Abolition du poste de numéro 2 de Santé Québec : une décision préoccupante

La Fédération de la santé et des services sociaux (FSSS–CSN) s’inquiète de l’abolition du poste de numéro 2 de Santé Québec.

« Voici un autre bel exemple de l’improvisation qui règne à Santé Québec et au ministère de la Santé et des Services sociaux, déplore le président de la FSSS–CSN, Réjean Leclerc. Pendant que le gouvernement tergiverse sur sa structure bureaucratique, sur le terrain, il n’y a aucune amélioration des services. Bien au contraire ! Les coupes ont des conséquences importantes sur l’accès aux soins et la qualité des services. »

La FSSS–CSN juge hautement préoccupant le fait que Geneviève Biron, une entrepreneure du privé, soit maintenant seule à la tête de Santé Québec. « Mme Biron s’est donné les coudées franches pour mener à bien les compressions et vendre en pièces détachées notre réseau public au secteur privé », illustre Réjean Leclerc.

En abolissant son poste de numéro 2, Santé Québec explique vouloir « rapprocher les décisions du terrain et offrir de meilleurs soins et services à la population ». Les raisons avancées sont pourtant en complète contradiction avec les compressions mises de l’avant par Santé Québec.

Depuis des mois, cette dernière s’affaire à couper à travers le réseau pour économiser 1,5 G$ en quelques mois. Le gouvernement de la Coalition avenir Québec justifie cette politique d’austérité par le retour à l’équilibre budgétaire. Le ministre de la Santé, Christian Dubé, omet toutefois de mentionner que le déficit a été largement creusé par le recours aux agences privées dans le réseau public.

« En affaiblissant le secteur public, Santé Québec et le gouvernement Legault accélèrent l’incursion du privé mettant ainsi en péril la qualité, l’accès, l’universalité et la gratuité des soins et des services en santé et services sociaux. Un moratoire sur l’expansion du privé est nécessaire. Le gouvernement doit amorcer immédiatement la déprivatisation, la décentralisation et la démocratisation du réseau », termine Réjean Leclerc.

Élargissement de la laïcité de l’État dans le réseau de l’éducation : Un projet de loi qui va trop loin

Plutôt que de cibler le véritable fléau du prosélytisme et des débordements, le gouvernement de la CAQ et son ministre de l’Éducation, Bernard Drainville, s’en prennent directement aux droits fondamentaux des travailleuses et travailleurs. La Fédération des employées et employés de services publics (FEESP-CSN), représentant la majorité du personnel de soutien scolaire au Québec, condamne avec force le projet de loi présenté ce matin qui, sous le couvert de la laïcité, attaque frontalement la dignité du personnel des écoles primaires et secondaires en élargissant notamment les restrictions vestimentaires qui s’appliquaient déjà au personnel enseignant. Si le projet de loi est placé comme réponse à un réel problème répertorié dans 17 écoles au Québec, son application trop large passe à côté de la cible et aura des répercussions dramatiques pour des milliers de parents dès la rentrée de septembre 2025.

« À la CSN, nous défendons sans réserve la laïcité de l’État et une vision sociale de l’éducation, insiste Caroline Senneville, présidente de la CSN. Pour nous, l’école doit transmettre des connaissances et préparer les enfants à vivre ensemble. Nous aspirons à une école inclusive favorisant intégration, francisation et solidarité dans une société diversifiée. Mais une vie collective ne peut se bâtir sur la fermeture, des restrictions abusives et la négation des droits fondamentaux. Or, Bernard Drainville propose un projet de loi qui impose des limitations injustifiées aux accommodements raisonnables et renforce des contraintes vestimentaires discriminatoires pour le personnel scolaire. »

Il est inadmissible que le gouvernement impose une vision rigide de la laïcité en interdisant le port de signes religieux à tout le personnel. Nous refusons de sacrifier la liberté de religion et d’expression au nom d’une idéologie stigmatisante. « Malgré l’introduction d’une clause de droits acquis, cette mesure impose des restrictions excessives à des milliers de travailleuses et travailleurs qui veulent simplement exercer leur métier auprès des enfants, sans imposer leurs croyances. Il existe des dossiers bien plus urgents en éducation, et la tenue vestimentaire du personnel n’est certainement pas une priorité, » poursuit Caroline Senneville.

Au-delà d’atteindre les droits, cette politique compromet la diversité et l’inclusion dans nos écoles. « En uniformisant l’apparence du personnel, la CAQ envoie un message d’exclusion aux communautés culturelles et aggrave la pénurie de personnel de soutien, notamment dans les grandes villes, » avertit Annie Charland, présidente du Secteur soutien scolaire de la FEESP-CSN.

Quant aux congés religieux, ceux-ci sont reconnus comme accommodements raisonnables et sont une obligation légale, pas une faveur. « La Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse rappelle que ces mesures permettent de concilier travail et convictions sans discrimination. En limitant ces droits, Bernard Drainville trahit la confiance du personnel et sape un environnement de travail inclusif », explique Frédéric Brun, président de la FEESP-CSN.

En s’attaquant aux accommodements raisonnables et aux signes religieux, le gouvernement met des milliers de parents dans l’impasse. De toute évidence, ces mesures nuiront à la rétention du personnel et provoqueront des bris de service. « Même avec une clause grand-père, à Montréal, l’impact sera immédiat : si ce projet de loi va de l’avant, des milliers de parents devront trouver une alternative aux services de garde scolaire pour prendre soin de leurs enfants tôt le matin, pour le dîner et après les classes se terminant vers 15 h 30 », affirme Annie Charland.

La FEESP-CSN défend la laïcité comme principe de neutralité, mais refuse qu’elle serve à justifier des restrictions politiques arbitraires. « Le problème n’est ni la diversité ni le port de symboles religieux, mais bien le prosélytisme, souligne Frédéric Brun. Si le gouvernement était cohérent, il appliquerait les mêmes règles aux symboles et accessoires chrétiens. Plutôt que d’élargir la laïcité sans raison, il devrait faire respecter les lois existantes et agir concrètement pour répondre rapidement aux véritables débordements, comme ceux de l’école Bedford. »

« Par ailleurs, il faut rappeler que les débordements de l’école Bedford ont eu lieu alors que des règles strictes liées à la laïcité étaient déjà en vigueur, souligne Caroline Senneville. L’élargissement de ces mesures n’est donc pas une réponse adéquate pour faire face à ces situations particulières. »

La FEESP-CSN est ferme : le gouvernement doit abandonner cette initiative et, plutôt que de s’en prendre à nouveau à la tenue vestimentaire du personnel ou aux demandes de congé, il doit mettre en place de véritables solutions pour soutenir les travailleuses et travailleurs du réseau scolaire, notamment en abolissant le gel d’effectif imposé depuis la fin 2024 et en offrant de meilleures conditions de travail et des mesures concrètes pour attirer et retenir le personnel essentiel à la réussite éducative des élèves.

 

À propos

La Fédération des employées et employés de services publics représente environ 69 000 membres dans près de 425 syndicats, dont 36 000 travailleuses et travailleurs de soutien dans le réseau scolaire dans 37 syndicats regroupés au sein de notre Secteur soutien scolaire, ce qui fait de la FEESP-CSN l’organisation représentant la vaste majorité du personnel de soutien au Québec.

Les travailleuses en CPE de la CSN votent pour la grève à 91%

Les 13 000 travailleuses et travailleurs des CPE de la CSN ont voté à 91% en faveur d’un mandat de grève pouvant aller jusqu’à la grève générale illimitée pour que le gouvernement en mette plus sur la table afin d’améliorer les conditions dans le réseau. La CSN annonce que la prochaine séquence de grève sera du 2 au 4 avril et qu’une manifestation nationale se tiendra le 3 avril.

