En grève depuis le début de l’été, les employé-es du Carrefour jeunesse-emploi de la Capitale-Nationale (CJE-CN), un organisme communautaire en employabilité, ne demandaient que deux choses : avoir accès à l’information pertinente sur les finances de leur organisme et ne pas s’appauvrir. Deux demandes auxquelles la partie patronale refuse obstinément de répondre, allant même jusqu’à décréter un lock-out, un fait rarissime dans le secteur communautaire.
« Nous avons abordé les négociations pour le renouvellement de notre convention collective de bonne foi », explique Fanny Lambert, présidente du Syndicat des employé‑es de Carrefour jeunesse-emploi–CSN, en marge d’un rassemblement de solidarité organisé ce midi avec des allié-es. « Lorsqu’on nous a dit que nos demandes salariales étaient irréalistes et que l’organisme n’en avait pas les moyens, nous leur avons proposé d’ouvrir les livres à MCE Conseils, une firme externe, pour en avoir le cœur net », dit-elle. Une proposition qui fut balayée du revers de la main par la partie patronale au nom du « droit de gérance ».
« Mais de quel droit de gérance parle-t-on? », demande Danny Roy, président de la Fédération des professionnèles–CSN à laquelle est affilié le syndicat, « le CJE n’est pas une compagnie cotée en bourse, c’est un organisme communautaire financé par des fonds publics! » Le militant, dont l’organisation syndique plusieurs autres organismes d’employabilité similaires, affirme n’avoir jamais vu ça. « Pour obtenir son financement, le CJE est tenu de respecter un certain nombre de critères dont celui d’entretenir une vie associative et démocratique, il me semble que la transparence financière, la mobilisation et l’implication des employé-es devraient en faire partie, c’est la base », s’exclame Danny Roy.
Le conflit de travail, absolument évitable selon la partie syndicale, révèle une cristallisation malsaine des positions. Par exemple, depuis la dernière rencontre de conciliation, la partie patronale n’a tenté aucune approche auprès de la partie syndicale ni proposé de pistes de solution pour dénouer l’impasse, préférant se camper sur ses positions. « Les gestionnaires se comportent comme s’ils étaient propriétaires d’une entreprise et non comme des dirigeants et des dirigeantes d’un organisme communautaire », estime Louis Hamel, trésorier du Conseil central de Québec–Chaudière-Appalaches–CSN, « refuser d’ouvrir ses livres et décréter un lock-out, il me semble que ça ne fait pas de sens dans le contexte de l’organisme. »
Du côté de la CSN et de ses organisations affiliées, on est unanime sur l’importance de la mission de l’organisme et la volonté d’en arriver à une entente. « C’est certain qu’à la Fédération des professionnèles, on va faire les représentations nécessaires et on va continuer d’appuyer le syndicat dans la négociation avec toutes nos ressources pour que ça débloque à la table, mais ça va prendre de la volonté de l’autre côté aussi, » dit Danny Roy. « De notre côté, le conseil central et ses syndicats affiliés sont à 100 % derrière le syndicat et ses membres, on va déployer toute l’énergie nécessaire pour permettre aux syndiqué-es du CJE-CN de “tenir la minute de plus” », conclut Louis Hamel.
Rappel du contexte
Faute d’un règlement satisfaisant, les membres du Syndicat des employé-es de Carrefour jeunesse-emploi–CSN ont déclenché une grève discontinue le 14 juin dernier. Il aura suffi de six jours de grève pour qu’un lock-out soit décrété le 22 juin. Le lock-out a été levé le 28 juin par l’employeur, mais ce dernier n’a jamais cru bon de d’avoir une entente avec les employé‑es pour leur garantir un retour adéquat et sans représailles. Depuis lors, les 13 employé-es sont en grève générale illimitée.