Syndicalisation

Produits Deschamps en mode congédiement

Sur le plancher de l’entrepôt, le travail s’avère difficile. Le salaire est maigre et l’employeur semble profiter de la méconnaissance que les employé-es ont des normes du travail en vigueur au Québec pour les ignorer systématiquement.

Par Camila Rodriguez-Cea

En banlieue de Montréal, l’entrepôt Produits Deschamps a l’air assez banal. Ici, pas d’enseigne clinquante ou d’activité animée, tout crie : « Rien à signaler, continuez votre chemin. »

L’entrepôt se spécialise dans l’importation et la distribution de produits alimentaires latino-américains, loin des regards du grand public. Ses clients sont des restaurants ou des boutiques spécialisées comme Sabor latino, à Montréal.

Si l’entrepôt est d’apparence banale, l’histoire de ses travailleuses et de ses travailleurs l’est moins. La majorité d’entre eux appartient à la même communauté colombienne et fréquente la même église, à Greenfield Park. C’est sur le pavé de cette église que la famille, propriétaire de l’entrepôt, recrute son personnel.

« On nous présentait cet emploi comme une première opportunité de travail au Québec ; pas l’emploi du siècle, mais un travail honnête qui allait nous permettre d’acquérir un peu d’expérience », explique un travailleur qui a préféré conserver l’anonymat.

Sur le plancher de l’entrepôt, le travail s’avère difficile. Le salaire est maigre et l’employeur semble profiter de la méconnaissance que les employé-es ont des normes du travail en vigueur au Québec pour les ignorer systématiquement.

« Ça donnait l’impression qu’on était censés tolérer ces conditions de travail parce que nous sommes des immigrants. C’est pour ça qu’on a décidé de se syndiquer », ajoute le travailleur.

Après une campagne éclair de syndicalisation, le syndicat est rapidement accrédité à la mi-mai 2024. La victoire est cependant de courte durée, puisqu’un délégué syndical est renvoyé, le 7 mai, avant même que le nouveau syndicat amorce la négociation de sa première convention collective. Quelques jours plus tard, un autre travailleur est remercié. Avec la régularité d’un métronome, en quelques mois, ils seront presque tous mis à la porte et remplacés par des travailleurs d’agence non syndiqués.

Des mesures judiciaires ont été entamées par la CSN pour défendre les travailleurs injustement renvoyés ; l’audience au Tribunal administratif du travail est fixée au 13 décembre 2024. La demande du syndicat est claire : les travailleurs concernés doivent être réembauchés et veulent des conditions de travail dignes. D’ici là, la syndicalisation chez Produits Deschamps nous rappelle que les travailleuses et les travailleurs issus de l’immigration ont toujours fait partie de la classe ouvrière québécoise et que leur lutte est aussi celle des 330 000 membres de la CSN.

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