UQAM

Le savoir dans l’étau de l’austérité

L’austérité libérale, ce n’est pas seulement un exercice d’équilibre budgétaire en accéléré, c’est aussi une volonté d’éliminer les espaces démocratiques de la société. L’UQAM n’est pas épargnée.

Les négociations que mène l’université avec ses professeures et professeurs depuis 2014 montrent comment la nature même de l’institution est menacée. « Ce qui est en jeu, c’est la démocratie. Si l’on cède aux demandes patronales, les départements ne seront plus entre les mains de ceux qui pensent chaque discipline », explique Michèle Nevert, présidente du Syndicat des professeurs et professeures de l’Université du Québec à Montréal (SPUQ–CSN).

L’UQAM est en effet une université qui fait place à la démocratie participative, notamment sur les questions d’orientation des études et des recherches. Or, les demandes patronales visent à remettre plusieurs décisions importantes strictement entre les mains de cadres. Ces derniers ne sont cependant pas au cœur de la recherche et doivent avant tout rendre des comptes sur l’aspect financier. « L’université a une vocation particulière, ce n’est pas une usine », insiste Pierre Lebuis, vice-président du SPUQ et actif au sein du comité de négociation. Pour lui, l’université doit être un « incubateur libre » qui permet de mettre de l’avant des axes de recherche. Les décisions imposées d’en haut, en fonction de créneaux à la mode, ne pourront jamais donner d’aussi bons résultats et certains champs de recherche utiles pour la société risquent d’être négligés. Outre la question démocratique, les compressions budgétaires du gouvernement actuel, qui s’élèvent à près de 300 millions de dollars pour le secteur universitaire, se font rudement sentir. « Il y a des pressions énormes de productivité », affirme Michèle Nevert. L’UQAM veut notamment éliminer toute balise relative au nombre moyen d’étudiants par groupe, qui est déjà en nette progression depuis 2009.

Par ailleurs, comme les fonds disponibles pour la recherche se font de plus en plus rares, notamment en provenance d’Ottawa, la concurrence pour les obtenir est plus féroce. Pour y parvenir, les professeures et les professeurs doivent publier plus d’articles et doivent donc faire de la recherche dans un contexte où l’université ne prévoit pas de fonds spécifiques à cette activité pour chacun d’entre d’eux. Ainsi, pour soutenir les étudiantes et les étudiants des 2e et 3e cycles et payer les frais liés à leurs recherches, les professeurs ont l’option de donner plus de cours. Cette méthode rapporte toutefois relativement peu d’argent et réduit le temps consacré à la recherche.

Cette équation devient encore plus stressante pour les nouveaux professeurs qui n’obtiendront leur permanence qu’après quatre ans. Ils se doivent de « performer », c’est-à-dire de susciter l’intérêt des organismes subventionnaires qui les financent. Cette période de quatre ans, parfois plus pour celles et ceux qui prennent un congé parental, ne suffit pas à l’administration qui réclame maintenant cinq ans. C’est d’autant plus excessif quand on sait que plusieurs profs commencent leur carrière après 40 ans. « Parmi les nouvelles recrues, environ 20 % d’entre elles commencent leur carrière et quittent l’université dans les premières années », indique d’ailleurs Pierre Lebuis.

Une négociation qui stagne

Malgré quelque 42 séances de négociation en date du 2 octobre dernier, les deux parties sont toujours aussi éloignées sur certains points importants qu’elles l’étaient au début des pourparlers. La population étudiante a augmenté de façon importante de 2009 à 2015. Le SPUQ demande notamment l’ajout de professeurs pour diminuer le nombre d’étudiants par groupe. « La partie patronale n’a même pas réagi aux demandes syndicales. On travaille pourtant sur ce document depuis 2011 », s’insurge la présidente du SPUQ. Notons que les professeurs de l’UQAM sont les moins bien payés de toutes les universités au Québec.

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