Hier soir, une trentaine de travailleuses et de travailleurs syndiqués du magasin Provigo de Témiscaming – en lock-out depuis un an demain – se sont préparés à vivre un autre Noël sombre en soulignant ce triste anniversaire par un souper communautaire.
Les employé-es de la seule épicerie de cette ville frontalière de la région d’Abitibi-Témiscamingue sont sans convention collective valide depuis le mois d’avril 2012. La dernière séance de négociation a eu lieu le 14 août, malgré les demandes du Syndicat des travailleuses et travailleurs du Provigo Témiscaming – CSN de poursuivre les pourparlers.
Conscients de l’impact social de la décision prise par le géant de l’alimentation Loblaw sur les 2500 habitants de Témiscaming, la CSN organise depuis presque un an une navette – opérée par les membres du syndicat – à la ville de North Bay, Ontario, afin que les résidents puissent s’approvisionner de façon plus économique.
« Il est impensable qu’une corporation qui vaut des milliards puisse être si inconsciente de sa responsabilité sociale envers cette ville et envers ses propres employé-es, a commenté la vice-présidente de la CSN, Denise Boucher, lors d’un point de presse à Témiscaming, aujourd’hui. L’impact économique local est énorme, mais il semble que l’avidité de Loblaw est sans limite. »
Refus de négocier
À l’exception des sujets de moindre importance, les négociateurs de Loblaw n’ont eu qu’un mot à dire devant les principales revendications raisonnables du syndicat : non. Loblaw refuse la demande créer davantage de postes permanents pour les employé-es de longue date. De fait, plus de 70 % des employé-es du Provigo de Témiscaming travaillent à temps partiel, et ce, pour un taux horaire maximum de 12,40 $.
« Cette approche de bulldozer à la table de négociation n’est pas digne d’un employeur avec autant de moyens que Loblaw, se désole Serge Fournier, président de la Fédération de commerce – CSN. Toutefois, nous sommes tous conscients des morts tragiques des employé-es sous-contractés par Loblaw au Bangladesh afin de fabriquer les vêtements de la marque Joe Fresh. Et nous nous demandons si Loblaw aimerait importer les mêmes conditions de travail au Québec. »
Pour le président du Conseil central d’Abitibi-Témiscamingue-Nord-du-Québec, (CCATNQ-CSN), Donald Rheault, il est primordial que Loblaw se remette au travail et retourne à la table avec un vrai mandat de négocier. C’est toute l’économie locale qui en écope, malgré une entente entre la CSN et la Chambre de commerce de Témiscaming de favoriser l’achat local autant que possible lors des rencontres avec la population.
« Loblaw a longtemps profité de la ville de Témiscaming en exploitant sa seule épicerie. Il est étonnant qu’il puisse démontrer autant de mépris, non seulement pour ses propres employé-es, mais aussi pour sa fidèle clientèle. Il est temps que cette puissante corporation reconnaisse que des salaires raisonnables et des conditions de travail acceptables sont un échange honorable pour les profits monopolistiques tirés de la ville de Témiscaming. »
Conflits sans fin
Ce lock-out à Témiscaming n’est pas le seul conflit de travail provoqué par Loblaw dans la région. Le 10 juin dernier, les syndiqué-es du Loblaws de Rouyn-Noranda ont déclenché la grève devant l’offre globale inacceptable de l’employeur. Les salarié-es en question sont sans convention collective depuis le 1er novembre 2012.
Il est à noter que le 27 juin 2013, une décision rendue par la Commission des relations du travail (CRT) a reproché à l’employeur d’entraver les activités du syndicat, d’avoir négocié de mauvaise foi et d’avoir porté atteinte à la liberté d’association. En plus d’une série d’autres mesures, la CRT a ordonné à Loblaw de verser au syndicat la somme de 5000 $ à titre de dommages et intérêts punitifs.
Le conflit du Loblaws de Rouyn-Noranda est venu s’ajouter au lock-out qui perdure au Maxi de Rouyn-Noranda depuis le mois d’août 2012.
Un Noël difficile
Cathy Presseault, la présidente du syndicat et une travailleuse au Provigo depuis 22 ans, a remarqué que, pour un deuxième Noël de suite, les paniers de ses membres sont loin d’être pleins.
« Nous savons qu’il en coûte de se faire respecter et d’être déterminés, a-t-elle dit. Mais nous restons solidaires devant Loblaw. Cet employeur peut nous priver de notre gagne-pain, mais il n’a pas droit à notre dignité. Avec l’appui de la CSN, nous passerons au travers ! »