalité des sages-femmes, dont le travail exige de nombreux déplacements, souvent à partir de leur domicile. « Les employé-es et les cadres du gouvernement sont remboursés à partir de leur point de service pour leurs déplacements, ce qui ne s’applique pas à notre travail. Nous devons à tout moment être en mesure de nous déplacer », explique-t-elle. Encore une fois, c’est une fin de non-recevoir de la part du gouvernement. Autre refus encaissé par les sages-femmes : l’intégration à l’entente des primes et des conditions dont bénéficient depuis 2008 celles qui œuvrent dans le Grand Nord. « Elles s’occupent de clientèles qui présentent des caractéristiques particulières et sont en plus responsables de la formation théorique et pratique des sages-femmes autochtones. Leurs conditions doivent officiellement être consignées à l’entente. »

La négociation de 2016 présente donc plusieurs défis. Le gouvernement a la possibilité de régler rapidement cette négociation, s’il se met en mode écoute et gros bon sens. Malheureusement, il semble très peu pressé à négocier. « Je ne serai plus à la présidence du RSFQ, mais j’accompagnerai le comité de négociation jusqu’à la conclusion d’une entente satisfaisante. Ma contribution au cours des sept dernières années me rend fière et satisfaite du travail accompli, même s’il reste beaucoup à faire », conclut Claudia Faille.

Le nouveau visage branché de la CSN

Le nouveau site est beaucoup plus convivial, facilite la navigation et, surtout, dispose d’un moteur de recherche très puissant qui repère facilement l’information. D’ailleurs, tout y est désormais réuni en thématiques comme, par exemple, les secteurs public et privé, la condition féminine, l’éducation, la langue et la culture, la santé et la sécurité du travail, l’environnement, etc.

« La CSN a été la première organisation syndicale à se doter d’un site Internet en 1995, mais avec les années, l’ancien site ressemblait à du spaghetti. Dans ce méli-mélo d’informations, nos organisations, nos syndicats et nos membres ne s’y retrouvaient plus, confirme Jacques Létourneau, président de la CSN. Notre nouveau site répond à un besoin réel et à une résolution adoptée lors du 64e congrès de mai 2014. »

Il aura fallu des mois de travail pour classifier minutieusement les informations présentées dans l’ancien site. De même, le débroussaillage des pages Web qui étaient reliées entre elles a nécessité temps et patience. Après de nombreuses réunions de conception, l’équipe du Service des communications de la CSN, en collaboration avec la coopérative de travail Koumbit spécialisée dans le domaine des technologies numériques, a développé cette nouvelle plateforme CSN simple et adaptée à tous les types d’appareils, qu’ils soient fixes ou mobiles.

Un contenu bien ordonné pour mieux communiquer

Le site de la CSN permet de suivre l’actualité syndicale, de présenter les nouveaux syndicats qui se joignent au mouvement et de détailler les luttes en cours tout comme les victoires de nos 325 000 membres.

Aussi, vous pouvez naviguer aisément parmi la vaste collection numérique de la CSN. Lisez et recherchez des nouvelles publiées depuis 2002, regardez les vidéos d’actualité et les photoreportages produits par le Service des communications et consultez la documentation étoffée comme nos mémoires, nos rapports de recherche et analyses, nos guides et tout autre type de publication.

« L’infrastructure du nouveau csn.qc.ca permettra un arrimage avec les fédérations, les conseils centraux et les syndicats affiliés et pourra éventuellement leur servir pour construire leur propre site », notent les concepteurs du nouveau site et conseillers syndicaux au Service des communications de la CSN, Richard Hink et Mathieu Murphy-Perron. Le site de la CSN utilise le système de gestion de contenu (CMS) « WordPress », à la base du quart des sites Web mondiaux. Il s’agit de l’un des logiciels disponibles les plus faciles à utiliser.

L’un des objectifs avoués de la refonte du site est de favoriser le partage des valeurs du mouvement sur Internet. D’ailleurs, sur la page d’accueil, la CSN vous invite à vous abonner dès maintenant à En mouvement, notre nouvelle infolettre hebdomadaire qui paraîtra dès la rentrée de septembre pour remplacer l’Info-austérité. Ces nouveaux outils modernes et incontournables nous projettent vers l’avenir. Sans conteste, ils favoriseront une meilleure communication avec nos membres.

Médias en transition, journalistes sous pression

Aux nouvelles plateformes se greffent de nouvelles tâches. L’environnement médiatique s’accélère, il faut faire plus avec moins. L’épuisement des troupes est bien réel, et la qualité de l’information, en péril. Perspectives CSN a assisté au colloque « L’information, le 4e pouvoir sous pression », organisé par la Fédération nationale des communications (FNC–CSN), la Fédération professionnelle des journalistes du Québec (FPJQ), le Centre d’études sur les médias et le Conseil de presse du Québec.

Aujourd’hui dans les médias, tout le monde, journalistes ou patrons, s’entend pour dire que rien n’est plus pareil depuis l’accélération du numérique, la multiplication des plateformes et le développement fulgurant des médias sociaux. Cette révolution numérique bouleverse les codes et les pratiques. Elle a fait plusieurs victimes et ce n’est pas terminé.

Tous les médias d’information se cher­chent un modèle viable, le support papier agonise. L’avenir est sur le net, mais la rentabilité se fait attendre. Il faut survivre, en attendant de trouver LA formule magique, le Graal.

