Devant la résolution votée par le conseil municipal de Sorel-Tracy lundi soir dernier, résolution qui rejette l’application éventuelle sur son territoire du projet de loi 110, Loi concernant le régime de négociation des conventions collectives et de règlement des différends dans le secteur municipal, le ministre des Affaires municipales, Martin Coiteux, fait preuve d’une attitude provocatrice en amendant son propre projet de loi afin de s’assurer que le gouvernement puisse, malgré la volonté des parties, s’ingérer dans le processus de négociation des conditions de travail des employé-es du secteur municipal et du transport.
L’amendement à l’article 5 du projet de loi 110 permet une intervention dans les négociations entre les employeurs et les syndicats. Alors que les parties pourraient convenir de prolonger une négociation, reportant à plus tard l’intervention d’un médiateur, pour favoriser la conclusion d’une entente, le ministre vient de déterminer qu’ils ne pourront pas le faire.
Le ministre parle de l’autonomie des municipalités alors qu’il cherche également à leur imposer une durée de convention collective.
La résolution du conseil municipal de Sorel-Tracy informe le ministre Coiteux que l’adoption du projet de loi 110 par l’Assemblée nationale nuirait au droit fondamental de négocier, causerait un déséquilibre entre les parties en matière de relations de travail et pourrait avoir des répercussions négatives sur le climat et les relations de travail.
D’autres villes ont également exprimé leur opposition au projet de loi, incluant Mont-Joli et Amqui dans le Bas-Saint-Laurent, Rouyn-Noranda et Ville-Marie dans l’Abitibi-Témiscamingue, de même que Shawinigan et la MRC de la Vallée-de-la-Gatineau en Outaouais. D’autres pourraient également s’ajouter à cette liste dans les prochains jours.
Le Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP) et la Fédération des employées et employés de services publics (FEESP-CSN) dénoncent avec véhémence cette autre manœuvre anti démocratique du gouvernement libéral.
« En piétinant la démocratie locale de cette façon, Martin Coiteux démontre que le vrai but de cet exercice n’est pas d’assainir la gestion fiscale des municipalités, mais bien d’en prendre le contrôle », déclare Denis Bolduc, président du SCFP-Québec. « Même si une administration locale souhaitait maintenir des relations de travail harmonieuses, le ministre aurait le dernier mot. C’est honteux ! »
Pour Denis Marcoux, président de la Fédération des employées et employés de services publics du Québec, le mépris affiché par le ministre Coiteux à l’égard des municipalités est manifeste. « Ces dispositions du projet de loi restreignent la liberté de chacune des parties de conclure une entente négociée, même sans conflit de travail. Une aberration ! Par ce geste, le ministre Coiteux affaiblit le pouvoir des maires et des conseillers municipaux de gérer leurs villes et leurs villages de façon démocratique, et ils devront être sur un pied d’alerte. »
Conjointement, le SCFP-Québec et la FEESP-CSN demandent aux maires et aux employeurs de prendre la pleine mesure du projet de loi 110 et comprendre que ces dispositions viennent les priver de leur autonomie. Le ministre Coiteux ne se contente plus de s’en prendre aux syndicats, il s’en prend aujourd’hui aux municipalités, qui pourraient bien être tentées de ne pas se prévaloir de ce projet de loi, préférant la paix industrielle à l’affrontement.
Pour les deux organisations syndicales, qui ont signé un protocole de non-maraudage la semaine dernière dans le but de faire front commun contre le gouvernement dans ce dossier, il est difficile de ne pas faire de rapprochement entre le dépôt de l’amendement du ministre Coiteux et le positionnement du conseil municipal de Sorel-Tracy – et de nombreuses municipalités qui sont actuellement en processus de réflexion pour suivre la même voie que celle empruntée par le maire Serge Péloquin et son conseil municipal.
Le SCFP et la FEESP-CSN représentent la presque totalité des employés municipaux du Québec.