La ministre responsable du Travail, Dominique Vien, a choisi son camp avec la hausse du salaire minimum de 50 ¢ prévue pour le 1er mai prochain. Un pan important de la société civile estime pourtant qu’une hausse substantielle du salaire minimum est nécessaire afin de sortir les personnes à bas salaire de la pauvreté.
S’ajoute à l’indécence l’annonce faite le 20 décembre par la ministre de diminuer la cotisation des employeurs pour financer l’application de la Loi sur les normes du travail (LNT) de 0,08 % à 0,07 % ! Serait-ce pour subventionner cette hausse du salaire minimum ?, se sont indignés les porte-parole de la campagne 5-10-15.
Ce faisant, le gouvernement Couillard se montre davantage à l’écoute des associations patronales qui ont évoqué à tour de rôle des scénarios plus apocalyptiques les uns que les autres sans être en mesure de les prouver. « Cette faible augmentation maintiendra dans la précarité des dizaines de milliers de familles, dénonce Christian Daigle, président général du SFPQ qui vient de se joindre à la coalition 5-10-15. On constate à quelle enseigne loge le PLQ en favorisant les entreprises au détriment des bas salarié-es. »
Pourtant, le 24 octobre dernier, lors d’une rencontre avec une délégation de la campagne 5-10-15, la ministre du Travail avait reconnu que, si un salaire minimum à 15 $ était trop élevé selon elle, une augmentation de 0,20 $ comme l’année dernière serait nettement insuffisante.
« On avait demandé à la ministre d’envoyer un signal fort pour l’atteinte de 15 $ l’heure le plus rapidement possible avec l’annonce de la prochaine hausse du salaire minimum, ce qui nous avait semblé bien accueilli. D’ailleurs, au sortir de cette rencontre, les représentants de la coalition présents à la rencontre avaient salué une certaine ouverture de la ministre. Aujourd’hui, l’augmentation annoncée est nettement insuffisante et indécente pour les personnes travaillant au salaire minimum. Son annonce est à des années-lumière du nécessaire coup de barre espéré par une partie importante de la population québécoise », d’expliquer François Vaudreuil, président de la CSD.
Selon Mélanie Gauvin, co-porte-parole de la campagne 5-10-15 : « Cette augmentation haussera légèrement le pouvoir d’achat des personnes qui travaillent au bas de l’échelle. Elle démontre toutefois une absence de volonté politique à faire une différence marquée et soutenue pour les travailleuses et travailleurs. Alors que dans le contexte économique plus difficile des années 2008 à 2010, le salaire minimum avait augmenté de 50 cents, en 2017, le gouvernement aurait pu faire un effort beaucoup plus prononcé et planifier une atteinte d’un salaire minimum à 15 $ au Québec. Majoritairement non syndiquées, ces personnes dépendent des décisions du gouvernement pour voir leur revenu de travail augmenter. »
« Il s’agit d’une gifle pour les quelque 210 000 travailleurs et travailleuses qui gagnent le salaire minimum, s’indigne Virginie Larivière, co-porte-parole de la campagne 5-10-15. La ministre Vien a choisi de les maintenir dans la pauvreté. Rappelons que, selon la mesure de faible revenu ou la mesure du salaire viable, un travailleur ou une travailleuse à temps plein devrait gagner un revenu net qui dépasse les 23 000 $, pour une semaine de 35 heures. Avec l’augmentation proposée, c’est encore un manque à gagner de plus de 4000 $ par année. »
« Les libéraux de Philippe Couillard se comportent une fois de plus comme un gouvernement patronal, a réagi le président de la CSN, Jacques Létourneau. Il désengage les patrons de leur responsabilité de payer convenablement leurs employé-es. En outre, avec leurs charges fiscales qui ne cessent de diminuer, comme avec la cotisation à la LNT et le taux effectif marginal d’imposition sur l’investissement qui est passé de 34,5 % en 1998 à 18,8 % en 2012, ce sont les particuliers qui se trouvent à subventionner les entreprises qui versent le salaire minimum. Le partage de la richesse, ça passe aussi par des salaires décents ! »
« Le gouvernement affirme vouloir être prudent. Mais une augmentation si basse frôle plutôt l’inertie politique. De 2008 à 2010, le salaire minimum a augmenté de 50 cents par année et les études, autant celles de l’Institut de la statistique que celle du Conseil québécois du commerce de détail, ont démontré des effets positifs sur l’emploi et sur les ventes, rappelle Louise Chabot, présidente de la CSQ. Donc nous sommes d’avis que le gouvernement aurait pu facilement, sans le moindre risque économique, dépasser les 50 cents déjà testés et, de cette façon, accélérer le pas vers l’atteinte d’un salaire minimum décent. »
La campagne 5-10-15 est menée par le Front de défense des non-syndiquéEs, le Collectif pour un Québec sans pauvreté, la Centrale des syndicats du Québec (CSQ), la Confédération des syndicats nationaux (CSN), la Centrale des syndicats démocratiques (CSD) et le Syndicat de la fonction publique et parapublique du Québec (SFPQ).
Ses trois revendications sont :
- Le droit d’obtenir son horaire de travail 5 jours à l’avance;
- Le droit de disposer de 10 jours de congés payés par année pour la maladie ou les responsabilités familiales;
- Le droit de gagner un salaire minimum de 15 $ l’heure.