Au cœur de la spirale, les journalistes et artisans de l’information qui tentent, eux aussi, de survivre et d’exercer le métier qu’ils aiment. « On mesure mal l’impact de ces changements sur la qualité de l’information journalistique et sur le travail des journalistes eux-mêmes », nous dit Judith Dubois, professeure de journalisme à l’École des médias de l’UQAM et auteure d’une recherche menée auprès de 121 journalistes d’expérience. « Les changements technologiques des dernières années ont réduit ce temps précieux dont les journalistes ont besoin pour bien faire leur travail. La pression pour faire plus avec moins et de plus en plus vite ne semble pas sur le point de s’arrêter, alors que la capacité de produire de l’information de qualité, elle, semble avoir atteint ses limites. »

Les journalistes interrogés reconnaissent bien sûr l’utilité des innovations technologiques, mais déplorent la nouvelle charge de travail et l’accélération des cadences qui les empêchent de bien faire leur travail. Ce commentaire d’un journaliste participant à la recherche en dit long sur les nouvelles pratiques : « L’obligation de produire en temps réel est devenue un dogme qui est en train de tuer le véritable journalisme qui suppose un temps de réflexion et de vérification des faits. Il y a de plus en plus de journalistes qui quittent le métier, parce qu’il y a une limite à ce que tu peux produire et à la vitesse à laquelle tu peux travailler. »

Un propos que reprend sans hésiter la présidente de la FPJQ, Lise Millette : « Depuis 2007, on a réduit de plus de la moitié les producteurs de contenus aux États-Unis, le même phénomène a aussi touché nos salles de rédaction. Quand on demande aux journalistes de tout faire sur toutes les plateformes, on fait une grave erreur. »

Le fait de servir à la fois le web, le journal et Twitter a des conséquences importantes, selon Valérie Lessard, journaliste et vice-présidente de la FNC–CSN. « Réécrire trois fois la même histoire sur des plateformes différentes, ça nous empêche d’arriver à un produit qui, le lendemain matin, va être vraiment pertinent pour nos lecteurs, en fonction de ce qu’on a à faire en presse écrite », déplore madame Lessard.

Valérie Lessard, journaliste et vice-présidente de la Fédération nationale des communications (FNC–CSN) | Photo : Pascal Ratthé
Valérie Lessard, journaliste et vice-présidente de la Fédération nationale des communications (FNC–CSN)
Photo : Pascal Ratthé

Une crise bien réelle

Les propriétaires des médias, surtout écrits, ne veulent plus entendre parler de « crise des médias ». Dorénavant, il faudrait plutôt parler de « médias en transition » pour ne pas effrayer les publicitaires qui les font vivre.

La crise est pourtant bien réelle et les revenus ne sont pas au rendez-vous, comme l’explique Claude Dorion, directeur général de la firme MCE Conseils : « Du côté des médias papier, l’argent de la publicité s’en va chez Google et Facebook, et les producteurs de contenus d’ici ne touchent presque rien. On a plus d’information que jamais, mais des acteurs majeurs de l’information au Québec pourraient ne pas survivre, surtout en presse régionale. Les revenus reliés à la presse papier sont en chute importante. Aux États-Unis, en 10 ans, 50 % des revenus ont disparu. Seulement 10 % de ces revenus ont pu être récupérés par leur média en ligne. Si ça continue, il va peut-être rester des publications papier pour l’art et l’architecture, mais l’information générale est menacée de disparition du paysage papier. »

Un point de vue que partagent les dirigeants des entreprises de presse comme Éric Trottier, vice-président information et éditeur adjoint du quotidien La Presse. « C’est clair que les journaux papier sont appelés à disparaître, petit à petit. J’entends encore plein de dirigeants de journaux dire qu’ils croient encore très fort aux journaux imprimés, même si 63 % des revenus publicitaires destinés au papier journal ont disparu depuis 10 ans », déplore le dirigeant.

Pour Claude Gagnon, PDG du Groupe Capitales Médias, il ne fait aucun doute que le support papier est condamné à disparaître : « Ce qui est important, c’est que l’information demeure. Qu’on la lise sur du papier, qu’on la lise sur une tablette, sur un téléphone, ça ne changera absolument rien. Ce qui est encourageant, c’est que depuis 25 ans, nous n’avons jamais eu autant de lecteurs. Le phénomène multiplateforme nous amène une nouvelle clientèle. »

L’abandon du format papier en semaine a été un vif succès selon Éric Trottier de La Presse, « jamais La Presse n’a eu autant de lecteurs dans toute l’histoire du journal. Notre défi maintenant, c’est de rejoindre les jeunes de 20 ans qui, en ce moment, se contentent de regarder Facebook sur leurs téléphones. Nos lecteurs de 70 ans sont déjà avec nous. »

Le modèle de La Presse +, réalisé à grands frais, n’est pas à la portée de toutes les bourses. Ce modèle de gratuité fait d’ailleurs sourciller le professeur Pierre C. Bélanger, du département de communication de l’Université
d’Ottawa. « Je m’interroge sur ce modèle, parce que dans tout ce qui se fait sur la planète, il n’y a que deux médias qui donnent l’information gratuitement sur le web : The Independant au Royaume-Uni et La Presse +, ici au Québec, qui mise beaucoup sur la rentabilité de son modèle d’affaires. Pourquoi tous les autres vendent-ils leur information ? La réalité, c’est que 75 % des principaux journaux américains tarifent leur information sur le web et préfèrent vous demander un petit 4 $ par mois. Pour moi, le modèle de gratuité de l’information ne semble pas fonctionner. »

Claude Dorion, directeur général de la firme MCE Conseils | Photo : Pascal Ratthé
Claude Dorion, directeur général de la firme MCE Conseils | Photo : Pascal Ratthé

Oui à l’aide gouvernementale

Tant que les entreprises de presse ne seront pas parvenues à monnayer les contenus, leur situation demeurera précaire. L’information dans le secteur privé est la seule qui ne reçoit pas sa part d’aide financière des gouvernements.

