La Fédération nationale des communications (FNC-CSN) dénonce la décision du gouvernement Trudeau de diriger une plus grande part de ses dépenses publicitaires vers les géants du Web américains Google et Facebook, plutôt qu’à nos médias traditionnels canadiens.
« Nous trouvons déplacé que le gouvernement fédéral envoie plus d’argent des taxes et impôts des contribuables canadiens vers des géants du Web américains qui ne contribuent à peu près pas à la fiscalité canadienne ou à la création d’emplois au pays. Pendant ce temps, nos entreprises médiatiques locales et nationales, qui elles, participent depuis des dizaines, voire des centaines d’années à la santé démocratique de notre pays peinent à survivre dans un univers numérique dans lequel elles sont systématiquement désavantagées », s’insurge Pascale St-Onge, présidente de la FNC-CSN.
« Les GAFA (Google, Amazon, Facebook, Apple) accaparent toujours plus les revenus publicitaires, mais en plus, ils s’enrichissent en utilisant gratuitement, ou contre des sommes dérisoires, les contenus produits à grands frais par d’autres. Pour ajouter l’insulte à l’injure, la plupart d’entre eux ne paient à peu près pas de taxes de vente ici, peu ou pas d’impôts et il est bien connu qu’ils utilisent tous les stratagèmes fiscaux possibles pour échapper au fisc dans les pays où ils font des affaires », de poursuivre madame St-Onge
L’affaiblissement des médias traditionnels n’est pas sans risque pour l’équilibre démocratique de nos sociétés. Les études sur l’impact des réseaux sociaux dans l’élection de Donald Trump est un exemple éloquent de ce qui peut se produire lorsque plus de fausses nouvelles sont propagées que des informations recueillies, fouillées, mises en contexte et produites par des journalistes professionnels. « Imaginons un instant le vide que laissera sans aucun doute l’effondrement annoncé de nos médias d’information si rien n’est fait et les dérives qui risquent d’en découler. Un pays sans médias libres, indépendants, et financièrement viables, c’est une dictature », s’inquiète la présidente de la FNC–CSN.
Lors des consultations de la Ministre Joly sur la refonte de la politique culturelle canadienne ainsi que celles menées par le Comité permanent du patrimoine canadien sur l’information régionale, la FNC-CSN a proposé plusieurs solutions afin d’assurer la pérennité de nos médias traditionnels dans l’univers numérique du 21e siècle.
« Nous ne sommes pas déconnectés de la réalité. Les membres que nous représentons, dont la plupart sont des journalistes syndiqués et indépendants du Québec, sont aussi sur les réseaux sociaux et nous sommes tous conscients que nous devons y rejoindre le public. Ce que nous demandons, c’est un cadre réglementaire et fiscal qui permettra à nos médias d’adapter leurs modèles d’affaires et leurs pratiques. On l’a fait dans les années 90 en instaurant le Fonds des médias qui subventionne la production télévisuelle pour créer une télévision canadienne de qualité, je ne vois pas pourquoi nous ne serions pas capable d’en faire autant pour le numérique. Mais ça prend une volonté politique que nous ne sentons ni du côté québécois, ni du côté canadien », ajoute-t-elle.
Parmi les solutions proposées, la FNC-CSN favorise entre autres les crédits d’impôt sur la masse salariale afin de permettre aux entreprises de presse de maintenir les emplois. Rappelons que depuis cinq ans, plus du tiers d’entre elles ont disparu dans la presse écrite pour des raisons économiques. D’autres mesures doivent également être envisagées de toute urgence par le gouvernement fédéral telle que l’instauration d’une taxe sur la publicité placée en ligne, ou encore des programmes pour soutenir les investissements pour le développement technologique de nos entreprises médiatiques qui souhaitent explorer de nouveaux modèles.
« Les gouvernements trouvent toujours divers moyens de soutenir les secteurs de l’économie qui doivent se renouveler ou encore ceux de l’avenir. Pensons à l’aéronautique ou aux jeux vidéo. Je ne comprends donc pas cette inaction actuelle alors que de nombreux médias locaux ferment, que de moins en moins de journalistes peuvent exercer leur profession et que la qualité de l’information et du droit du public à l’information en souffrent. C’est le bon fonctionnement de nos sociétés qui est en jeu et nos gouvernements semblent préférer se mettre la tête dans le sable plutôt que de se hâter à trouver des solutions », de conclure Pascale St-Onge.
La FNC–CSN compte 6000 membres œuvrant dans les domaines des communications et de la culture. Elle représente les travailleuses et les travailleurs syndiqués de la majorité des médias québécois ainsi que plusieurs au Nouveau-Brunswick et en Ontario.
Fondée en 1921, la CSN est une organisation syndicale qui œuvre pour une société solidaire, démocratique, juste, équitable et durable. À ce titre, elle s’engage dans plusieurs débats qui intéressent la société québécoise. Elle est composée de près de 2000 syndicats. Elle regroupe plus de 325 000 travailleuses et travailleurs réunis sur une base sectorielle ou professionnelle dans huit fédérations, ainsi que sur une base régionale dans treize conseils centraux, principalement sur le territoire du Québec.