Les travailleuses des CPE envoient un message clair au gouvernement

Les travailleuses des CPE étaient rassemblées en assemblée générale le 19 mars pour prendre connaissance de l’état de la négociation et pour voter sur un mandat de grève. Ce vote est nécessaire pour faire avancer la négociation alors que plusieurs demandes de recul restent sur la table et que les mesures proposées par le gouvernement ne sont pas suffisantes pour freiner la pénurie et valoriser les emplois en CPE. Le réseau a actuellement de la difficulté à attirer et à retenir le personnel, alors que le recours aux agences privées augmente.

Le gouvernement doit tout particulièrement en faire davantage sur la question du soutien aux enfants à besoins particuliers, des primes de disparité régionale, de la charge de travail ainsi que des ratios et de la rémunération. L’écart salarial qui persiste avec les emplois comparables dans le secteur public accentue la pénurie qui frappe durement le secteur.

« Les travailleuses en CPE de la CSN ont parlé et leur message est clair : le gouvernement doit en mettre plus sur la table. Si nous continuons de mettre de la pression, c’est qu’il est urgent de bonifier nos conditions pour pouvoir convaincre la relève de choisir de venir œuvrer dans nos CPE. Avec les conditions actuelles, les cohortes sont vides dans les cégeps. Le gouvernement doit bonifier ses offres pour convaincre les travailleuses de continuer de donner des services de qualité aux enfants », explique Stéphanie Vachon, représentante des CPE de la Fédération de la santé et des services sociaux (FSSS–CSN).

En grève du 2 au 4 avril : manifestation nationale des CPE le 3 avril à Québec

Avec le nouveau mandat de grève adopté, la CSN annonce que la prochaine séquence de grève sera de trois jours, soit du 2 au 4 avril. Le 3 avril prochain, les 13 000 travailleuses et travailleurs des CPE de la CSN seront rassemblés à Québec pour une manifestation devant l’Assemblée nationale.

« Le 3 avril, les 13 000 travailleuses en CPE de la CSN se donnent rendez-vous à Québec pour se faire voir et entendre du gouvernement. Celui-ci est très loin de sa promesse aux parents de combler les 30 000 places manquantes au printemps. Pour y arriver, il doit d’abord et avant tout régler la négociation à la satisfaction des travailleuses et des travailleurs de CPE », explique Lucie Longchamp, vice-présidente responsable des secteurs privés de la FSSS–CSN.

« La grève reste le moyen de pression ultime pour se faire entendre quand un employeur ne comprend pas. Les travailleuses des CPE font face à un gouvernement qui laisse traîner la négociation depuis des mois. S’il tient vraiment à assurer les meilleurs services pour les enfants du Québec, il doit écouter les propositions des travailleuses des CPE. Le jupon du gouvernement dépasse : il doit cesser ses attaques antisyndicales, arrêter de vouloir s’en prendre au droit de grève et retirer le projet de loi 89 », de conclure Caroline Senneville, présidente de la CSN.

Une grève partout au Québec

La CSN représente plus de 80 % des travailleuses syndiquées dans les CPE. La grève touche l’ensemble des régions du Québec, alors que la CSN est présente dans plus de 400 CPE. Voici le nombre de centres affiliés à la CSN par région :

  • 7 CPE en Abitibi-Témiscamingue
  • 12 CPE au Bas-Saint-Laurent
  • 10 CPE sur la Côte-Nord
  • 22 CPE dans le Centre-du-Québec et la Mauricie
  • 36 CPE en Estrie
  • 12 CPE en Gaspésie et aux Îles-de-la-Madeleine
  • 11 CPE dans Lanaudière
  • 25 CPE dans les Laurentides
  • 51 CPE en Montérégie
  • 112 CPE à Montréal et à Laval
  • 23 CPE en Outaouais
  • 64 CPE à Québec et dans Chaudière-Appalaches
  • 31 CPE au Saguenay–Lac-Saint-Jean

Revue de presse

À propos

La Fédération de la santé et des services sociaux (FSSS–CSN) constitue l’organisation syndicale la plus importante dans le secteur des centres de la petite enfance (CPE) au Québec. Elle regroupe 80 % des CPE syndiqués, soit près de 13 000 travailleuses et travailleurs.

Fondée en 1921, la CSN est une organisation syndicale qui œuvre pour une société solidaire, démocratique, juste, équitable et durable. À ce titre, elle s’engage dans plusieurs débats qui intéressent la société québécoise. Elle regroupe plus de 330 000 travailleuses et travailleurs réunis sur une base sectorielle ou professionnelle dans 8 fédérations, ainsi que sur une base régionale dans 13 conseils centraux, principalement sur le territoire du Québec.

PL84 – Un projet de loi à réécrire

Lors de sa comparution à la Commission parlementaire des relations avec les citoyens, dans le cadre de l’étude sur le projet de loi no 84, Loi sur l’intégration nationale, la CSN invite le ministre à réécrire son texte afin de le rendre plus consensuel et d’en faire un projet de loi sur le « vivre-ensemble ».

« Un projet de loi sur le “vivre-ensemble” inspirerait toutes les communautés, favoriserait l’ouverture, l’inclusion et la participation à la société. Sans modifications significatives, nous craignons d’assister à des restrictions à l’accès au marché du travail et au financement des organismes de la société civile, aux initiatives artistiques et culturelles, à la recherche et à l’innovation sociale », soutient Katia Lelièvre, vice-présidente de la CSN.

De plus, selon la centrale, l’interculturalisme devrait être défini dans la loi-cadre suivant la définition fournie par Bouchard-Taylor.

Pour un débat public large
La CSN déplore que le projet de loi ne prévoie aucun mécanisme de consultation publique avant l’adoption d’une politique nationale sur le modèle. Il faut permettre à toutes et à tous de participer à ce genre de débat. « La politique nationale proposée devrait faire l’objet d’un débat public large », ajoute Katia Lelièvre.

La CSN croit qu’une consultation plus large permettrait de ressortir avec un fort consensus social qui serait inspirant et mobilisant tant pour les nouvelles et nouveaux arrivants que pour la société d’accueil.

L’importance des chartes
La vice-présidente a exprimé le complet désaccord de la centrale sur l’annonce d’une modification à la Charte des droits et libertés de la personne sans justification convaincante. Étant donné l’importance que revêt cette charte, on ne peut pas improviser des amendements à un document aussi fondateur pour la nation québécoise.

Inclure pour mieux intégrer
La CSN est d’avis que le Québec, en tant que société d’accueil, et ses composantes, y incluant les organisations syndicales, ont l’obligation de tout mettre en œuvre afin de surmonter les divers obstacles à l’intégration sociale, économique, linguistique et culturelle des nouvelles et nouveaux arrivants. Nous devons aussi défendre la qualité et l’égalité des conditions de travail et nous assurer du respect des mêmes droits pour toutes et tous.

La francisation en milieu de travail, la reconnaissance des acquis et des compétences, l’accès à l’emploi, au logement, aux services de garde éducatifs, et à la formation professionnelle comptent parmi les mesures essentielles à la contribution de toutes et de tous à la vitalité culturelle.

« Il ne faudrait pas que les belles paroles du gouvernement et ses exigences envers les nouvelles et nouveaux arrivants cachent un désinvestissement de sa part. Ces derniers mois, il a réduit l’accès aux cours de francisation et coupé les services en employabilité pour les résidentes et résidents temporaires. Nous craignons sérieusement que le fardeau de l’intégration repose uniquement sur les épaules des immigrantes et immigrants sans leur donner tous les outils nécessaires pour y arriver », conclut la vice-présidente.

La CSN demande le retrait du projet de loi 89

Dans le cadre de l’étude en commission parlementaire du projet de loi 89, Loi visant à considérer davantage les besoins de la population en cas de grève ou de lock-out, la CSN, qui comparait aujourd’hui, demande le retrait du projet de loi.