Aujourd’hui, les médias papier sont presque tous en faveur d’une aide gouvernementale. Claude Dorion de MCE Conseils rappelle que « les milliers d’emplois perdus au Canada dans les médias ont privé les gouvernements de millions de dollars en recettes fiscales. Nous, nous croyons que le gouvernement peut aider ce secteur comme il le fait pour d’autres tel que le secteur des jeux vidéo afin d’assurer une diversification des revenus et permettre au secteur de la presse écrite d’assurer la transition. »

En Finlande, l’aide de l’État est parvenue à assurer la rentabilité des entreprises de presse, sans contraindre les médias ni compromettre la qualité de l’information. En ce domaine, le Québec et le Canada font figure de « parents pauvres ». Les journaux du Québec reçoivent une aide gouvernementale annuelle d’environ trois dollars par habitant contre 92 dollars pour les journaux finlandais. Au Canada, le fédéral ne contribue que pour 31 dollars par habitant au financement de Radio-Canada, alors que certains pays, comme la Norvège, consacrent 164 dollars par habitant à leur télévision publique.

En attendant une hypothétique aide de l’État, ce sont les journalistes et autres artisans producteurs de contenus qui font tourner la machine et qui, chaque jour, mettent en jeu leur réputation et leur intégrité, comme le souligne Francine Bousquet, coordonnatrice à la FNC–CSN : « L’information de qualité, ce sont les journalistes qui la font et la qualité de l’information, ce sont les journalistes et les syndicats qui l’ont toujours défendue. Je ne connais pas un seul syndiqué qui est contre ça. Moderniser nos conventions, c’est aussi ce qu’on fait depuis longtemps afin que l’information continue d’être faite par des humains, et non pas par des robots. »

Toutes les raisons de s’inquiéter

Mais qu’en est-il de la préservation des emplois à long terme, de la perte d’expertise, de l’impact sur la chaîne d’approvisionnement et de la disparition éventuelle des sièges sociaux ?

Chaque fois que le Québec perd un de ses fleurons, on s’inquiète, et avec raison. Des entreprises comme Rona ou St-Hubert, vendues récemment à des firmes étrangères, emploient des milliers de personnes et génèrent une activité économique considérable. La vente du quincaillier Rona à la multinationale Lowe’s et l’achat des restaurants St-Hubert par l’ontarienne CARA ne sont pas sans soulever beaucoup de questions. Des questions importantes que le gouvernement Couillard préfère, lui, ne pas se poser.

« Notre gouvernement est un ardent partisan du laisser-faire, soutient Robert Laplante, directeur général de l’Institut de recherche en économie contemporaine (IRÉC). On l’a vu avec la réaction assez insouciante et légère de la ministre Anglade qui se réjouissait de la transaction de Rona sans même se poser une seule question sur les répercussions de cette transaction sur le secteur de la quincaillerie, par exemple. Avec une telle philosophie, on ne peut pas s’attendre à ce qu’il y ait des mesures interventionnistes mises de l’avant par le gouvernement. Ce n’est pas parce qu’on ne pourrait pas en imaginer, c’est parce qu’on ne veut pas en déployer tout simplement. »

Selon Philippe Hurteau, chercheur à l’Institut de recherche et d’informations socio-économiques (IRIS) : « La vente d’actifs québécois à l’étranger peut poser un problème et il y a lieu de s’inquiéter. Ce n’est pas juste un enjeu commercial, c’est un enjeu politique de développement économique pour préserver des emplois et continuer à en développer dans plusieurs secteurs d’activité chez nous. On ne sent pas du tout cette volonté de la part du gouvernement actuel. Ce n’est pas important pour lui. Il estime normal la vente des entreprises dans le libre marché, comme s’il n’y avait pas de particularités au Québec. »

Statistiques réductrices et incomplètes

Selon les données du ministère québécois de l’Économie, des Sciences et de l’Innovation, entre le 1er janvier et le 24 février 2016, 255 entreprises québécoises ont été vendues à des sociétés non québécoises, dont 85 sont situées hors du Canada. Pendant la même période, les entreprises d’ici en ont acquis 456 qui sont situées au Canada et à l’étranger.

En théorie, le bilan des ventes et des achats serait donc plus positif que négatif, mais selon Pierre Patry, trésorier de la CSN, il n’y a pas de quoi se réjouir : « Il faut songer aux répercussions sur les emplois ici. Et pas uniquement les emplois des entreprises visées par les acquisitions. Si l’on prend le cas de St-Hubert, c’est également toute la chaîne d’approvisionnement qui risque d’être compromise, parce qu’à partir du moment où les décisions vont être prises ailleurs qu’au Québec, peut-être que ces nouveaux propriétaires n’auront pas la même sensibilité pour l’achat local, pour l’approvisionnement chez des fournisseurs québécois. La perte d’expertise dans plusieurs domaines est une très mauvaise chose. »

Photo : Cédric Martin
Photo : Cédric Martin

Derrière les « statistiques officielles », il y a des noms, de gros noms. Qui peut prétendre que la vente du Cirque du Soleil, de Provigo, d’Alcan, de Sico, de Cambior, de Biochem Pharma et de centaines d’autres joueurs majeurs est une bonne chose pour le tissu économique québécois ?

Selon Philippe Hurteau, chercheur à l’IRIS, « il ne faut pas oublier que dans le cas des sièges sociaux, ce sont de bons emplois de cadres, de gestionnaires, qui s’en vont à l’étranger. C’est aussi le personnel et les fournisseurs qui sont brimés parce que les nouveaux acquéreurs ont souvent leur main-d’œuvre et leurs propres fournisseurs ».

