C’est dans le pénitencier à sécurité maximale de Port-Cartier qu’un premier agent infecté à la COVID-19 est recensé vers la fin mars. « Rapidement, le virus s’est répandu comme une traînée de poudre, explique Frédérick Lebeau, président de la région du Québec, à UCCO-SACC-CSN. Trois jours plus tard, nous étions à 11 agents à Port-Cartier et à deux agentes correctionnelles (intervenantes de première ligne) à l’établissement de Joliette ». Au plus fort de la crise, 18 agents sont infectés à Port-Cartier, 38 à Joliette et 12 au pénitencier de Mission en Colombie-Britannique.
Le syndicat se met rapidement en mode solution. S’inspirant des mesures prônées par la Direction de la santé publique, il exige que les « routines » soient modifiées afin de respecter la distanciation sociale et de faire en sorte que le matériel de protection individuelle soit fourni en quantité suffisante par l’employeur. Toute visite non essentielle est interdite et les détenu-es sont placés en isolement cellulaire.
Sous la pression d’UCCO-SACC-CSN, le Conseil du Trésor autorise finalement l’octroi de congés particuliers pour les agents infectés et pour ceux en quarantaine. « À partir du moment où nos membres n’avaient plus à utiliser leurs congés de maladie « réguliers », cela a permis de contrôler un peu mieux la propagation. Toutefois, on a assisté à un nombre record de personnes en congé, et donc à une pénurie de personnel. Plusieurs agents sont venus d’autres régions pour prêter main-forte à Port-Cartier et à Joliette. »
Parallèlement, le président national d’UCCO-SACC-CSN, Jeff Wilkins, s’adresse au ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, Bill Blair, afin que des trousses de tests soient envoyées dans tous les pénitenciers. La peur d’une propagation incontrôlée plane. Les détenu-es non plus ne sont pas épargnés ; près de 300 sont infectés dans tout le pays. Deux détenus en meurent : un au pénitencier de Mission en Colombie-Britannique et un au Centre fédéral de formation de Laval.
Les leçons apprises à Port-Cartier sont appliquées lorsque des cas apparaissent aux établissements de Donnacona, de Drummondville, d’Archambault et au Centre fédéral de formation. « Le climat est tout de même anxiogène dans tous les pénitenciers. Les agentes et les agents sont au cœur de la crise. Même si on n’a pas pu empêcher le virus d’entrer dans les pénitenciers, on a quand même réussi à limiter sa propagation afin d’éviter des catastrophes comme en Italie où il y a eu de violentes émeutes. »
S’assurant de maintenir la pression auprès de l’employeur, l’exécutif d’UCCO-SACC-CSN réussit à le convaincre de fournir des masques non chirurgicaux à l’ensemble de ses employé-es, et finalement, à envoyer des trousses de tests partout au pays.
Le syndicat a aussi choisi de fournir à ses 7400 membres des masques à l’effigie d’UCCO-SACC-CSN et du désinfectant pour les mains. « Les agentes et les agents correctionnels sont habitués à faire face à l’adversité. Mais cette fois-ci, il a fallu se battre contre un ennemi invisible. Même si la guerre n’est pas terminée — on tente toujours d’aplanir la courbe au Centre fédéral de formation — on peut dire qu’on est passé au travers de la première bataille avec fierté, dignité et solidarité », conclut Lebeau.