Le 25 mai dernier, le ministère de la Santé et des Services sociaux publiait un appel d’offres afin d’évaluer la possibilité d’une impartition des buanderies publiques, Partagec et Lavérendière, au secteur privé. La CSN, qui s’est toujours opposée à toute forme de privatisation des services publics, ne comprend pas cette obstination de la part du ministre alors que tout démontre le caractère néfaste de cette option, autant sur les finances publiques et la gouvernance que sur les emplois. La CSN, la FSSS-CSN ainsi que les deux syndicats concernés demandent donc au gouvernement de renoncer immédiatement à cette avenue et de laisser aller les projets déjà autorisés de construction de nouvelles installations.
Pour des emplois de qualité
Pour les organisations syndicales impliquées, il ne fait aucun doute que les premières victimes de cette privatisation seraient les salarié-es. « Contrairement à ce que l’on entend ici et là, il est faux de prétendre que les salaires sont équivalents, ce sont des emplois de qualité qui seront perdus et cela aura des impacts négatifs sur notre économie régionale », affirme Gilles Savoie, président du Syndicat des travailleuses et des travailleurs du Centre de santé et de services sociaux du nord de Lanaudière-CSN. « C’est aussi un milieu de travail qui reconnaît l’expertise de ses employé-es et qui les met au cœur d’un processus d’amélioration des pratiques qui disparaîtrait », renchérit François Renauld, président du Syndicat des travailleuses et des travailleurs de Partagec.
Pour les pertes économiques
D’un point de vue purement comptable, il appert que la privatisation entraînerait des pertes financières pour le gouvernement, et ce, même si le prix du privé s’avérerait plus bas au terme de cet exercice. C’est en effet ce qui ressort d’une étude indépendante commandée par le Centre canadien de politiques alternatives, et réalisée en 2014, afin d’évaluer les impacts de la privatisation des services de buanderie en Saskatchewan. Les chercheurs démontrent que la baisse de revenus des salarié-es créerait une perte fiscale pour le gouvernement qui se situerait entre 14 et 42 millions de dollars sur 10 ans. Pertes plus importantes que les économies qui pourraient être réalisées par le recours au secteur privé : « Si le Ministère épargnait de l’argent, et ceci est loin d’être certain, est-ce que le gouvernement, lui, économiserait ? Le Ministère a-t-il tenu compte de cette réalité dans son évaluation », s’interroge Jean Lacharité, vice-président de la CSN.
Pour la CSN, le processus d’analyse doit aussi tenir compte de la fluctuation des prix qui est coutume avec le privé. En effet, les demandes d’ajustement convenues au contrat pourraient être nombreuses et coûteuses, particulièrement si elles provenaient du demandeur de services. « En santé, les besoins sont toujours en évolution et la conjoncture nécessite des adaptations constantes. Avec le privé, un ajustement dans la demande impliquerait nécessairement un ajustement dans les prix », lance Guy Laurion, vice-président de la FSSS-CSN.
Pour une gouvernance transparente au lieu d’un simple rapport de client
À l’heure actuelle, les deux buanderies visées ont développé un modèle de gouvernance démocratique auquel les établissements partenaires ainsi que les employé-es prennent une part active. Cette gestion participative permet aux deux buanderies et aux établissements partenaires d’adapter leurs pratiques conformément aux besoins. « Les deux modèles qui s’opposent ici sont, d’un côté, un contrat commercial axé sur la recherche de profit et dont le contenu est confidentiel et, d’un autre côté, une gouvernance basée sur la concertation et sur la transparence visant l’octroi d’un service », insiste Guy Laurion.
Pour repousser le cheval de Troie de la privatisation
« Il ne faut pas être dupe ! Il s’agit d’une brèche dans les services publics. Aujourd’hui, ce sont deux buanderies, mais demain, est-ce que ce sera les services d’entretien ménager, les services de maintenance ou encore les cafétérias », se questionne Jean Lacharité. La CSN s’inquiète en effet que derrière la situation actuelle se cache une volonté manifeste du ministre de la Santé et de l’ensemble du gouvernement pour privatiser à la pièce les services publics. « Nous ne laisserons pas ça aller ainsi, il faut que tous et toutes comprennent que la lutte pour la sauvegarde de ces deux buanderies est en fait une lutte pour la survie de l’ensemble du réseau de la santé public », ajoute Guy Laurion.
Parce qu’une bonne idée en 2008 reste une bonne idée en 2015
La CSN est d’autant plus surprise par cette décision, qu’en 2008, le ministre de la Santé Philippe Couillard inaugurait une nouvelle buanderie publique, et ce, dans le comté du premier ministre Charest. Aujourd’hui, le Centre hospitalier universitaire de Sherbrooke (CHUS) tire un bilan excessivement positif de cet investissement. Selon un document produit par le CHUS, l’efficacité s’est accrue de près de 40 %. « Si en 2008, il s’agissait d’un bon investissement et si en 2015, on nous présente des résultats aussi excellents, pourquoi aujourd’hui envisage-t-on le recours au privé pour ces projets autofinancés », s’étonne Jean Lacharité.
Les organisations syndicales concernées insistent : le gouvernement doit renoncer à la privatisation des buanderies et s’engager à maintenir l’ensemble des services auxiliaires dans le secteur public. Cette décision est sans équivoque, il faut cesser de faire vivre des inquiétudes inutiles à ces centaines de salarié-es dévoués.
À propos
La Fédération de la santé et des services sociaux (FSSS-CSN) qui compte près de 130 000 membres dans les secteurs public et privé. La FSSS est la plus grande organisation syndicale dans le secteur de la santé et des services sociaux. La FSSS-CSN agit en faveur d’une société plus équitable, plus démocratique et plus solidaire.
Fondée en 1921, la CSN est une organisation syndicale qui œuvre pour une société solidaire, démocratique, juste, équitable et durable. À ce titre, elle s’engage dans plusieurs débats qui intéressent la société québécoise. Elle est composée de près de 2000 syndicats. Elle regroupe plus de 325 000 travailleuses et travailleurs réunis sur une base sectorielle ou professionnelle dans huit fédérations, ainsi que sur une base régionale dans treize conseils centraux, principalement sur le territoire du Québec.