Absence de relève et stratégie perdante du gouvernement

« Ce qui est maintenant à risque avec le contexte que nous traversons, ajoute Robert Laplante de l’IRÉC, c’est que beaucoup d’entrepreneurs qui ont développé l’économie québécoise arrivent à la retraite. Plusieurs entreprises vont soit traverser une crise de succession, soit voir glisser leur propriété vers l’extérieur. Le gouvernement du Québec a l’air de regarder la chose en spectateur, mais c’est évident que l’effet combiné de la faiblesse du dollar et du vieillissement assez massif de toute une cohorte d’entrepreneurs va créer beaucoup d’occasions d’affaires attrayantes pour différents secteurs économiques. »

« Si le gouvernement québécois ne fait pas d’effort particulier pour défendre certaines entreprises québécoises, on va avoir un problème, ajoute Philippe Hurteau. Le gouvernement veut surtout attirer des investissements étrangers et redevenir une économie de succursale. Les efforts mis sur le Plan Nord nous montrent que Philippe Couillard voit notre économie comme un réservoir de ressources disponibles aux investissements étrangers. C’est une vision du temps de Duplessis, on brade nos ressources naturelles et on ne demande rien en retour. »

Un point de vue que partage Robert Laplante de l’IRÉC. « Le Plan Nord, c’est une stratégie qui consiste essentiellement à vendre la matière première faiblement transformée et à en vendre le plus possible. Heureusement pour nous, ça ne marche pas. L’essentiel de la richesse à tirer de ces ressources naturelles-là sera capté à l’extérieur. Le Plan Nord, c’est un choix de perdant, une stratégie d’exportation d’emplois. »

Selon Pierre Patry, « après la “grande noirceur” sous Duplessis, on est parvenus à prendre en main notre économie. On a mis en place une série d’institutions économiques pour mieux contrôler notre destin. Malheureusement, aujourd’hui, on a l’impression de reculer. Sous la pression des actionnaires, les conseils d’administration des entreprises ne gèrent qu’en fonction des intérêts à court terme, au détriment du développement à long terme des entreprises. Ceux qui se préoccupent le plus de l’avenir des entreprises, ce sont les travailleuses et les travailleurs qui malheureusement n’ont pas droit au chapitre. »

Le Québec, un refuge fiscal

« La politique fiscale du Québec favorise l’acquisition de nos fleurons par les entreprises étrangères, ajoute le chercheur Philippe Hurteau. Depuis quelques années, les entreprises étrangères qui achètent nos meilleures compagnies le font souvent pour des raisons d’optimisation fiscale. Burger King a acheté Tim Hortons non pas pour se développer dans le secteur des beignes et du café, mais pour pouvoir déclarer des revenus au Canada et au Québec et se soustraire au fisc américain. »

Le Canada impose moins les entreprises que les États-Unis et le Québec impose moins ses sociétés que les autres provinces canadiennes. Les sociétés états-uniennes achètent des entreprises d’ici pour avoir pignon sur rue et profiter de notre régime fiscal. Selon le professeur Hurteau, « les différents gouvernements ont tellement baissé les impôts des entreprises et des sociétés, on a tellement mis en place de programmes de soutien et de crédits d’impôts pour les entreprises, que le Québec et le Canada sont devenus des refuges pour les entreprises étrangères. Ce qu’on reproche aux paradis fiscaux, eh bien, il y a des entreprises qui nous utilisent pour arriver aux mêmes fins. »

L’impôt aux entreprises en chute libre

Les contributions fiscales des entreprises sont en chute libre depuis une quarantaine d’années au Québec et au Canada et c’est ce qui fait qu’on devient attractif pour les entreprises, surtout américaines. Pour Philippe Hurteau, « décrire le Québec comme un “enfer fiscal” pour les entreprises, c’est vraiment quelque chose d’habile, mais ce n’est absolument pas le reflet de la réalité, bien au contraire. Cela sert surtout à faire pression sur les gouvernements pour baisser toujours davantage les impôts et les taxes sur la masse salariale. Pour une entreprise, il est nettement plus avantageux de payer ses impôts au Québec qu’en Ontario ou dans le Maine. Comme entreprise, si j’avais à choisir une juridiction pour payer mes impôts en Amérique du Nord, ce serait au Québec ».

Des solutions existent

La vente d’entreprises québécoises à des entreprises étrangères est inévitable, jusqu’à un certain point. Il faut donc, selon Pierre Patry, trésorier de la CSN, « imaginer d’autres formules de prise de possession, pour s’assurer que les intérêts demeurent au Québec. On peut faciliter la création de coopératives de travailleurs, une meilleure utilisation des outils de développement économique qu’on a déjà. Le gouvernement québécois a le devoir de réfléchir à cette question. Il faut donner plus d’obligations aux conseils d’administration des entreprises, pour s’assurer qu’ils préservent les emplois au Québec. »

Paradis fiscaux et austérité: les atomes crochus

En 2014, c’est avec beaucoup de fierté que la CSN avait remis le prix Pierre-Vadeboncœur à l’essayiste Alain Deneault pour son monumental travail qui a abouti à la parution de Paradis fiscaux, la filière canadienne. Au terme d’une longue recherche, l’auteur a démonté tous les fils de cette incroyable arnaque permise par les lois et encouragée par des financiers et des banques peu scrupuleux du bien commun. Faut-il s’attendre à autre chose de ces individus et de ces institutions ? Non, bien sûr.

C’est pour cette raison qu’il revient à l’État d’intervenir pour que cesse cette pratique qui soustrait des milliards et des milliards de dollars au fisc, en toute impunité. Dans l’édition précédente de Perspectives CSN, au moment où le scandale des Panama Papers était rendu public, la CSN consacrait un reportage à ces voleurs de grand chemin planétaires. Nous pouvions y lire notamment que « le Tax Justice Network, une organisation qui dénonce les paradis fiscaux, estime entre 21 000 et 32 000 milliards de dollars les montants placés à l’abri de l’impôt. Les entreprises canadiennes et les Canadiens les plus riches y détiennent l’équivalent de 200 milliards de dollars. Ce sont là les chiffres officiels, mais ils sous-estiment largement la réalité ».

Des milliers de milliards — on appelle ça des billions — perdus, ça aide à comprendre la source des drames humains qui se jouent quotidiennement depuis la mise en œuvre des politiques d’austérité à Québec, où tout le monde ne s’émeut pas de voir des personnes âgées ne recevoir qu’un bain par semaine. Les services publics sont sous-financés, de plus en plus tarifés et en proie à un processus de privatisation qui fera mal, surtout à la classe moyenne et aux classes populaires. Les programmes sociaux, comme les services de garde éducatifs et la sécurité du revenu, sont la cible d’un tir groupé des libéraux provinciaux. Les organismes communautaires voient leur financement fondre, et même disparaître. Ces compressions frappent fort et empêchent un développement économique créateur d’emplois de qualité.

