L’augmentation de la rémunération des médecins québécois est non seulement démesurée, mais elle plombe également le système de santé. C’est ce que démontre une note socioéconomique de l’IRIS, qui met également sur table huit recommandations pour faire cesser l’hémorragie et mettre fin à l’échec du laissez-faire.
« Les augmentations consenties depuis 2007 aux médecins vont trop loin, et tout indique que ça va continuer comme ça dans les prochaines années. Quand on regarde la croissance globale des dépenses en santé, on se rend compte que l’enveloppe de la masse salariale des médecins augmente trois fois plus rapidement que l’ensemble des coûts en santé et en services sociaux. En sept ans à peine, un médecin québécois a vu sa rémunération croitre en moyenne de 110 000 $. Ce sont en moyenne des augmentations de 70 000 $ pour un omnipraticien et près de 145 000 $ pour un spécialiste. Je n’ai pas besoin de vous dire que ça dépasse l’inflation. Et malheureusement, ces augmentations ne se sont pas traduites par une amélioration de l’accès pour les patient·e·s. En effet, pendant ces sept années, la rémunération globale des médecins a cru sept fois plus vite que l’augmentation du nombre d’actes réalisés », affirme Guillaume Hébert, auteur de la note et chercheur à l’IRIS.
Le gouvernement de Jean Charest avait consenti ces augmentations sous prétexte qu’il fallait ajuster la rémunération des médecins en fonction du salaire de nos voisins canadiens. « Si on applique ce raisonnement aujourd’hui, en comparant le coût de la vie entre le Québec et l’Ontario, nous diminuerions la rémunération des médecins québécois de 12 % pour que leurs honoraires s’équivalent. Cela permettrait à l’État québécois de récupérer environ 1 milliard $, ce qui équivaudrait, pour donner un ordre de grandeur, à l’embauche de plus de 20 000 préposé·e·s aux bénéficiaires ou de plus de 15 000 infirmières », estime Guillaume Hébert.
« Le débat entourant la rémunération des médecins nous place devant un constat d’échec de la logique du laissez-faire. C’est pour cette raison que l’IRIS, en plus de proposer de ramener la rémunération des médecins québécois au niveau de l’Ontario, amène quelques recommandations pour boucher les fuites et stopper l’hémorragie. Par exemple, nous croyons que le gouvernement devrait sanctionner plus sévèrement les médecins qui demandent des frais accessoires à leurs patient·e·s. De plus, la RAMQ devrait avoir davantage de pouvoirs et de ressources pour enquêter sur la facturation excessive des médecins, qui prive actuellement l’État de millions de dollars. En terminant, nous pensons qu’il y a urgence de réviser le mode de rémunération des médecins, en s’appuyant notamment sur les études commandées par le Commissaire à la santé et au bien-être avant son abolition par le ministre Gaétan Barette », plaide le chercheur.
La CSN a contribué au financement de cette note socioéconomique.