Tout comme les autres régions, Montréal se voit imposer par le gouvernement du Québec une coupe majeure dans le soutien à son développement économique. Malgré cette contrainte importante, la métropole du Québec aurait tout intérêt à conserver le maximum d’experts déjà en place, notamment dans les CDEC, qui ont une connaissance approfondie du territoire et de ses entreprises.
« Plusieurs municipalités, dont Laval, ont choisi de conserver les organisations et les experts en développement qui étaient en place pour appuyer leur développement économique local. Montréal devrait s’en inspirer plutôt que de repartir de zéro. Tout comme dans les régions du Québec, plusieurs quartiers de Montréal ont cruellement besoin de leur organisme de développement économique communautaire », estime Véronique De Sève, vice-présidente de la CSN et présidente de la Corporation de développement économique communautaire (CDEC) Centre-Sud/ Plateau Mont-Royal.
Pour le moment, Montréal a annoncé un redécoupage territorial pour réduire de 18 à 6 le nombre d’organisations locales de développement, mais n’a pas encore confirmé quel sera le point d’ancrage de ces organisations à but non lucratif. On ne sait encore rien non plus du nombre d’experts qui pourront œuvrer dans ces points de service pour l’ensemble des arrondissements de Montréal. Si le pacte fiscal est appliqué tel quel, cela signifierait la perte de plus de 50 % de près de 200 spécialistes du développement.
Ce pacte fiscal est cependant transitoire pour une année et fait passer le financement provincial au développement économique local de Montréal de 13 M$ à 7,5 M$. « La Ville pourrait faire plus pour son développement. En injectant 5 M$, il y aurait facilement moyen de conserver l’expertise», insiste Lucie Dufour, secrétaire générale de la Fédération des professionnèles (FP-CSN), qui représente six syndicats de CDEC. Dans un an, il serait même possible de revoir le pacte fiscal et de négocier pour récupérer certaines sommes de Québec.
Ma CDEC, j’y tiens
Conserver des CDEC en place comme point de service peut se justifier pleinement en se basant sur des critères objectifs d’efficacité des structures, d’atteintes des cibles, de complémentarité des services comme ceux reliés à l’employabilité et d’enracinement dans la communauté. « Si on ne se fie pas à des critères objectifs et qu’on repart à zéro, le développement économique de Montréal et le lien avec les communautés en souffriront pendant des années, et ça, on ne peut pas se le permettre, surtout dans le contexte actuel», estime Dominique Daigneault, présidente du Conseil central du Montréal métropolitain CSN. Cette dernière insiste aussi sur l’importance de l’approche de développement économique communautaire propre aux CDEC. Cette vision risque d’ailleurs de se perdre dans les nouvelles structures ébauchées par la Ville si aucun lien avec les CDEC n’est conservé. La gouvernance prévue par la Ville pour ses six nouveaux organismes est en effet presque complètement entre les mains du milieu des affaires.
Les conseils d’administration actuels des CDEC, composés de représentants de divers milieux – d’affaires, communautaire, syndical, institutionnel et de la population – sont représentatifs de leur communauté. C’est cet ancrage local qui permet une participation réelle de la communauté aux orientations, aux actions et aux projets de développement des CDEC, dont certaines existent depuis 30 ans.
85 % de réussite
Plusieurs projets montréalais ont bénéficié au fil des années des conseils de leur CDEC pour démarrer ou croître. Le cinéma Beaubien, le Petit Medley, le Plaza St-Hubert, le développement du canal de Lachine, la revitalisation de la rue Notre-Dame Ouest, la Tohu, Ateliers créatifs de Montréal, Crudessence et plusieurs autres ont bénéficié des conseils et du soutien de leur CDEC locale.
Les entreprises accompagnées ont d’ailleurs un taux de survie après 5 ans de 85 % contre seulement 35 % pour celles qui n’ont pas de soutien. En 2013-2014 seulement, les CDEC de Montréal ont contribué à la création de 498 entreprises et offert un soutien technique à 3388 d’entre elles. Un investissement de 3,7 M$ des CDEC a généré 29 M$ dans le développement de Montréal. Pour cette période, près de 10 000 emplois ont été créés ou maintenus.
Lors de l’évènement Je vois mtl de l’automne dernier, les CDEC avaient d’ailleurs obtenu des félicitations. Denis Coderre y avait d’ailleurs confirmé son intention de collaborer avec les CDEC et les CLD pour le développement économique local. C’est maintenant le temps d’agir.
À propos
Fondée en 1921, la CSN est une organisation syndicale qui œuvre pour une société solidaire, démocratique, juste, équitable et durable. Elle regroupe plus de 325 000 travailleuses et travailleurs.
La Fédération des professionnèles (FP) compte parmi ses membres des personnes occupant un des plus larges éventails de disciplines et professions. Les syndicats qu’elle regroupe représentent plus de 8000 professionnèles, techniciennes et techniciens oeuvrant dans différents secteurs d’activité, dont les CDEC et les CLD.