« Le ministre veut se donner des pouvoirs pour affaiblir l’effet qu’une grève peut avoir sur la résolution d’une négociation. La grève, c’est l’outil ultime que détiennent les travailleuses et travailleurs. Si on dilue leur dernier recours, on dilue leur rapport de force pour négocier des améliorations à leurs conditions de travail », a expliqué la présidente de la CSN, Caroline Senneville. « De plus, la grève est un droit constitutionnel enchâssé dans les chartes. Un droit dont la Cour suprême est venue rappeler l’importance dans l’arrêt Saskatchewan en 2015 » a tenu à rappeler la présidente.

Pour la centrale, le projet de loi du ministre ne viendra pas « protéger » la population. Au contraire, elle risque d’en payer le prix. « Plusieurs luttes syndicales ont permis de faire des gains pour la population, comme les congés parentaux, les semaines de 40 heures, etc. En réduisant les droits aux travailleuses et travailleurs à obtenir de meilleures conditions de travail, on brime l’ensemble de la société », a renchéri Caroline Senneville.

 

Un cadeau au patronat

« Le ministre vient donner des cadeaux à ses amis du patronat. La grève a comme objectif de mettre une pression économique sur l’employeur. Si on instaure des services minimums ou si on décrète un arbitrage exécutoire, on rend service aux employeurs. Ils n’auront plus à se forcer, ils n’auront qu’à attendre que le ministre intervienne, ce qui aura pour effet d’enlever de la pression économique », a affirmé François Enault, 1er vice-président de la CSN.

Le mémoire déposé par la CSN rappelle qu’il existe déjà plusieurs outils dans le Code du travail pour protéger la santé ou la sécurité de la population et de faire avancer les négociations en cas de blocage. « Le ministre aurait dû modifier les dispositions de la loi anti-briseurs de grève qui sont mal appliquées et qui étirent les grèves, afin de les mettre à jour pour qu’elles s’appliquent à la réalité des salarié-es en télétravail. Cela aurait réellement permis de raccourcir les conflits », a expliqué le 1er vice-président.

 

Un contexte économique particulier

Pour la CSN, le contexte économique actuel milite en faveur d’une collaboration entre les acteurs du monde du travail. Plutôt que d’aller dans cette direction, le ministre du Travail a choisi de s’attaquer au droit fondamental qu’est la grève. « Ce sont les coupes dans les services publics, le manque d’investissement dans le logement social et le refus du gouvernement de donner des conditions de travail décentes aux éducatrices en CPE, parmi tant d’autres éléments qui menacent le bien-être de la population », ont conclu les porte-paroles de la CSN.

Les organisations syndicales demandent au ministre Jean Boulet de retirer le projet de loi 89

Accompagnés par des centaines de travailleuses et de travailleurs, les dirigeantes et les dirigeants de l’APTS, de la CSD, de la CSN, de la CSQ, de la FAE, de la FIQ, de la FTQ, du SFPQ et du SPGQ ont manifesté ce midi à Montréal pour exiger que le ministre du Travail, Jean Boulet, retire le projet de loi 89.

« Non seulement ce projet de loi vient brimer les travailleuses et les travailleurs dans leur droit de négocier et d’améliorer leurs conditions de travail, mais il vient en prime déstabiliser le fragile, mais important équilibre qui existait depuis l’adoption, en 1977, des dispositions anti-briseurs de grève prévues au Code du travail », ont expliqué les porte-paroles Caroline Senneville (CSN), Denis Bolduc (FTQ), Éric Gingras (CSQ), Luc Vachon (CSD), Mélanie Hubert (FAE), Guillaume Bouvrette (SPGQ), Laurier Ouellet (FIQ), Émilie Charbonneau (APTS) et Christian Daigle (SFPQ).

Pour les organisations syndicales, ce projet de loi, arrivé de nulle part, est totalement injustifié. « Faut-il rappeler que plus de 95 % des négociations se règlent sans grève ni lock-out ? Les patrons n’auront pour ainsi dire plus d’intérêt à négocier de bonne foi avec les syndicats s’ils savent qu’en bout de piste, un arbitrage sera imposé », déplorent les porte-paroles.

Dans le contexte politico-économique houleux et imprévisible qui sévit, les élans anti-travailleurs du ministre vont dans le sens contraire de la cohésion et de la solidarité sociale pourtant réclamées par le premier ministre Legault lui-même. M. Boulet, qui se présente comme partisan du dialogue entre les parties, prend plutôt la voie de la confrontation et de la judiciarisation des conflits. « Pourquoi ? Pour faire plaisir au patronat ? La question mérite d’être posée, car si le PL 89 sert un groupe en particulier, c’est bien celui des patrons. Et étrangement, avouons-le, ce projet survient au moment où le contexte de pénurie de main-d’œuvre et d’inflation milite en faveur d’une amélioration notoire des conditions des travailleuses et des travailleurs », soulèvent les porte-paroles.

Les neuf organisations syndicales prévoient se mettre en action afin de signifier leur profond mécontentement face aux intentions du gouvernement. Elles entendent aussi profiter de leur participation à la commission parlementaire portant sur le projet de loi pour porter leur message.

Projet de loi 89: une manœuvre explosive

Cette lettre est cosignée par les quatre centrales syndicales ainsi que cinq organisations syndicales*

Si le projet de loi 89 du ministre du Travail, Jean Boulet, a été reçu comme une bombe dans le milieu syndical, c’est que son contenu et les motifs qui le sous-tendent sont explosifs. Non seulement son projet de loi vient brimer les travailleuses et les travailleurs dans leur droit de négocier et d’améliorer leurs conditions de travail, mais il vient en prime déstabiliser le fragile, mais important équilibre qui existait depuis l’adoption, en 1977, des dispositions anti-briseurs de grève prévues au Code du travail. Un héritage important de René Lévesque et du Parti québécois de l’époque.

Rappelons tout d’abord les faits. Évoquant l’importance « d’éviter que ne soit affectée de manière disproportionnée la sécurité sociale, économique ou environnementale de la population, notamment celle des personnes en situation de vulnérabilité », le ministre impose maintenant des services essentiels dans pratiquement tous les secteurs. De plus, il s’arroge le pouvoir de mettre fin aux conflits de travail. Rien de moins qu’une loi spéciale tous azimuts.

Arrivée de nulle part, la manœuvre de Jean Boulet, ancien avocat patronal maintenant ministre du Travail, ne passe absolument pas. Faut-il rappeler qu’il dispose actuellement de tous les leviers pour forcer les parties à régler les conflits et à y mettre fin ?

De surcroît, plus de 95 % des négociations se règlent sans grève ou lock-out et rares sont les conflits qui se prolongent. Et ça, le ministre le sait mieux que quiconque.

Il sait aussi que les patrons n’auront pour ainsi dire plus d’intérêt à négocier de bonne foi avec les syndicats, s’ils savent qu’en bout de piste, un arbitrage sera imposé.

Pas de gaieté de cœur

Quant aux personnes en situation de vulnérabilité, l’argument ne tient pas la route. Les travailleuses et les travailleurs, faut-il le rappeler, sont partie prenante de la société et comptent parmi leurs rangs des personnes vulnérables. Mettre ces deux groupes en opposition constitue un faux débat. Les travailleurs sont les premiers à avoir à cœur le bien-être des personnes qui utilisent leurs services, et c’est entre autres pour améliorer ces mêmes services qu’ils choisissent de se battre.

Si les travailleurs prennent en toute connaissance de cause la décision de faire la grève – et de se plonger dans l’incertitude financière –, ce n’est pas de gaieté de cœur. Rappelons d’ailleurs que les grèves ont permis, au fil du temps, des avancées sociétales majeures, tels les congés de maternité payés.

Finalement, le contexte politico-économique houleux et imprévisible aurait dû, lui aussi, freiner le ministre dans ses élans antitravailleurs et appeler à la plus grande cohésion et à la plus grande solidarité sociales.

