Comme une pierre de plus dans l’édification de son programme de démantèlement de l’État, le gouvernement a adopté, en juin dernier, un projet de loi qui marque la disparition de la Commission de l’équité salariale, de la Commission des normes du travail et de la Commission de la santé et de la sécurité du travail.
Voulant démontrer à tous ses « capacités de gestionnaire », le gouvernement a, dans la précipitation et avec un manque d’analyse flagrant, improvisé une fusion d’organismes en arguant l’efficacité et l’efficience. Cette fusion n’est pas anodine. Comme un contaminant, elle ne tuera pas, mais elle affaiblira le corps visé, en l’occurrence, celui des droits. Pour l’essentiel, ces organismes ont tous des responsabilités quant à l’application de lois qui confèrent des droits importants aux travailleuses et aux travailleurs. Le droit à la reconnaissance de la valeur du travail des femmes, celui à un travail décent par l’imposition de normes minimales et celui de travailler dans un environnement où les risques pour la santé et la sécurité sont, dans la mesure du possible, éliminés, constituent des valeurs partagées par l’ensemble de la société. Ainsi, dans un souci allégué de « rationalisation et de rigueur », le gouvernement s’en prend, encore une fois, plus particulièrement aux femmes ainsi qu’aux travailleuses et aux travailleurs non syndiqués.
Le gouvernement a aussi profité de l’occasion pour changer significativement les règles du jeu concernant l’encadrement légal des recours en matière de santé et de sécurité du travail : l’abolition des assesseurs et la création d’un tribunal administratif du travail sont deux exemples de changements qui nous inquiètent, notamment au regard d’un meilleur accès à la justice et du maintien des expertises.
Sauver la mise
Entre les premières intentions du gouvernement et l’adoption de la loi, il faut reconnaître que nos actions n’ont pas été vaines et que nous sommes parvenus, avec l’aide de l’opposition officielle, à améliorer singulièrement la proposition gouvernementale. Ainsi, nous avons obtenu le maintien du paritarisme comme élément fondateur de la nouvelle commission et la création d’une vice- présidence dédiée aux questions relatives à l’équité salariale, qui sera nommée après consultation des organisations syndicales et des associations d’employeurs. Le gouvernement a aussi consenti à garder intact le processus décisionnel lors du traitement des plaintes en matière d’équité salariale, tout comme il a reconnu la nécessité de confier à une autre vice-présidence la responsabilité des normes du travail. En ayant obtenu des modifications dans la gouvernance de l’organisme et l’implantation de deux comités afin d’assurer le suivi des activités et de participer à l’élaboration des orientations en matière d’équité salariale, d’une part, et de normes minimales du travail, d’autre part, nous nous sommes assurés d’une réelle capacité d’intervention sur ces enjeux.
Investir les lieux, faire reconnaître nos droits
Difficile de ne pas voir dans cette réforme une main tendue vers les employeurs et une façon de réduire le rôle de l’État. Ainsi, le respect de droits aussi fondamentaux que ceux qui sont sous la responsabilité du nouvel organisme ne pourra être assuré sans une vigilance de tous les instants. Notre présence au sein du conseil d’administration et des comités de partenaires doit être vue comme une occasion d’amener le gouvernement et les employeurs à mieux se comporter. Le gouvernement peut bien agir sur les structures, il devrait savoir que cela n’altérera en rien notre volonté de défendre bec et ongles les acquis historiques des travailleuses et des travailleurs et d’endiguer tout recul des droits des personnes non syndiquées.