Dans Une escroquerie légalisée, son dernier livre, Alain Deneault avance, à juste titre, que les causes de l’austérité trouvent justement leurs fondements dans les paradis fiscaux, en cela qu’ils privent l’État de revenus et qu’ils commandent donc les politiques restrictives.

Une valse de milliards étourdissante

Dans son observatoire des conséquences des mesures d’austérité au Québec, l’IRIS établit à plus de quatre milliards de dollars le total des coupes recensées depuis 2014. Un montant gigantesque, au vu des conséquences de ces compressions ; une goutte d’eau dans cet océan de dollars qui se jette dans les paradis fiscaux. En 2014, près du quart des investissements directs étrangers du Canada y étaient réalisés. Selon certaines estimations, les pertes fiscales découlant des capitaux canadiens qui y sont placés représenteraient six milliards de dollars par année. Le ministère des Finances évalue lui-même qu’ils privent le Québec de plus d’un milliard annuellement. De quoi donner les moyens aux États canadien et québécois de créer de bons emplois et de financer adéquatement les programmes sociaux ainsi que les services de santé et d’éducation, par exemple.

Entre 1988 et 2014, les actifs canadiens dans les centres financiers extraterritoriaux ont été multipliés par 22. Curieusement, c’est au cours de cette période qu’on a constaté un assouplissement des règles fiscales qui a largement favorisé les entreprises et les plus riches… et le début du désengagement de l’État tel qu’on le connaît depuis la fin de la Révolution tranquille.

Le réveil des élus n’est que tout récent, mais il faut le souligner. Dès le lendemain de l’élection fédérale, Stéphane Dion a déclaré que son gouvernement agirait sur cette question. À Québec, on a même annoncé une commission parlementaire.

Au début de juin, au moment de mettre sous presse, le conseil confédéral de la CSN s’est penché sur les paradis fiscaux. Les délégué-es ont débattu des recommandations contenues dans notre mémoire, qui comprend une analyse très complète sur le sujet. Nous aurons donc l’occasion de revenir sur les moyens que nous entendons déployer pour amener nos gouvernements à agir. Car il est plus que temps qu’ils le fassent.

Jacques Létourneau, président de la CSN
Jacques Létourneau, président de la CSN

Chicane, réconciliation, trêve, consensus

Alain Longpré, CSN, 2016, 120 pages
Alain Longpré, CSN, 2016, 120 pages

Depuis quelques années, je contribue à la chronique « À la librairie CSN ». Ça fait partie de ma job, pourrais-je dire : je travaille à la Documentation–CSN. Alors que j’étais plongée dans une lecture, disons cérébrale, j’ai appris que la CSN s’apprêtait à publier les écrits d’un gars de notre organisation. Je vous avoue que je n’ai pas été tentée spontanément : le titre me parlait peu (et si c’était écrit en joual, ai-je pensé). Mais c’était avant d’avoir la plaquette entre les mains… Puis, j’ai été conquise ! Tout sourire, j’ai commencé à lire.

Les mots d’un gars de shop, c’est un recueil de 28 chroniques et quelques nouvelles parues entre 2001 et 2016, dans le journal du Conseil central de Lanaudière–CSN. Le gars, c’est Alain Longpré, de Saint-Gabriel-de-Brandon, élu du conseil central depuis près de 20 ans. La shop, c’est la Bridgestone-Firestone, mais ç’aurait pu être ailleurs : il arrive que la conscience ouvrière ouvre la voie à l’action syndicale. La trentaine de textes, c’est autant de cadeaux qui mettent en relation l’individu dans sa communauté avec les forces agissantes qui le forment, le transforment et donnent sens à sa vie.

Dans chaque histoire se raconte l’humanité : la dignité écorchée, la bonté et la générosité exprimées, l’humilité du geste posé, la colère manifestée, l’injustice dénoncée, la sensibilité à l’Autre, la solidarité. La phrase est simple et courte, syncopée ; l’image, forte, comme celle d’une chanson réaliste. Mais aussi le plaisir des sens, renouvelé : au gré des pages, j’ai entendu Lucette parler à sa pigeonne ; j’ai senti, puis goûté la pluie fine au travers des arbres ; j’ai touché la pierre d’Alphonse sur laquelle des ouvriers ont gravé le mot solidarité ; et au garage Brousseau, j’ai vu, moi aussi, mon premier Attikamek. En filigrane, on voit poindre les enjeux qui tiennent en alerte notre gars, toujours prêt à s’indigner, pour mieux dénoncer. Parce que Les mots d’un gars de shop, ce n’est pas qu’un Longpré tranquille.

Le travail comme passion

Les usagers dont s’occupe Laurier Courtemanche ont, pour la plupart, subi des accidents — parfois bénins, d’autres fois plus violents — et ont des séquelles importantes au cerveau. « Généralement, ils n’ont pas de grandes séquelles physiques, mais c’est surtout leur tête qui est endommagée. Ils souffrent de fatigabilité et peuvent avoir de la difficulté à organiser leur journée, ou à suivre une simple conversation, explique-t-il. Moi, j’interviens à la phase trois, à la RAIS (réadaptation axée sur l’intégration sociale), et toujours en étroite collaboration avec une équipe multidisciplinaire. C’est l’étape juste avant leur réintégration en milieu du travail. Chez nous, c’est un usager sur deux qui retournera sur le marché du travail. »