Or, Jean Boulet fait précisément le contraire en venant brimer le droit des syndiquées et syndiqués de recourir à la grève, l’ultime recours qui subsiste pour exercer leur rapport de force.

Pourquoi, alors, aller de l’avant avec ce projet de loi ? Prétendant avoir à cœur le dialogue social, le ministre prend plutôt la voie de la confrontation et de la judiciarisation des conflits.

Pourquoi fragiliser cet équilibre, alors que le droit de grève est protégé par la Constitution canadienne ? Pour faire plaisir au patronat ? La question mérite d’être posée, car si le PL 89 sert un groupe en particulier, c’est bien celui des patrons, comme l’ont déjà noté plusieurs observateurs et éditorialistes. Et étrangement, avouons-le, ce projet survient au moment où, pour une rare fois, le contexte de pénurie de main-d’œuvre et d’inflation militait particulièrement en faveur de l’amélioration des conditions des travailleurs.

En provoquant ce déséquilibre, le ministre du Travail démontre également la nécessité, pour les organisations syndicales, d’unir leurs forces devant les défis qui attendent leurs membres pour les prochaines années, ce qu’elles feront entre autres en lançant les états généraux du syndicalisme, dès le 31 mars.

Si Jean Boulet et François Legault n’avaient pas totalement évalué la portée de ce geste, ils doivent le faire rapidement et retirer le projet de loi 89. Sinon, ils risquent de se brûler les doigts à force de jouer avec le feu.

Déclarations de guerre

En ce début d’année pour le moins mouvementé, nous avons eu droit non pas à une, mais bien à deux déclarations de guerre. La première, en provenance du sud de la frontière, est d’ordre tarifaire ; la seconde, qui touche au droit de grève, provient du gouvernement Legault par l’entremise de son ministre du Travail, Jean Boulet.

Bien sûr elles n’ont pas la même portée, mais toutes deux entraîneront, à des degrés différents, de lourdes conséquences sur les travailleuses et les travailleurs. Mais j’ajouterais, pour nous donner un peu d’espoir : si tant est qu’elles se concrétisent !

Car dans le premier cas, avec les volte-face quasi quotidiennes du président américain à propos de l’entrée en vigueur et la portée exacte de ces fameux tarifs douaniers à l’endroit des produits canadiens, on nage toujours dans l’incertitude la plus complète. À preuve, au moment d’écrire ces lignes, pour la deuxième fois en deux jours, le président Trump a reculé une fois de plus en annonçant un nouveau sursis de 30 jours pour les marchandises canadiennes. Si sa crédibilité va continuer d’en prendre pour son rhume à force de jouer au yoyo avec ses partenaires et alliés économiques traditionnels, la menace qu’il fait peser sur notre économie et sur le sort des personnes qui la font rouler doit être, elle, prise très au sérieux.

Et comme si ces provocations ne suffisaient pas, Amazon a pris la décision sauvage et antisyndicale de fermer ses sept entrepôts au Québec, causant ainsi la perte de plus de 4700 emplois.

En effet, plusieurs secteurs sont à risque au Québec, notamment les industries manufacturière, forestière et agroalimentaire, dont la production dépend essentiellement des exportations vers les États-Unis. La CSN a multiplié les interpellations et les rencontres auprès des différents paliers de gouvernement afin de s’assurer que des mesures seront prêtes pour soutenir les travailleuses et les travailleurs touchés, si des barrières tarifaires devaient officiellement entrer en vigueur.

D’ici là, tâchons de garder la tête froide malgré ce tumulte étourdissant qui prend des airs de plus en plus inquiétants.

Bombe antisyndicale

De ce côté-ci de la frontière, il sera aussi difficile de rester zen face à l’affront étonnant de Jean Boulet, qui vient de déposer un projet de loi pour « considérer davantage les besoins de la population en cas de grève ou de lock-out ».
Sous les prétentions fumeuses du ministre qui dit vouloir protéger les plus vulnérables en cas de conflit de travail se cache une attaque en règle au droit de grève et, par le fait même, au rapport de force dont disposaient jusqu’ici les travailleuses et les travailleurs du Québec.

Cet affront est d’autant plus surprenant que le premier ministre Legault lui-même estime que l’heure devrait être à l’unité des forces vives du Québec pour faire face à cette période de grande instabilité, et non à la confrontation.
Mais encore une fois, gardons espoir : il ne s’agit encore que d’un projet de loi qui doit franchir de nombreuses étapes, dont les consultations en commission parlementaire auxquelles nous participerons, avant d’être adopté… s’il finit par l’être !

Délivrons-nous d’Amazon

Et comme si ces provocations ne suffisaient pas en ce début d’année pour le moins explosif, la multinationale Amazon a pris tout le monde de court en janvier avec sa décision sauvage et antisyndicale de fermer ses sept entrepôts au Québec, causant ainsi la perte de plus de 4700 emplois. Dans la foulée, la CSN a lancé un mouvement de boycottage pour nous affranchir collectivement de cette entreprise voyou, tout en appelant du même souffle à favoriser le commerce local et nos entreprises québécoises.

Des recours juridiques d’envergure ont de plus été déposés pour exiger d’Amazon le respect de ses obligations comme employeur et celui des lois qu’elle a jusqu’ici si éhontément bafouées.

Notre combativité sera une fois de plus mise à l’épreuve dans les mois à venir, mais vu la force et la solidarité inébranlables de notre mouvement, nous réussirons à traverser cette tempête en nous serrant les coudes et en gardant, toujours, la tête haute.

Tarifs américains: notre économie en état d’alerte

Trump a d’abord annoncé vouloir imposer des tarifs de 25 % sur les importations canadiennes pour tous les produits, à l’exception des produits énergétiques et des minéraux critiques qui seraient taxés à 10 % ; il a ensuite repoussé la mise en application de ces tarifs au 4 mars, puis au 4 avril. Il a aussi annoncé l’entrée en vigueur de tarifs spéciaux pour l’acier et l’aluminium le 12 mars. C’est en utilisant cette stratégie de la peur et du chaos que Trump souhaite obtenir des gains économiques, affichant son mépris tant pour les accords internationaux que pour la souveraineté de pays comme le Canada, qui « pourrait devenir le 51e état américain ». Rien de moins !

Trump ne cache pas ses intentions. « Les tarifs annoncés samedi (le 1er février) seront sur pause pour 30 jours, le temps de voir si un accord économique avec le Canada peut être structuré. ÉQUITÉ POUR TOUS ! », a-t-il écrit sur son réseau Truth Social.

Au moment de mettre sous presse, on ne sait toujours pas si la menace sera mise à exécution, et si oui, pour combien de temps pourrait durer ce conflit commercial.

On voit bien que le trafic de fentanyl ou la présence de migrants illégaux n’était qu’un prétexte pour le président américain. Cela lui permettait d’invoquer l’urgence nationale qui était l’un des seuls moyens de contourner l’Accord Canada–États-Unis–Mexique (ACEUM) par un simple décret. C’est pourtant Trump lui-même qui avait négocié cet accord en 2019 en utilisant comme moyen de pression des tarifs ciblés sur l’acier et l’aluminium.

Cette résurgence des menaces fait réfléchir. Nos élu-es de Québec et d’Ottawa évoquent la nécessité de diversifier nos marchés d’exportation pour moins dépendre des États-Unis. On l’a compris pendant la pandémie : il est risqué de ne compter que sur de lointains fournisseurs pour les biens essentiels. Cette fois sera-t-elle la bonne pour une réelle diversification de notre économie ? Serait-on enfin devant un véritable signal de changement ?

De quels accords commerciaux avons-nous besoin ?

