La Confédération des syndicats nationaux (CSN) dénonce le projet de loi no 8 modifiant le Code du travail à l’égard de certains salariés d’exploitations agricoles, déposé par le gouvernement libéral. À 16 heures, cet après-midi, le secrétaire général de la CSN, Jean Lortie fera part de la position de la centrale syndicale à la Commission de l’économie et du travail, au Salon rouge de l’Assemblée nationale. La CSN joint sa voix à toutes celles qui se sont élevées contre ce projet de loi, dont le Front de défense des non-syndiqué-es.
« C’est avec une immense déception que nous accueillons le projet de loi no 8, qui continue de maintenir les travailleuses et les travailleurs agricoles dans un régime d’exception les privant d’un véritable droit de se syndiquer et de négocier des améliorations à leurs conditions de travail, déclare le porte-parole de la CSN. Le gouvernement libéral aurait pu profiter du 50e anniversaire du Code du travail pour mettre fin à ce système discriminatoire dans lequel sont plongés des travailleurs très vulnérables, pour la plupart des travailleurs migrants temporaires, soumis à un arbitraire patronal qui impose des cadences pénibles et trop souvent dangereuses. »
Ce projet de loi, loin de protéger les travailleurs agricoles, les exclut en réalité de la plupart des protections qu’offre le Code du travail. Qui plus est, il étend impudemment ce régime d’exception bien au-delà de la ferme, en couvrant désormais le producteur de produits agricoles au sens large, ce qui est inacceptable. Il reprend en outre l’exigence d’emploi « ordinaire et continue » qui permet, on le sait, à l’entreprise agricole utilisant des centaines d’employés, mais seulement de façon saisonnière, d’échapper aux obligations du Code du travail.
Simulacre de négociation Pour la CSN, le projet de loi no 8 instaure un simulacre de négociation collective et un processus non conforme au droit international en matière de liberté syndicale. Tout au plus, ces ouvriers agricoles se verraient « autorisés » à faire présenter des « observations » sur leurs conditions d’emploi par leur association… non accréditée ! On peut aisément imaginer ce que deviendrait ce « droit » à la présentation d’observations. L’obligation de l’employeur se limiterait donc à lire ou à écouter les observations de ses employé-es, une démarche qui n’est certes pas de nature à garantir un processus de concessions mutuelles, soit l’essence même d’une négociation.
Avec le projet de loi no 8, les employés agricoles se trouveraient privés notamment du droit à l’accréditation syndicale, des dispositions sur la négociation collective et de celles sur la convention collective, du précompte syndical et du devoir de représentation syndicale, du droit de grève et des dispositions anti-briseurs de grève, du gel des conditions de travail, de l’arbitrage de première convention de même que de l’arbitrage de grief (article 111.27). Bref, on les prive de tout droit véritable à la syndicalisation.
Si le gouvernement veut véritablement aménager aux ouvriers agricoles un droit de négociation, il doit mettre un terme au régime discriminatoire qui persiste depuis 50 ans à leur égard et qui en fait des travailleurs de seconde zone. « Il est inadmissible de fonder la prospérité d’un secteur économique sur l’exploitation de travailleuses et de travailleurs, de plus en plus des migrants, comme main-d’œuvre à rabais, dénonce Jean Lortie. Trop longtemps tolérée, l’exclusion des travailleurs agricoles des lois du travail, en particulier du Code, constitue aujourd’hui un anachronisme honteux. Le législateur doit permettre une véritable syndicalisation de ces travailleurs et l’assortir d’un réel droit de négociation, incluant le droit à des moyens de pression. »