Que font la plupart des organisations devant ce fléau ? Elles ont une approche centrée sur la réduction des coûts. Paradoxalement, alors que des recherches démontrent qu’elles sont un obstacle au retour au travail, elles multiplient les expertises psychiatriques qui coûtent les yeux de la tête et négligent de se questionner sur les causes de ces absences.
Certains événements de la vie personnelle (maladie d’un proche, difficultés conjugales) peuvent mener à un problème de santé psychologique. Toutefois, des études ont démontré que, pour une proportion très importante de travailleuses et de travailleurs qui se sont absentés en raison d’un problème de santé psychologique, le travail était en cause et qu’il existait un lien direct avec certains facteurs organisationnels (faible reconnaissance, surcharge de travail, faible soutien social, rôle ambigu).
Vers un retour au travail réussi
Pour que le retour au travail se passe dans les meilleures conditions possible et que la travailleuse ou le travailleur puisse demeurer au travail de manière durable, les organisations doivent passer d’une approche médico-administrative (contrôle des coûts engendrés par l’absence, contre-expertise médicale) et adopter un véritable programme de retour et de maintien centré sur le travail1 où tous les acteurs clés ont un rôle à jouer. Une personne doit agir comme « agent de soutien » auprès de la travailleuse ou du travailleur en absence maladie et, par la suite, tout au long du processus de retour et de maintien. Cette personne doit être neutre et détachée des enjeux administratifs. L’agent de soutien doit accompagner le travailleur durant son absence et l’amener progressivement à identifier les facteurs qui ont contribué à son arrêt de travail et à faire part de ses préoccupations quant à son retour. Ces éléments serviront de base à une première discussion avec le supérieur immédiat pour ensuite envisager des pistes de solutions et amener le travailleur et le supérieur immédiat à s’entendre sur un plan de retour au travail. Les représentants syndicaux doivent collaborer en soutenant la personne en absence maladie, en l’informant de ses droits et des ressources disponibles. Ils participent aussi à l’analyse du plan de retour afin qu’il respecte la convention collective. L’agent de soutien en effectuera le suivi et des mesures d’ajustement pourront être apportées au besoin.
La face cachée de la honte
Le regard et les jugements que les autres portent sur nous ne sont pas sans conséquence quand nous faisons face à un problème de santé mentale. Savoir que nous sommes reconnus pour notre travail et soutenus par nos collègues ou notre supérieur facilite le processus de rétablissement et de retour au travail. À l’inverse, les tabous et les préjugés sont des obstacles à un retour réussi. À ce chapitre, le supérieur et les collègues de travail ont un rôle important à jouer. Une dépression, un trouble d’adaptation, ce n’est pas comme un cancer, ça n’attire pas autant de sympathie. Au contraire, ça sème plutôt la controverse ou le doute : « Je fais le même travail, moi, et je ne suis pas malade ». Le syndicat peut jouer un rôle déterminant en participant à la sensibilisation de ses membres aux problèmes de santé psychologique et aux facteurs qui y contribuent. Une chose est certaine, personne n’est à l’abri d’un problème de santé psychologique. Une personne sur cinq en souffrira au cours de sa vie. Nous avons toutes et tous à gagner d’une approche centrée sur la santé au travail. n
1. Cet article est inspiré du guide Soutenir le retour au travail et favoriser le maintien en emploi – Faciliter le retour au travail d’un employé à la suite d’une absence liée à un problème de santé psychologique de Louise St-Arnaud et Mariève Pelletier [RG-758, Montréal, IRSST, 2013, 38 pages]. Téléchargement gratuit.