Que valent des accords commerciaux si les plus puissants se permettent de les bafouer comme le fait à répétition Donald Trump depuis son arrivée en poste ? Devrait-on s’obliger à toujours plus de concessions pour satisfaire le président américain, sachant qu’il n’honorera pas sa partie de l’entente ? Le commerce international est-il devenu un contrat de dupes ? Les États-Unis ont rendu inopérant le tribunal de l’OMC en refusant d’y nommer de nouveaux juges. La plainte de la Chine contre les tarifs de 10 % imposés par les États-Unis n’aura probablement pas d’issue. Même un gain en première instance ne suffira pas à inverser quoi que ce soit, puisque la décision sera portée en appel et que le processus sera très long.

Il importe cependant de rappeler que, depuis des décennies, ces accords commerciaux servent en partie les intérêts des multinationales. Nos gouvernements devraient plutôt protéger la gestion de l’offre en agriculture et nos secteurs stratégiques comme le bois.

Un réveil s’amorce. La solidarité entre les travailleuses et les travailleurs de tous horizons s’est exprimée après la fermeture sauvage des entrepôts d’Amazon au Québec. Dans l’acier, la Fédération de l’industrie manufacturière (FIM–CSN) échange avec des syndicats américains ou européens via le réseau syndical international IndustriAll. La menace de Trump se tournera bientôt vers l’Union européenne et l’acier est une cible probable. Là aussi, toutefois, il a déjà annoncé ses couleurs.

Redéfinir notre économie

Le premier ministre Legault a appelé les Québécoises et les Québécois à profiter de la crise actuelle pour « redéfinir notre économie ». Il faudrait aussi revoir nos accords commerciaux pour qu’ils nous protègent contre d’autres éventuelles menaces et agressions économiques. Devraient-ils permettre la délocalisation des mauvaises conditions de travail et de la pollution qui accompagne certains procédés industriels ou agricoles ? Ne devrait-on pas revoir notre approche du commerce mondial ? Et aussi prévoir des protections adéquates pour les travailleuses et les travailleurs qui risquent d’être mis à pied ?

Face à des menaces croissantes, nous devrons reprendre collectivement en main les leviers nécessaires pour assurer une plus grande équité dans le monde.

Les angles morts de la paresse

Loin de faire l’apologie du self-care individuel, le recueil de textes féministes Libérer la paresse exprime et dénonce la difficulté à ralentir et à réévaluer notre rapport souvent drainant au travail, à la parentalité, au corps et surtout, à la performance. Pour les autrices, l’épuisement est genré. Si le monde continue de rouler malgré les différentes vagues d’austérité, c’est grâce au travail invisible des femmes.

Le repos dont les coautrices ont besoin semble particulièrement difficile à atteindre pour celles qui cumulent les rôles, à l’heure du girlbossing libéral. Ces travailleuses, mères, conjointes et élues n’en peuvent plus du tabou qui accompagne la paresse.

Elles critiquent la pression sociale qui pousse à l’optimisation de toutes les sphères de leur vie pour toujours être au sommet de leur carrière et de leur désirabilité.

En réaction à leur épuisement, plusieurs plumes du collectif choisissent ainsi le travail autonome dans la tentative de reprendre le contrôle de leur quotidien. On devine que ces artistes, professeures et intellectuelles ont les moyens de faire les sacrifices économiques pour obtenir davantage de liberté et de souplesse dans leur horaire.

Si le livre amorce une réflexion intéressante, il occulte les travailleuses d’une autre classe sociale, celles qui, plutôt que de vendre le fruit de leurs réflexions, épuisent leur corps en faisant du ménage et en prenant soin des autres. Certains textes soulignent brièvement l’apport des éducatrices et des préposées qui peuvent rendre la vie plus facile… mais on aurait pu les entendre directement au lieu de les voir relayées à un rôle de figuration. Naturellement, ces femmes manquent de temps pour écrire…

Libérer la paresse pose des questions essentielles sur notre rapport collectif à la fatigue et au repos, mais donne peu de réponses. Pourtant, comme le simple fait de refuser de s’épuiser semble aujourd’hui subversif, l’exercice de réflexion ici proposé demeure pertinent. Interroger l’état d’urgence qui règne dans plusieurs aspects de nos vies est un premier pas qui mène à reconsidérer notre système économique. Après tout, la productivité est au cœur du mirage capitaliste.

Pour consulter : librairie@csn.qc.ca

CBC/Radio-Canada, un service public menacé ?

Les deux entités sont intimement liées et il est illusoire de penser que d’en achever une n’achèvera pas l’autre, quoi qu’en disent les conservateurs. Sur tout le territoire canadien, l’information locale survit, à peine. Le Québec n’est pas une société distincte sur cette question. Les médias québécois et canadiens connaissent une importante baisse de leurs revenus publicitaires en raison de l’accaparement de ces derniers par les géants du Web, tels que Google et Meta. Depuis quelques années, les fermetures de journaux se comptent par dizaines, les stations de radio et de télévision réduisent partout leurs effectifs et, par conséquent, leur couverture. Dans ce contexte, sabrer dans le financement de CBC/Radio-Canada aurait comme conséquence de confier entièrement aux salles de nouvelles du privé la couverture de tout le territoire.

« On ne peut pas laisser faire cela. C’est non seulement irréaliste, mais aussi dangereux. Les déserts informationnels prennent de plus en plus de place partout au pays, Radio-Canada et CBC sont parmi les seuls qui peuvent en stopper l’avancement », observe Pierre Tousignant, président du Syndicat des travailleuses et travailleurs de Radio-Canada–CSN, en rappelant du même souffle que CBC/Radio-Canada diffuse aussi en huit langues autochtones. « Cette particularité lui est propre. Réduire cet accès à de l’information et à du contenu culturel serait tragique pour plusieurs communautés. »

Dans l’équipe des cancres

Une étude de Nordicity réalisée en 2024 nous révélait qu’en 2022, le Canada affichait l’un des plus bas niveaux de financement de la radiodiffusion publique par habitant (32,43 $) parmi les 20 pays occidentaux recensés. Cette étude établit aussi que le Canada fait partie des cancres : il semble que les deux paliers de gouvernement, fédéral comme provincial, n’accordent qu’une priorité faible à la radiodiffusion publique, puisque le financement de cette dernière représente 0,12 % des dépenses publiques totales, ce qui place le Canada au 18e rang sur 20 pays.

CBC et Radio-Canada ont un mandat d’information. Mais, on l’oublie trop souvent, elles ont aussi le mandat d’assurer le rayonnement des initiatives culturelles canadiennes. Menacer la survie du diffuseur public met en danger beaucoup d’actrices et d’acteurs du secteur de l’information, certes, mais aussi une panoplie d’artisans ainsi que des travailleuses et des travailleurs du milieu culturel de partout au pays.

Sommes-nous prêts, comme société, à abandonner la représentation de notre réalité et de notre identité culturelle, celle du Québec comme celle du Canada, aux humeurs des intérêts économiques du secteur privé ou à ceux des multinationales tels Netflix et Disney ? « C’est le danger qui nous guette et nous devons l’avoir en tête quand nous soupesons la valeur de CBC/Radio-Canada. À l’heure où le président américain parle de faire du Canada le 51e État américain, sommes-nous disposés à effacer la spécificité de la culture canadienne et québécoise dans l’espace numérique déjà largement dominé par les productions américaines ? Est-ce la valeur que nous nous accordons ? », se demande Annick Charette, présidente de la Fédération nationale de la culture et des communications–CSN, à laquelle est affilié le syndicat de Radio-Canada.

Mme Charette et M. Tousignant sont persuadés de la nécessité pour le Canada et le Québec d’avoir accès à un média public fort et donc, financé adéquatement. La mission de CBC/Radio-Canada est de garantir l’accès à de l’information de qualité sur l’ensemble de son territoire, jusque dans les foyers québécois et canadiens les plus isolés, et de faire rayonner la culture, autant québécoise que canadienne. Aucun autre diffuseur ne peut remplir ce mandat. Aucun réseau social n’a cette mission. Plus que jamais, CBC/Radio-Canada doit être considéré comme un service public.