Les usagers qui fréquentent le centre Lucie-Bruneau vivent sans contredit des moments difficiles. « Ce n’est ni plus ni moins un processus de deuil auquel ils doivent faire face. Heureusement, la solution, c’est le temps, relate le kinésiologue. Il y a 18 fois plus de séparation chez notre clientèle que dans la société en général. Ça demande un immense effort d’adaptation autant pour la personne que pour sa conjointe ou son conjoint, ses enfants et sa famille ». Au centre Lucie-Bruneau, l’usager est au cœur des préoccupations. Les interventions sont adaptées à leurs besoins et la thérapie est propice aux confidences. « Souvent, les usagers ont le moral à terre et certains parlent de suicide. Je leur demande alors si je peux en parler en équipe multidisciplinaire pour qu’on puisse s’occuper de cet aspect aussi. »

Travailler auprès d’hommes et de femmes dont la vie vient de basculer du tout au tout peut parfois être difficile. « T’es fait ou t’es pas fait pour ça. Faut être passionné, ça c’est certain. Être constamment dans une relation d’aide, ça nourrit beaucoup, mais ça épuise aussi », note Laurier Courtemanche. Mais la passion est toujours au rendez-vous. « Même en vacances à Cuba, si je croise quelqu’un qui a un handicap, c’est certain que je vais aller lui parler. Ça me suit ! », explique avec enthousiasme celui qui prendra sa retraite dans quelques années.

Exercer le métier de kinésiologue en centre de réadaptation fait aussi réaliser que la vie est, malgré tout, bien faite. « Les gens développent d’autres compétences, trouvent une nouvelle voie. Même chose pour les proches qui n’ont pas d’autre choix que de s’adapter. Pour ma part, je suis toujours vigilant. Chaque matin quand j’enfourche mon vélo, je suis conscient qu’un accident peut m’arriver. »

Mais la véritable récompense vient quand les usagers — ceux avec qui les intervenants travaillent présentement ou les anciens — témoignent de leur reconnaissance envers leur travail. « Je me souviens d’une enseignante, victime d’un accident de vélo plutôt anodin — elle avait roulé dans un trou —, mais qui avait été sérieusement blessée. C’était une battante. Elle a réussi a réintégrer son travail, à raison de deux jours par semaine. Elle était revenue au centre pour nous dire que nous avions été une équipe extraordinaire. Ça, ça vaut pas mal plus que mon salaire aux deux semaines », relate Laurier Courtemanche, les yeux dans l’eau.

Les régimes publics de retraite, un outil de répartition de la richesse aux retombées économiques importantes

La CSN désire rappeler que les régimes publics de retraite sont des outils collectifs de répartition de la richesse qui doivent permettre à une majorité de la population de vivre avec des revenus décents au moment de la retraite. Profitant de la rencontre des ministres des Finances du Canada, la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante (FCEI) s’est encore une fois illustrée par une nouvelle salve antisyndicale, prétendant que les RPC/RRQ ne profitent, dans les faits, qu’aux syndiqué-es de la fonction publique.

Les solutions mises de l’avant par les porte-parole de la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante concernent les plus favorisés de la société, alors que les travailleurs et les travailleuses précaires n’ont souvent pas les moyens de financer leur retraite avec les outils privés. D’ailleurs, la vice-présidente de la CSN, Francine Lévesque, s’étonne des données utilisées par la FCEI : « Je m’explique mal d’où sort ce 15 % de ménages en difficulté. Selon les chiffres actuels, on parle de 50 % des travailleuses et des travailleurs qui dépendent entièrement des régimes publics, ce qui ne leur permet pas de subvenir à l’ensemble de leurs besoins, et c’est sans compter ceux et celles qui ont accès à un régime complémentaire insuffisant. Les régimes publics de retraite sont un choix de société, tout le monde cotise afin de permettre à toutes et à tous de vivre avec un revenu décent. Augmenter la cotisation n’empêche pas ceux et celles qui ont plus de revenu d’investir dans d’autres outils leur permettant d’accroître leur revenu de retraite », explique-t-elle.

La CSN, avec plusieurs partenaires, revendique de hausser de manière significative le taux de remplacement du revenu d’avant la retraite, et d’augmenter de façon substantielle le maximum des gains admissibles. « Ces deux actions permettraient, à terme, d’assurer une retraite décente aux personnes à faible revenu, tout en bonifiant celle de la classe moyenne. Tout le monde en sortirait gagnant », conclut Francine Lévesque.

Les salarié-es des CPE font connaître leurs demandes à la table centrale

C’est aujourd’hui que les travailleuses et les travailleurs des CPE feront connaître leurs demandes à la nouvelle table centrale dans le cadre des négociations en vue du renouvellement de leur convention collective échue depuis le 31 mars 2015. Les syndiqué-es des CPE membres de la CSN ont obtenu du ministère de la Famille la mise en place d’une table centrale qui regroupe également la majorité des associations patronales régionales, après plusieurs mois de pourparlers.

Il était important pour les salarié-es des CPE que le Ministère crée cette table nationale, afin que l’ensemble des travailleuses et des travailleurs du réseau obtiennent les mêmes conditions de travail, peu importe la région d’où elles proviennent. « Les CPE forment un réseau, il est important pour nous d’avoir les même conditions de travail peu importe notre provenance. Bien sûr, il existe des particularités régionales, c’est pour cela que certaines matières seront discutées au niveau local et régional », explique Louise Labrie, représentante du secteur des CPE à la Fédération de la santé et des services sociaux (FSSS–CSN).

Profitant de la première rencontre de cette table centrale, le comité de négociation syndical a convenu avec les représentants de la partie patronale de faire connaître l’ensemble de leurs demandes qui ont été établies par l’ensemble des membres lors de tournées d’assemblées générales. « Les demandes ont été longuement réfléchies et débattues au sein de nos instances. Elles sont le fruit de consultations et de discussions où les membres ont pu se prononcer sur les conditions dans lesquelles la prestation de travail s’effectue. Nous espérons que la partie patronale saura y donner suite avec toute la considération que nous méritons », affirme Louise Labrie.

