S’il est souhaitable de favoriser le développement économique du Nord, il faut cesser de faire de la Côte-Nord une zone grise sur le plan des services aux citoyens pendant que le minerai et les travailleurs transitent, emportant avec eux richesses et salaires, au détriment d’un développement local et régional plus que nécessaire. Le gouvernement en place trouve des fonds publics pour son Plan Nord, alors qu’il nous fait un portrait dramatique des finances publiques.
Quel développement intégré?
La nouvelle mouture du Plan Nord libéral, présentée par le premier ministre Couillard au forum Objectif Nord mardi dernier à Montréal, lançait un appel aux entreprises, les invitant à investir dans le développement minier nordique, malgré un marché baissier, avec des millions de dollars de fonds publics annoncés, sans aucun calendrier ni échéancier. Un projet de loi dans le but de créer une société d’État autonome. À cela s’ajoute un investissement de 20 millions de dollars dans la réalisation d’une étude de faisabilité pour la construction d’un lien ferroviaire entre la Côte-Nord et la fosse du Labrador. Cela ressemble à l’improvisation des deux premières moutures du développement du Plan Nord, qui nous faisaient miroiter la richesse pour tous les Nord-Côtiers.
Et pendant ce temps, on fusionne dans les services de santé et services sociaux, on coupe dans les garderies, l’éducation, les directions régionales des ministères, accumulant les pertes d’emplois et les difficultés pour obtenir des services essentiels pour la population. Comment pourra-t-on gérer l’arrivée de nouveaux projets, si la pression déjà trop forte sur les ressources disponibles des villes de la Côte-Nord accroît le déficit des soins de santé, des garderies, des logements, des commerces?
L’expérience des dernières années est une preuve limpide de l’échec à venir : pénurie de logements à Sept-Îles et Port-Cartier, hausse du prix des loyers et des maisons, manque de places en garderie, pénurie de personnel dans les établissements de santé et services sociaux, dans les commerces, dont plusieurs ont dû fermer faute d’employé-es. Sans oublier les jeunes qui quittent l’école sans terminer leur secondaire pour occuper des emplois souvent éphémères. Que leur arrivera-t-il lorsqu’ils devront aller travailler ailleurs? Et la pauvreté augmente dans un tel contexte. Le fly in/fly out devient la norme, il faut accueillir des travailleurs qui vont repartir sans participer à la vie régionale.
Et voilà que le ministre Barrette abolit les Agences de santé et services sociaux, fusionne les CSSS et crée une méga structure, le « Centre intégré de santé et de services sociaux » (CISSS), qui n’équivaut qu’à un chambardement des structures actuelles et qui n’assure en rien de meilleurs services, surtout sur un grand territoire comme celui de la Côte-Nord, où la proximité des services est essentielle. Et d’autres mesures d’austérité sont à venir… Ce gouvernement veut récupérer 3.2 milliards de dollars, dont 2 en santé. Nous sommes convaincus que les services à la population seront touchés.
Où se trouvent les investissements en services dans ce beau programme? Quelles sont les propositions pour un développement intégré, non pas du point de vue de l’entreprise, mais bien de celui des villes, des communautés et des citoyens de la Côte-Nord qui doivent voir leur région se développer de manière durable? Faut-il regarder passer les trains comme d’autres municipalités regardent passer les pétroliers, être prêts à assumer les inconvénients, les conséquences et les risques, sans aucune contrepartie?
Le parti pris de ce gouvernement est clair : favoriser les entreprises, peu importe ce qu’il en coûte. On revient à une vision de l’économie axée sur l’extraction des ressources minières, une stratégie qui rend les régions ressources dépendantes des aléas des marchés, constamment à la traîne sur le plan des services. Au XXIe siècle, il faut au contraire penser à l’avenir, choisir de diversifier l’économie de ces régions, penser en termes de développement durable et d’occupation du territoire. Le Conseil central Côte-Nord- CSN invite le gouvernement à faire preuve de cohérence : les mesures d’austérité ne feront que compliquer une situation déjà difficile, contribuant entre autres à la pénurie de main-d’œuvre, au manque de services et à l’éloignement des investisseurs. Il est temps de faire du Plan Nord un modèle de développement durable.
À propos du conseil central
Le Conseil central Côte-Nord – CSN regroupe plus de 50 syndicats représentant plus de 5 500 travailleuses et travailleurs. Quant à la CSN, elle compte plus de 325 000 travailleuses et travailleurs provenant de tous les secteurs d’activité, tant public que privé.