Violation des droits humains par la Pacific Rubiales Energy

Le gouvernement canadien doit agir

Le 18 août dernier, la pétrolière canadienne Pacific Rubiales Energy a été jugée coupable de graves violations à plusieurs droits humains par un tribunal populaire colombien. Des représentantes et représentants d’organisations sociales canadiennes et québécoises étaient présents lors du dépôt des preuves en Colombie et demandent au gouvernement canadien de prendre ses responsabilités à cet égard.

Le Canada au premier rang

La tenue de ce tribunal visait à juger le comportement de certaines multinationales étrangères présentes en Colombie. Leila Celis, professeure en sociologie à l’UQAM et membre du Projet Accompagnement Solidarité Colombie (PASC), déclare : « Quand on sait que Pacific Rubiales Energy est la plus importante pétrolière étrangère en Colombie et que la majorité des crimes et violations aux droits humains imputables au conflit armé colombien se concentrent dans les régions d’investissements miniers et pétroliers, on ne peut que se questionner sur le rôle des entreprises canadiennes ».

L’accord de libre-échange entre le Canada et la Colombie (l’ALECC) est entré en vigueur en 2011. « Des sources officielles colombiennes stipulent que 87 % des réfugié-e-s internes proviennent des régions d’exploitation pétrolière et minière, alors que 78 % des crimes commis contre les syndicalistes et 89 % des violations aux droits des peuples autochtones y sont aussi perpétrés. Tout cela malgré le fait que le gouvernement canadien et les entreprises canadiennes affirmaient que l’ALECC contribuerait à faire diminuer les violations des droits humains », rappelle Constance Vaudrin du Comité pour les droits humains en Amérique latine (CDHAL) et du Groupe d’orientation politique sur les Amériques du Conseil canadien de la coopération internationale. « Sur place, ce n’est pas ce que nous avons vu et entendu ».

Autochtones déplacés, eau potable contaminée et hommes armés en quantité

Un des cas les plus visibles de violation des droits de la part de Pacific Rubiales est celui du peuple autochtone Sikuani. « Sans consultation préalable, laquelle est pourtant prévue dans la législation colombienne, les Sikuani ont été déplacés de leurs territoires ancestraux. De plus, un barrage de contrôle est installé sur la route publique menant au champ pétrolifère de Pacific Rubiales, mais également près de différents villages et réserves autochtones », mentionne Amir Khadir, député de Québec Solidaire. L’armée et les forces de police colombiennes surveillent ce barrage. Embauchant environ 14 000 travailleurs, Pacific Rubiales a recours à 6000 hommes armés (police, armée et forces de sécurité privée) pour protéger ses installations. « On ne peut qu’imaginer l’importante militarisation de cette région peu peuplée ! », s’exclame le député.

Conditions de travail déplorables et assassinat d’un syndicaliste

Un accord de coopération dans le domaine du travail entre le Canada et la Colombie, entré en vigueur en même temps que l’ALECC, stipule que les deux États doivent incorporer et protéger les principes et les droits reconnus par l’Organisation internationale du travail (OIT), tels que la liberté d’association et le droit de négociation collective. « Or, les travailleurs ne peuvent s’affilier au syndicat de leur choix et continuer à travailler pour la pétrolière. Ces pratiques vont clairement à l’encontre du droit du travail et syndical », dit Guy Martin, de la Confédération des syndicats nationaux (CSN). « Non seulement les travailleurs affiliés au syndicat pétrolier national font face à des menaces et à de l’intimidation, mais l’un d’entre eux a aussi payé de sa vie », continue-t-il en faisant référence au meurtre de Milton Parra, militant syndicaliste, en décembre 2012. « Trois jours après la tenue de l’audience sur Pacific Rubiales Energy, un autre leader syndical et sa famille ont reçu des menaces de mort. C’est très inquiétant », a-t-il aussi souligné.

Responsabilité de l’État canadien

Aucun cadre réglementaire n’existe pour contrôler les activités des entreprises canadiennes à l’étranger. Celles-ci sont tenues de respecter les lois nationales, mais rien n’est mis en place pour s’assurer qu’elles le fassent réellement ou qu’elles respectent les conventions internationales. Alain Deneault, auteur de Paradis sous terre et de Noir Canada – ouvrage retiré des librairies à la suite de pressions judiciaires de la part de de la minière canadienne Barrick Gold – insiste pour qu’« une législation contraignante soit votée afin d’exiger des entreprises enregistrées ici qu’elles respectent les engagements internationaux du Canada en matière de droits humains. L’État doit enquêter sur les nombreux cas d’abus et, le cas échéant, imposer des sanctions aux sociétés concernées », conclut-il.

La délégation canadienne était constituée de représentantes et représentants de neuf organisations : le parti Québec Solidaire, la Confédération des syndicats nationaux (CSN), le Syndicat canadien des communications, de l’énergie et du papier (SCEP), l’Alliance de la fonction publique du Canada (AFPC), Groupe d’orientation politique sur les Amériques du Conseil canadien de la coopération internationale (GOPA-CCCI), le Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes (STTP), le Comité pour les droits humains en Amérique latine (CDHAL), CASA – Toronto (Colombia Action Solidarity Alliance) et le Projet Accompagnement Solidarité Colombie (PASC).

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