La poursuite intentée récemment par le chroniqueur Richard Martineau contre un média indépendant et deux de ses collaborateurs pigistes soulève de nombreuses questions quant à la protection des journalistes indépendants contre les poursuites abusives.
« L’AJIQ est extrêmement inquiète d’apprendre qu’une chronique satirique, publiée en février dernier par Marc-André Cyr dans Ricochet, vaut au média, au chroniqueur et à l’illustrateur du texte, Alexandre Fatta, une poursuite conjointe de 350 000 $ en dommages et intérêts pour diffamation. Quoi qu’on pense du texte et des caricatures en cause et sans prendre position sur le fond du litige, nous estimons que cette poursuite représente un grave précédant », affirme le président de l’AJIQ, Simon Van Vliet qui est également un collaborateur de Ricochet.
Améliorer la protection des journalistes indépendants
« Faute de moyens financiers suffisants, Ricochet ne dispose d’aucune assurance responsabilité civile lui permettant d’assumer les frais judiciaires d’une poursuite en Cour supérieure et encore moins de payer des dommages exorbitants comme ceux réclamés par M. Martineau. Le média indépendant se voit donc contraint de lancer une campagne de sociofinancement pour assurer sa défense et celle de ses collaborateurs pigistes. Cette situation est inacceptable et confirme la nécessité d’un financement adéquat des médias indépendants qui leur permettrait d’honorer les 10 principes du contrat équitable énoncés par l’AJIQ, dont la protection juridique des journalistes en cas de poursuite est un élément-clé », souligne le président de l’AJIQ.
De plus, alors que la Loi sur la presse prévoit qu’aucune action judiciaire ne peut être intentée sans préavis contre une entreprise de presse, cette protection ne semble pas s’appliquer aux médias électroniques, comme Ricochet, qui ne sont pas enregistrés en vertu de la Loi sur les journaux et autres publications, vieille de plus de 50 ans.
« Pourquoi M. Martineau a-t-il choisi de procéder directement avec une poursuite, plutôt que de demander une rétractation ou un droit de réplique. La Loi sur la presse précise par ailleurs qu’une telle action doit être entamée dans les trois mois suivants la prise de connaissance de l’article par la partie qui s’estime lésée. Pourquoi avoir attendu plus de six mois? », s’interroge Simon Van Vliet. « Cette affaire démontre que la précarité dans laquelle (sur) vivent depuis trop longtemps les journalistes et les médias indépendants fragilise dangereusement leur liberté de parole et d’action », conclut-t-il.
À propos de l’AJIQ : L’Association des journalistes indépendants du Québec, fondée à Montréal en 1988, est la seule organisation au Québec qui vise à améliorer les conditions de pratique, à favoriser le développement professionnel et à valoriser la contribution des journalistes indépendants à la production d’une information de qualité et d’intérêt public. L’AJIQ est affiliée à la Fédération nationale des communications de la CSN, le plus important regroupement de travailleurs et de travailleuses de l’information au Québec.