Pour la FSSS–CSN, il est clair que le gouvernement a l’occasion d’envoyer un signal positif aux travailleuses et aux travailleurs du réseau des CPE qui vivent les contrecoups des mesures d’austérité. Dany Lacasse, vice-président de la FSSS–CSN, pense que le gouvernement doit profiter des négociations actuelles pour montrer qu’il reconnaît le travail de ces salarié-es. « Les services de garde éducatifs, en particulier les CPE, ont vécu des mois difficiles et c’est l’ensemble du personnel qui subit la pression et le stress, le gouvernement doit maintenant profiter de l’occasion et régler rapidemment en répondant favorablement aux demandes des syndiqué-es », plaide-t-il.

L’information : un bien public qui doit être protégé et expliqué

L’État québécois, à commencer par le ministère de la Culture et des Communications, doit intervenir de façon urgente pour protéger une information professionnelle de qualité partout au Québec. Dans un mémoire sur l’information présenté au Bureau du renouvellement de la politique culturelle, la Fédération nationale des communications (FNC–CSN) détaille une douzaine de recommandations afin d’assurer la survie de l’information partout sur le territoire.

« Le grand public et le gouvernement doivent comprendre que le virage numérique et les médias sociaux exercent une pression importante sur les modèles d’affaires des médias professionnels d’information qui forment pourtant le 4e pouvoir. Ils doivent être appuyés dans cette période de transformation, sans quoi, fermetures, compressions et licenciements de journalistes vont se poursuivre au péril de la démocratie », de mettre en garde Pascale St-Onge, présidente de la FNC–CSN. Nos médias doivent obtenir du soutien étatique pour s’adapter et mieux rejoindre les gens sur les plateformes de leur choix, entre autres sous forme de crédits d’impôt temporaires sur la masse salariale. En aucune façon, cette aide ne doit compromettre l’indépendance des organes de presse face à l’État.

Une récente étude de la firme MCE-Conseils confirme que le tiers des recettes publicitaires québécoises est désormais encaissé par les géants américains du web. En retour, ils ne produisent aucun contenu et ne payent presque aucune taxe ici. En ce sens, le gouvernement doit exiger des rediffuseurs d’information tels que Google et Facebook qu’ils contribuent, par exemple sous forme de redevances, au financement de la production et de la diffusion d’une information de qualité et diversifiée.

Éduquer et mettre en garde le public contre « les fausses nouvelles »

La FNC–CSN demande également au ministère de l’Éducation de jouer son rôle auprès des adultes de demain. Il faut mettre sur pied, et de toute urgence, des programmes d’éducation sur les médias. Les citoyennes et les citoyens doivent être en mesure de faire la différence entre les informations provenant de sources fiables et les « fausses nouvelles », entre le contenu promotionnel et le contenu rédactionnel. Ils doivent également bien saisir le fonctionnement des médias pour en comprendre le rôle dans notre société démocratique.

De plus, le public doit développer sa compréhension du fonctionnement des réseaux sociaux. « Est-ce que chaque internaute sait que ce qui apparaît sur son fil d’actualité, sur Facebook par exemple, a été sélectionné par des algorithmes secrets conçus pour alimenter les usagers selon leurs intérêts ? Aucune place ici pour la diversité des voix. On ne fait que conforter les gens dans leurs pensées », explique Pierre Roger, secrétaire général de la FNC–CSN.

Pour entretenir une saine démocratie, il faut des citoyennes et des citoyens bien informés et éclairés.

Une nouvelle convention collective pour les employés de soutien des cégeps

Les représentantes et les représentants du Secteur soutien cégeps de la FEESP–CSN ont signé, hier à Montréal, leur nouvelle convention collective issue de l’entente de principe intervenue en décembre dernier avec le Comité patronal de négociation des collèges.

En plus de contrer l’ensemble des reculs demandés par la partie patronale, les employé-es de soutien des cégeps ont obtenu des gains concrets. La contribution de l’employeur au régime d’assurance collective a ainsi pu être bonifiée. Les ouvriers spécialisés pourront dorénavant bénéficier d’une prime de rétention de 10 % pour chaque heure travaillée. Les postes précaires, issus de projets spécifiques, seront également limités dans le temps afin de favoriser la sécurité d’emploi.

L’ensemble des salariés de soutien des cégeps bénéficieront de hausses salariales de 1,5 %, 1,75 % et 2 %, en 2016, 2017 et 2018, ainsi que de montants forfaitaires de 0,30 $ pour chaque heure travaillée en 2015 et de 0,16 $ l’heure en 2019. En 2019, dans le cadre des relativités salariales, les hausses seront de 2,4 % en moyenne. La convention collective viendra à échéance le 31 mars 2020.

Au plus tard le 15 septembre prochain, les employé-es de soutien affiliés à la FEESP–CSN pourront toucher l’ensemble des sommes rétroactives au 1er avril 2015.

« Nous sommes très fiers d’avoir pu enfin conclure cette ronde de négociation, indique la présidente du Secteur soutien cégeps de la FEESP–CSN, Johanne Cadieux. Le gouvernement avait entamé ces négociations avec l’objectif de revoir l’ensemble des dispositions de notre convention collective en attaquant notre sécurité d’emploi, notre organisation du travail, l’accessibilité à l’assurance salaire et en chamboulant nos horaires de travail. Nous avons non seulement pu préserver nos acquis, mais nous avons également obtenu des gains tangibles, et ce, grâce à la mobilisation et la détermination de nos membres. »

À propos

Le Secteur soutien cégeps représente plus du deux-tiers du personnel de soutien du réseau collégial. Il regroupe 40 syndicats, affiliés à la Fédération des employées et employés de services publics (FEESP–CSN), représentant environ 4 000 employés-es de soutien des cégeps. Parmi ses membres, on retrouve notamment des techniciennes en travaux pratiques, des agentes de soutien administratif et des ouvriers spécialisés.