Se battre pour les personnes marginalisées

Les travailleuses et les travailleurs du Centre l’Entre-Toit sont en grève générale illimitée depuis le 1er novembre. Les grèves ne sont pas si fréquentes dans le secteur communautaire. Qu’est-ce qui a mené ces 75 salarié-es à utiliser cet ultime moyen pour se faire respecter ?

Depuis quatre ans, Rosalie Bezeau-Faucher travaille pour l’Entre-Toit comme adjointe à la coordination. Elle a, entre autres mandats, celui de veiller à la réinsertion sociale des usagères et des usagers du centre de transition. L’Entre-Toit héberge des personnes aux prises avec des troubles de santé mentale, doublés à de la toxicomanie ou encore à des démêlés avec la justice.

Rosalie les accompagne au quotidien pour les mener vers une plus grande autonomie. « On fait tout notre possible pour soutenir les résidentes et les résidents de l’Entre-Toit. On les aide à prendre leurs médicaments, à se trouver un emploi ou bien un logement. Certaines personnes reviennent nous voir après quelques années pour nous remercier de les avoir épaulées. Elles sont fières d’être autonomes. Je sens qu’on fait une différence dans leur vie », explique-t-elle.

Si Rosalie a choisi de travailler à l’Entre-Toit, c’est pour prêter assistance aux gens les plus marginalisés de notre société. Si elle reste, c’est pour continuer de tisser des liens au jour le jour avec eux. Elle reste aussi pour l’esprit d’équipe qui se forme dans ce milieu de travail enrichissant, mais exigeant.

Dans les conditions actuelles, c’est difficile. Les salaires sont loin derrière ceux du secteur public et du milieu communautaire. L’Entre-Toit compte sur des salarié-es qualifiés et diplômés, mais non reconnus. Résultat, le taux de roulement frôle les 100 % chaque année. « Nous gagnons moins de 20 $ l’heure. Pour s’assurer de garder les gens plus longtemps et de continuer d’assurer la mission de l’organisme, il faut bonifier nos conditions et augmenter nos salaires », conclut Rosalie.

Amazon : l’affront ultime

Le 22 janvier dernier, la multinationale annonçait son intention de fermer ses sept entrepôts et de céder toutes ses opérations à la sous-traitance.

Amazon ferme-t-elle boutique ? Pas vraiment : elle continuera à vendre ses marchandises en ligne au Québec, mais l’entreposage et la livraison des commandes seront dorénavant assumés par des tiers.

Les 4700 mises à pied, elles, sont bien réelles : 1900 personnes travaillant dans les sept entrepôts perdent leur emploi, dont les 230 travailleurs de DXT4, à Laval, premier syndicat accrédité au Canada en mai dernier. Environ 2800 personnes ont également été mises à pied par les nombreux sous-traitants de livraison d’Amazon.

La multinationale s’est rapidement défendue de toute forme d’antisyndicalisme. Pourtant, dans toute l’Amérique du Nord, seul le Québec aura droit à ce nouveau modèle d’affaires. Et ce, même si la multinationale y est fortement implantée depuis 2020, s’étant même outrageusement hissée en tête des ventes en ligne lors de la pandémie.

Pour la CSN, ça ne fait aucun doute : cette décision brutale, ayant causé jusqu’à maintenant 4700 pertes d’emplois, ne vise qu’à empêcher à tout prix la conclusion d’une première convention collective en Amérique du Nord et à freiner toute tentative de syndicalisation.

Un tel geste est illégal au Québec, puisque la loi interdit à un employeur de s’ingérer dans les activités d’une association de travail ou d’y porter entrave.

Le geste ne restera pas impuni, prévient la CSN. Le 4 février dernier, la centrale lançait une campagne nationale de boycottage d’Amazon en enjoignant la population, les gouvernements de Québec et d’Ottawa, les villes et les institutions publiques à cesser d’acheter sur Amazon et à mettre fin à toute forme de contrat avec la multinationale, particulièrement dans le secteur de l’infonuagique.

La CSN annonçait du même souffle qu’en raison de l’illégalité de cette décision antisyndicale, elle allait demander au tribunal l’annulation des licenciements collectifs, la réouverture des sept entrepôts et la réintégration des 1900 employé-es directs d’Amazon.

Faire peur au monde

La plainte, déposée au TAT le 20 février dernier, fait valoir que la décision de fermer ses entrepôts québécois est en contradiction directe avec le plan d’affaires mis de l’avant par la multinationale au cours des dernières années. Les quatre centres de livraison les plus récents au Québec, dont l’entrepôt syndiqué DXT4 à Laval, n’ont été établis que depuis trois ans, rappelle la CSN, à l’image des investissements massifs de la compagnie dans la stratégie du « dernier mille ».

Ces entrepôts de proximité, nécessaires à la livraison en un jour, « ne constituent pas seulement la façon la plus rapide de livrer les produits aux consommateurs, mais aussi la manière la plus économique de le faire », déclarait en octobre dernier le PDG d’Amazon, Andrew Jassy, après avoir annoncé un an plus tôt son intention de doubler le nombre de stations capables de livrer les colis le jour même.

« Rien ne laissait présager qu’Amazon choisirait, à peine trois mois plus tard, d’opérer un retour à un modèle de livraison par des tiers », affirme la CSN dans sa requête. Pour la centrale syndicale, « Amazon n’hésite pas à avoir recours à des mesures extrêmes et à sacrifier sa rentabilité afin d’éviter l’imposition d’une première convention collective » : c’est là le véritable objectif d’une décision aussi draconienne.

Une première convention à portée de main

Même si la négociation n’allait nulle part à l’entrepôt syndiqué de Laval, une première convention collective était pourtant à portée de main. Constatant l’impasse, le conciliateur du ministère du Travail, qui suivait les travaux de la table depuis le mois d’août, s’apprêtait à rendre son rapport au ministre et à ainsi ouvrir la voie à une demande d’arbitrage de première convention.

Les négociateurs d’Amazon en étaient bien conscients : tellement, qu’ils avaient accepté l’invitation des négociateurs syndicaux de « nettoyer » le plus possible les travaux et de s’entendre sur les éléments périphériques afin de restreindre au mieux le champ d’application de l’éventuelle décision de l’arbitre.

Ainsi, selon toute vraisemblance, une convention collective allait être décrétée aussi rapidement qu’à l’été 2025.

N’en déplaise à Amazon, cet arbitrage ira de l’avant. Au moment d’écrire ces lignes, la sous-ministre du Travail venait tout juste de déférer le différend à l’arbitrage de première convention. Même si l’entrepôt de Laval devait demeurer fermé en dépit des recours juridiques intentés, des questions devront être tranchées, notamment en ce qui a trait aux augmentations salariales, à la rétroactivité ainsi qu’au droit de rappel des salarié-es.

Quand le gouvernement bloque un important règlement

Le 19 septembre 2024, le conseil d’administration de la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST) a adopté à l’unanimité la version finale du Règlement sur les mécanismes de prévention et de participation en établissement. Or, depuis près de six mois, contre toute logique vu le consensus obtenu, le conseil des ministres n’a toujours pas entériné ce règlement.

Le gouvernement de la CAQ a fait adopter une importante réforme en santé et sécurité du travail en 2021. Celle-ci prévoyait un délai ferme se terminant le 6 octobre 2024 afin que la CNESST adopte un règlement sur les mécanismes de prévention et de participation pour mieux protéger les travailleuses et les travailleurs et améliorer le bilan des lésions qui est loin de s’améliorer.

Également au cœur des travaux, des changements à la gouvernance de la CNESST visant à répondre aux critiques soulevées à plusieurs reprises par le Vérificateur général du Québec. Selon lui, la CNESST ne joue pas son rôle d’agent de changement dans l’actualisation du régime de santé, ce qui impose un retard en matière de prévention des risques et des dangers dans les milieux de travail au Québec.

