Cette année, la commémoration de la tragédie survenue à l’École polytechnique de Montréal, le 6 décembre 1989, revêt un caractère particulier. Les chiffres parlent d’eux-mêmes. À ce jour, 25 féminicides ont été commis au Québec en 2024[1]. Un chiffre effarant, preuve que la violence envers les femmes ne s’atténue pas.
Il y a 35 ans, devant la terrible tragédie, les médias n’ont pas parlé d’acte antiféministe ; ils ont plutôt brossé le portrait d’un tueur brisé psychologiquement. En 1989, le terme féminicide tenait alors du jargon universitaire. Pourtant, quelques heures avant les meurtres de ses 14 victimes, Marc Lépine avait rédigé un manifeste dans lequel il racontait qu’il en voulait aux féministes d’avoir gâché sa vie. Dans la liste rouge qui concluait sa lettre, 15 noms de femmes apparaissaient, dont celui de Monique Simard, alors vice-présidente de la CSN.
C’est seulement en 2019 que la Ville de Montréal a modifié la plaque commémorative de l’événement, pour enfin y inscrire : « 14 femmes assassinées lors d’un attentat antiféministe ». Trente ans se sont écoulés avant qu’il soit admis que ces victimes de la tragédie étaient mortes précisément parce qu’elles étaient des femmes.
Féminicides et influences idéologiques
Le succès de certains influenceurs masculinistes prônant différentes formes de contrôle sur les femmes n’est pas à prendre à la légère. Cette idéologie antiféministe aurait la mission de défendre les droits des hommes dans une société maintenant dominée par les femmes. Ce mouvement, qui se cristallise particulièrement à travers les médias sociaux, nuit sans contredit à l’égalité entre les femmes et les hommes, ce qui n’est pas rassurant. La lutte contre les stéréotypes sexistes et sexuels constitue pourtant le premier pas vers cette égalité. Pour éliminer la violence envers les femmes, il faut à tout prix défendre les principes et les rapports égalitaires.
Avec Donald Trump qui prendra la tête de la superpuissance voisine, la misogynie politique dans nos sociétés ne semble pas près de s’estomper. Pour plusieurs adhérents à l’antiféminisme, les femmes deviennent les boucs émissaires de tous les maux, individuels comme sociaux.
Ne baissons pas les bras
Pour que la violence cesse, la Confédération des syndicats nationaux déploie diverses campagnes de prévention et de sensibilisation auprès de ses membres. Le Comité de la condition féminine–CSN célèbre ces jours-ci son 50e anniversaire de fondation. Cinquante ans à se battre pour les droits des femmes et contre toutes les formes de violence commises envers elles.
À quand une société où hommes, femmes et toutes personnes de la diversité de genres pourront collectivement questionner nos modèles politiques et économiques pour qu’enfin, nous cessions de reproduire des inégalités ?
Le 6 décembre prochain, portons le ruban blanc.
Lettre publiée dans Le Devoir