Pour des conditions dignes dans nos CHSLD

Blogue de Jean Lacharité

La semaine dernière, la Commission de la santé et des services sociaux de l’Assemblée nationale a déposé un rapport fort éclairant sur les conditions de vie des adultes hébergés en centre d’hébergement et de soins de longue durée, à l’issue d’un long travail de consultation méticuleux auquel la CSN a bien entendu participé. Voilà une excellente démarche non partisane comme on aimerait en voir beaucoup plus souvent dans notre démocratie !

À la CSN, nous représentons la majorité des travailleuses et des travailleurs offrant des services aux aîné-es. Nous accueillons avec beaucoup d’ouverture les conclusions de ce rapport ainsi que ses recommandations. Entre autres, les parlementaires des différents partis recommandent de revoir la façon dont sont établis les ratios de personnel dans les établissements, et ce afin d’assurer une prestation adéquate de services aux personnes hébergées, selon leurs besoins individuels. Ils souhaitent également que plus d’efforts, matériels et humains, soient consentis aux soins d’hygiène et à l’alimentation. Ils proposent de valoriser davantage les professions œuvrant dans nos CHSLD, notamment les préposé-es aux bénéficiaires, et d’en faire davantage au niveau de la formation du personnel. Ils s’attaquent également à différents aspects ayant un impact concret sur la qualité de vie des résident, notamment qu’on limite le fort roulement de personnel, et proposent qu’on privilégie davantage la proximité géographique d’un milieu de vie et qu’on évite de séparer des couples lorsque les deux ont besoin d’être hébergés en CHSLD.

Ces recommandations, nous apparaissent viser juste, pour l’essentiel. Nous sommes d’avis que la situation actuelle découle d’une très longue période de laisser-aller au cours de laquelle, les conditions de vie des aîné-es se sont détériorées. Nous invitons le gouvernement à saisir l’occasion qui lui est offerte par ce consensus entre les députés des différentes formations politiques afin de proposer sans tarder des changements importants, nécessaires pour assurer à tous les aîné-es le droit de vivre dans la dignité.

Si le gouvernement souhaite améliorer les choses dans les centres d’hébergement et les CHSLD, dans le respect des travailleuses et des travailleurs, il trouvera en la CSN et les travailleuses et les travailleurs, son meilleur allié

Les syndiqué-es municipaux manifestent leur colère devant une attaque à leurs droits fondamentaux

Réunis en instance à Sherbrooke aujourd’hui pour débattre des moyens de contrer le projet de loi 110 sur la négociation collective des employé-es municipaux, les secteurs municipal et transport de la Fédération des employées et employés de services publics (FEESP–CSN) en ont profité pour envoyer un message au président de l’Union des municipalités du Québec et maire de Sherbrooke, Bernard Sévigny, et au ministre des Affaires municipales, Martin Coiteux, lors d’une manifestation devant l’Hôtel de ville à l’heure du midi.

Pour la CSN, le PL 110 est une attaque frontale contre le droit de négocier. Il apparaît comme une porte ouverte à l’adoption de lois spéciales pour décréter les conditions de travail des salarié-es syndiqués du secteur municipal. Les membres le l’UMQ, monsieur Sévigny notamment, se sont réjouis de ces nouvelles dispositions intervenues en échange d’une coupe des subventions provinciales aux municipalités de 300 millions de dollars par année, pour un total de 1,2 milliards de dollars.

« Pour 1,2 milliards de dollars, les maires de l’UMQ pensaient acheter un laisser-passer – en réalité ils ont acheté une guerre ouverte, a commenté la vice-présidente de la CSN, Francine Lévesque. Ce projet de loi mettra fin à la paix sociale qui règne à l’heure actuelle. Depuis 2000, plus de 96 % des négociations entre les municipalités du Québec et les syndicats de travailleurs municipaux ont été réglées sans conflit de travail. Avec le dépôt de PL 110, le vendredi passé, monsieur Coiteux a choisi de rompre cette paix de manière brutale. »

20160616_125437

Denis Marcoux, président de la FEESP–CSN, a déclaré que la fédération sera présente partout au Québec afin d’appuyer les membres des syndicats municipaux pour mener cette bataille contre une loi qui constitue une autre pièce dans un ensemble d’attaques contre le mouvement syndical.

« Avec l’existence actuelle de la Loi 15, qui force la restructuration des régimes de retraite, c’est la capacité de négocier toutes les conditions de travail qui est menacée, a-t-il poursuivi. Une fois de plus, le gouvernement de Philippe Couillard s’attaque au droit d’association des travailleurs syndiqués du secteur municipal. »

Le PL 110, Loi concernant le régime de négociation des conventions collectives et de règlement des différends dans le secteur municipal, sous le couvert de créer un régime de règlement des différends, pave une voie de contournement au droit de libre négociation en donnant la possibilité de nommer un mandataire spécial qui pourrait recommander au gouvernement l’adoption de conditions de travail par le biais d’un rapport, estime Denis Marcoux.

« Les nouveaux paramètres dans lesquels devront s’inscrire les négociations ainsi que le temps laissé aux parties pour convenir des conditions de travail viennent brimer une fois de plus la libre négociation, aspect fondamental du droit d’association », a-t-il déclaré.

Ce qui étonne Denis Beaudin, président du Conseil central des syndicats nationaux de l’Estrie, c’est que le gouvernement libéral ait choisi de briser un système de négociation qui, en réalité, marche plutôt bien dans la région. «Plusieurs rondes de négociation ont été récemment conclues dans les municipalités voisines, a-t-il noté. Voici le genre de relations de travail que le gouvernement du Québec et les municipalités devraient prôner. Au lieu de chercher la confrontation en appauvrissant leurs employé-es et en attaquant leurs droits fondamentaux, il devrait emprunter une autre voie : traiter nos travailleuses et travailleurs avec respect et leur assurer de décentes conditions de travail ! »

Fondée en 1947, la FEESPCSN compte plus de 425 syndicats affiliés représentant environ 60 000 membres œuvrant dans le domaine des services public et parapublic.