Là où ça bloque

« Même si la CNESST s’est engagée dans de vastes travaux afin d’améliorer la santé et la sécurité du travail de façon concrète, le ministère de l’Éducation et celui de la Santé et des Services sociaux, notamment, refusent d’assumer les impacts financiers du règlement pourtant intervenu unanimement entre les acteurs représentatifs du domaine du travail nommés par le gouvernement », dénonce Caroline Senneville, présidente de la CSN et membre du CA de la CNESST.

« La situation est totalement absurde : le gouvernement nous a imposé un processus qu’il décide à présent de ne plus respecter. La protection des travailleuses et des travailleurs a déjà assez attendu. Nous allons nous battre pour qu’il entérine ce règlement dans les plus brefs délais », conclut David Bergeron-Cyr, vice-président de la CSN, responsable politique de la SST et également membre du CA de la CNESST.

CPE: négocier pour remettre le réseau sur pied

Les travailleuses des CPE accentuent la mobilisation pour faire avancer leur négociation avec le gouvernement. Dans le contexte où le réseau des CPE a de plus en plus de mal à attirer et à retenir le personnel, les travailleuses proposent des solutions pour améliorer la situation. Incursion dans le quotidien de ces femmes qui, chaque jour, changent concrètement la vie de milliers d’enfants

Une profession en manque de valorisation

Chaque matin, des milliers de parents se déplacent vers les CPE. Il suffit de passer un peu de temps dans un centre pour réaliser à quel point c’est un travail inspirant, mais exigeant. Les travailleuses et les éducatrices, en passant par les responsables de l’alimentation et le personnel des bureaux, veillent du mieux qu’elles peuvent au développement des enfants. Elles le font à travers les cris incessants, les pleurs et l’agitation des petits. Mais aussi à travers l’amour débordant des enfants à leur égard.

« Quand on décide de travailler en CPE, on fait le choix d’une profession marquante pour nos tout-petits. Mais rapidement, on réalise que les conditions dans lesquelles on doit effectuer notre travail sont loin d’être optimales. C’est pour ça que si peu de personnes font le choix de s’inscrire en technique d’éducation à l’enfance. Ça nous préoccupe beaucoup. On espère que notre négociation entraînera des modifications qui convaincront la relève de rejoindre le réseau », explique Stéphanie Vachon, représentante des CPE de la Fédération de la santé et des services sociaux (FSSS–CSN).

Les travailleuses des CPE syndiquées à la CSN ont tenu trois jours de grève nationale à travers le Québec entre la fin janvier et le début mars. Elles seront également en grève les 18 et 19 mars prochains pour protester contre le peu d’égards du gouvernement envers leur métier.

Le gouvernement se traîne les pieds

La négociation des CPE avance lentement. Le gouvernement propose des reculs. Il réclame davantage d’heures de travail, alors que les éducatrices sont déjà à bout de souffle. Ces dernières ont donc pris la décision de lancer un mouvement de grève national. La CSN, qui représente 80 % des CPE syndiqués, a une force de frappe impressionnante dans le secteur. Depuis la fin janvier, des journées de grève nationale ont lieu dans toutes les régions du Québec. Les quelque 13  000 travailleuses se mobilisent pour freiner la pénurie de personnel et valoriser leurs emplois. Grâce à la mobilisation, ça bouge enfin à la table de négociation.

Les travailleuses ne sont pas seules. Des milliers de parents témoignent de leur appui aux demandes du personnel. Récemment, plus de 300 conseils d’administration de CPE ont transmis une lettre au gouvernement pour appuyer les éducatrices.

« Le réseau des CPE, on y tient vraiment. Et on sait que les parents aussi. Ils sont à même de voir à quel point nous jouons un rôle important pour leurs tout-petits. Quand ils quittent le CPE le matin, ils savent que leur enfant est entre de bonnes mains. Et quand leur enfant raconte toutes ses activités de la journée, ils réalisent que les CPE jouent un rôle clé dans le développement des tout-petits », poursuit Stéphanie Vachon.

Des places qui se font attendre

Le gouvernement Legault fait face à des critiques répétées de la part de milliers de familles qui attendent impatiemment une place dans un CPE. Tout près de 30 000 enfants patientent pour une place dans le réseau. La stratégie de négociation du gouvernement freine l’ouverture des places nécessaires. En effet, pour réussir à combler les besoins, il faut d’abord et avant tout s’assurer d’avoir des travailleuses et des travailleurs qui donneront les services aux enfants.

« Si, collectivement, on veut offrir le meilleur à nos enfants, toutes les études montrent qu’il faut pouvoir compter sur le réseau des services de garde éducatifs. Le gouvernement doit cesser de miser sur le privé et doit mettre ses énergies là où les meilleurs services sont donnés. C’est pourquoi il est d’autant plus important d’améliorer les conditions de travail et les salaires des travailleuses des CPE », conclut Lucie Longchamp, vice-présidente de la FSSS–CSN.

Pour un enseignement en ligne plus humain

« C’était particulier, puisque nous avions obtenu une réouverture de la convention sur cet enjeu seulement, avec droit de grève », rappelle d’abord le président. C’est d’ailleurs une enseignante du cours Introduction à la convention collective, Marielle Lacombe, qui a eu cette idée de séparer cet enjeu du reste de la négociation en conservant toutefois le droit de grève après un certain délai. Cette voie de passage a permis d’éviter la grève de justesse en 2022.

Des cours en présence

Selon les chiffres du syndicat, de 25 % à 28 % des cours à l’UQAM se donnent présentement en ligne. « On voulait préserver la majorité des cours en présentiel », explique Olivier Aubry.
L’UQAM a refusé de limiter le pourcentage de cours en ligne, même si le recteur s’est prononcé en faveur du présentiel. Le syndicat avait tout de même réussi à obtenir de la commission des études des balises pour les cours en présence avant le 30 septembre.

« On demandait des groupes à échelle humaine, pas des classes de 400. On ne voulait pas plus de monde en ligne qu’en présence », lance le président. La notion de « moyenne cible » de tous les cours à 41 étudiantes et étudiants maximum a tout de même été établie. C’est un « gain historique » qui avait toujours été refusé jusqu’à maintenant.

Selon certaines études, enseigner en ligne demande environ 30 % plus de temps qu’en présence. L’UQAM refusait de le reconnaître au départ. Finalement, une allocation de 850 $ par cours enseigné pour la première fois en ligne et de 400 $ pour les cours en mode hybride a été consentie sous forme de compensation pour le matériel. Le syndicat a aussi obtenu des balises pour l’utilisation des cours enregistrés et donnés de façon asynchrone.

Prochain défi : l’intelligence artificielle

« La taille des groupes et la compensation de la surcharge sont des gains majeurs. On va continuer à sécuriser des éléments pour l’enseignement en ligne, mais le prochain gros dossier à venir, c’est l’intelligence artificielle », conclut Olivier Aubry.

La négociation du SPPEUQAM-CSN a pris fin le 11 février par un vote à 85 % en faveur de l’entente de principe. La grève annoncée le 3 février a été évitée de justesse en permettant néanmoins d’obtenir ces gains.

Cet écran de fumée gouvernemental

Le gouvernement caquiste n’a qu’un mot en tête lorsqu’il négocie avec des salarié-es en santé : flexibilité. Les syndicats de la CSN doivent trouver le moyen de composer avec cette demande répétée tout en obtenant des gains pour leurs membres.

La flexibilité en santé peut impliquer, pour un employeur, l’affectation d’une ou d’un salarié-e à un poste ailleurs dans l’établissement ou sur un autre site de travail au sein d’un même territoire régional. Lors de la négociation du secteur public de 2023, la présidente du Conseil du trésor, Sonia LeBel, revendiquait plus de flexibilité dans les conventions collectives. Toutes les négociations avec le gouvernement suivent depuis la même recette.

