Le mot de la présidente
Si c’est au cours des années 1800 que le syndicalisme québécois apparaît dans l’illégalité, c’est au commencement du siècle suivant qu’il se consolide. Naît alors la première grande centrale syndicale au Québec (et au Canada), la vôtre, qui adoptera son nom définitif en 1960 : la CSN.
Pourquoi le syndicalisme ? Il y a 100 ans, les conditions de travail étaient rudes. Les ouvrières et les ouvriers, bousculés par l’industrialisation et la croissance rapide de l’économie, œuvraient souvent dans des conditions insoutenables, 14 h par jour, 6 jours semaine, afin de respecter le rythme de production des entreprises. Des enfants travaillaient en usine pour aider leur famille à survivre, des femmes aussi. Et plusieurs en mouraient. Mais les choses ont changé. La CSN s’est battue pour la journée de 8 h, pour des mesures de santé et de sécurité au travail, pour de meilleurs salaires. Et la société a évolué.
Au fil du temps, votre centrale syndicale a lutté pour des enjeux cruciaux : assurance-maladie, lois sur l’assurance automobile, sur la santé et la sécurité du travail et sur l’équité salariale, mise en place des CPE, régime québécois d’assurance parentale et plus encore. Toutes des mesures qui ont façonné le Québec d’aujourd’hui.
En toute pertinence
Il est bien connu que les syndiqué-es gagnent de meilleurs salaires que les non-syndiqué-es occupant des fonctions identiques dans une entreprise. On sait aussi que leurs avantages sociaux sont plus nombreux et les protègent mieux. Comme le disait l’ancien président de la CSN Gérard Picard, « les travailleurs, dans l’histoire, n’ont jamais reçu de cadeaux. Ce qu’ils ont, ils l’ont arraché par la force des poignets. » C’est encore la triste réalité dans la plupart des domaines.
Alors que l’inflation bat des records, que trop de gens peinent à combler leurs besoins de base, bien des patrons offrent des salaires ridicules, en pleine période de rareté de main-d’œuvre. En fait, les emplois ne sont pas rares : ce sont les bons postes qui manquent. Le secteur public a le plus grand patron du Québec, le gouvernement. Celui-ci propose des miettes pour ses centaines de milliers d’employé-es en santé et services sociaux, en éducation et en enseignement supérieur. Alors que les réseaux publics sont en pièce. Où est le respect ?
La CSN est la centrale syndicale la plus combative. Avec le grand nombre de titres d’emploi qu’elle représente, elle forme un véritable microcosme de la société. Cette pluralité syndicale est porteuse de transformations sociales, à condition de s’unir et de parler d’une seule voix. Plusieurs secteurs d’activités (culture, technologies, restauration, commerce de détail et j’en passe) ont besoin de ce moteur pour forcer le respect de l’employeur. La solidarité ne veut pas seulement dire se serrer les coudes au sein d’une même organisation : c’est le faire entre syndiqué-es de domaines différents et pour les non-syndiqué-es, qui goûtent aussi aux retombées des luttes menées par la CSN et par ses membres.
Se poser des questions et avancer
Le slogan Solidaire depuis 1921, que vous voyez en une, accompagnera maintenant le logo de la CSN et viendra ainsi positionner qui l’on est et d’où l’on vient. Avec ce numéro spécial à saveur de 100e anniversaire qui marque le retour du Point syndical, nous posons notre regard sur le passé, sur le présent et sur l’avenir. Les combats pour lesquels nous nous levons chaque matin sont multiples : système de santé vraiment public, loi anti-briseurs de grève au fédéral, préservation des services et des programmes sociaux, protection du français, santé-sécurité au travail, augmentation significative du salaire minimum, politique de développement durable et transition juste pour les personnes en emploi, politique industrielle, mesures d’inclusion en milieu de travail et lutte contre le harcèlement et programmes de formation en continu. La route syndicale ne sera jamais un long fleuve tranquille. Nous devons continuer à nous poser des questions, à faire évoluer nos pratiques et nos réflexions. Bien que le Québec ait le plus haut taux de syndicalisation en Amérique du Nord – 4 travailleurs sur 10 y sont syndiqués – il reste encore beaucoup de salarié-es à soutenir afin qu’un maximum de personnes façonnent à leur manière un monde du travail meilleur.