Le même vieux film

À présent, « flexibilité » est le terme pour exprimer un penchant patronal : le problème, c’est la lourdeur des conventions collectives. « Quand on voit l’ampleur de la crise qui frappe nos services publics, de l’austérité en passant par la surcharge de travail, ça prend une vision biaisée pour penser que le problème, c’est la lourdeur des conventions. Pour bien des travailleuses et des travailleurs qui font toujours plus avec moins, cette demande de flexibilité est bien mal reçue », explique de François Enault, premier vice-président de la CSN.

Il suffit d’analyser la façon dont cette flexibilité s’est matérialisée dans les contrats de travail pour constater à quel point le gouvernement vise surtout à s’en prendre aux syndicats à travers un exercice de relations publiques.

Les conventions collectives du réseau

Les nouvelles conventions collectives de la Fédération de la santé et des services sociaux (FSSS–CSN) et de la Fédération des professionnèles (FP–CSN) ont permis de baliser les préoccupations gouvernementales tout en encadrant les rôles et les responsabilités des gestionnaires.

« Durant les négociations, le gouver­nement revendiquait l’ancienneté pour l’ensemble du réseau et la bonification des quarts défavorables. On a trouvé des terrains d’entente tout en rappelant qu’il faudrait en faire davantage pour que l’état du réseau s’améliore. Les nouvelles conventions nous positionnent mieux qu’avant, mais le gouvernement doit en faire plus ! », insiste le président de la FSSS–CSN, Réjean Leclerc.

C’est primordial, alors que l’on constate le mal causé par le retour de l’austérité. La solution pour un réseau plus efficace, ce n’est pas davantage de flexibilité pour les gestionnaires, mais plus de stabilité pour le personnel », conclut Jessica Goldschleger, présidente de la FP–CSN.

L’environnement, un enjeu à intégrer dans nos conventions collectives

La question de la lutte aux changements climatiques est plus que jamais d’actualité. Alors que les scientifiques sonnent l’alarme depuis longtemps, les populations se mobilisent et des changements commencent à s’opérer. Pourtant, l’enjeu de l’environnement demeure pratiquement inexistant dans nos conventions collectives. Regard sur une lutte qui ne fait que commencer.

Retournons 40 ans en arrière. Les conventions de l’époque traitaient principalement de salaire et d’autres clauses normatives dites « classiques ». La question de la santé et de la sécurité au travail était pour ainsi dire absente de nos contrats de travail. En 2025, la quasi-totalité des quelque 8000 conventions collectives négociées au Québec incluent des clauses qui encadrent les enjeux de santé et de sécurité au travail. « Le même chemin doit se tracer pour l’environnement, lance Yvan Duceppe, trésorier de la CSN et responsable de l’environnement au comité exécutif. Dès la fin de la décennie, ces sujets devront être enchâssés dans nos conventions », précise-t-il.

En ce moment, on dénombre moins de 40 conventions – sur l’ensemble des contrats collectifs québécois – dans lesquelles des clauses environnementales sont consignées. Heureusement, les écoles de relations industrielles, dont celles de l’Université Laval et de l’Université de Montréal, se penchent sur la question. Cette dernière organise d’ailleurs depuis 2022 une école d’été sur le thème de la crise climatique et de l’avenir du travail.

La CSN adoptait aussi, lors de son congrès de 2023, une proposition allant en ce sens. « L’objectif est d’offrir aux syndicats des outils pour intégrer la protection de l’environnement dans leurs conventions. Ça prend des leviers pour obtenir les informations essentielles de la part des employeurs et pour discuter de manière paritaire de ces questions. Il s’agit d’un immense chantier auquel nous devrons impérativement nous attaquer », conclut M. Duceppe.

Ils n’ont pas froid aux yeux

Le froid est leur dénominateur commun, mais leur réalité est bien différente dépendant si on est pompier, col bleu, paramédic ou employé-e d’une station de ski.

Le vent des îles

Pompier volontaire aux Îles-de-la-Madeleine, Stéphane Poirier ne craint pas les grands froids. « Le plus gros enjeu, ce sont nos appareils respiratoires qui gèlent », explique-t-il. Celui qui agit comme porte-parole médias pour le comité de négociation de la convention collective précise que lorsqu’une tempête est en vue, des pompiers volontaires vont être invités à s’installer en caserne afin d’être en mesure d’intervenir le plus rapidement possible.

L’eau des Gatinois

Cet hiver, à Gatineau, on compte de six à sept bris d’aqueduc par jour. Nicolas Laflamme est un ouvrier de réseau. Quand une conduite éclate, lui et un collègue se rendent sur les lieux. Pendant qu’un des deux « descend », l’autre demeure « en haut », en soutien. « L’hiver, on se bat pour descendre en bas, explique ce délégué du Syndicat des cols bleus de Gatineau–CSN, car il y fait plus chaud. Cela dit, quand on est en bas, on a les deux pieds dans l’eau et elle peut être très froide ! On est bien habillé, mais l’eau finit par entrer dans les bottes. On se fait mouiller et notre linge gèle. »

« Réparer un bris d’aqueduc, ça peut prendre 2 heures ou en prendre 48. On ne le sait pas tant qu’on n’a pas déterré la conduite. Et l’hiver, parfois, ça peut prendre plus de temps pour se rendre à la conduite parce que la terre est gelée ; il faut alors commencer par casser au marteau. Certaines machines sont plus sensibles au froid, comme celles qui ont des composantes hydrauliques. Les boyaux peuvent briser à cause de la température. »

Les paramédics, toujours là

Pour les paramédics d’une région comme la Côte-Nord, traversée par un seul lien routier, la 138, les grosses tempêtes peuvent entraîner des délais supplémentaires. « Avec les vents violents, ça devient vision zéro sur la route. Ça veut dire plus de risques d’accident. On peut rester pris, il faut demander de l’aide pour déblayer le chemin, explique le président du Syndicat des paramédics de la Moyenne et Basse-Côte-Nord–CSN, Daniel Charrette. Des fois, on ne peut pas se rendre dans certaines communautés. »

Qui dit hiver dit motoneige et pour les paramédics, cela peut impliquer de longues interventions nécessitant l’aide des pompiers pour accéder au lieu d’un accident hors route. « Dans les territoires non organisés, c’est plus compliqué qu’en milieu urbain, explique le président de l’Association des travailleurs du préhospitalier, Fred Maheux. On est généralement mieux équipés qu’avant. Dans les grandes tempêtes, les gens viennent nous aider spontanément, par exemple un voisin qui est en train de passer sa souffleuse, pour nous ouvrir un chemin. J’ai vécu la grosse tempête de 2008, j’étais sur l’ambulance ce jour-là, ajoute le représentant des paramédics de la région de Québec–Chaudière-Appalaches. On était en contact avec la Ville pour qu’ils nous envoient une gratte ouvrir le chemin devant nous ! »

Amenez-en !

Au Mont-Tremblant, des conditions hivernales, on en redemande ! « C’est certain que pour viser les conditions idéales, on ne veut pas qu’il fasse trop chaud, explique le président du Syndicat des travailleuses et travailleurs de la Station du Mont-Tremblant, Benoit Filion. Mais quand il fait trop froid, c’est vrai que c’est moins agréable. Ça affecte tout le monde, dont le personnel qui travaille dans les restaurants et les boutiques avec les portes qui s’ouvrent tout le temps. »

En rappel : chantiers d’hiver

Dans le secteur de la construction, il se fait de plus en plus de travaux l’hiver. Cela soulève de nouveaux enjeux pour la CSN-Construction qui veille toujours au grain. L’an dernier, la CSN a diffusé un balado sur le sujet. https://www.csn.qc.ca/actualites/sadapter-au-gre-des-saisons/