Peut-on agir sur le plan syndical sans mémoire historique ? Peut-être, mais les avancées marquantes des luttes syndicales sont la plupart du temps le fruit d’une lecture actualisée des leçons du passé.
Au centre de documentation et des archives de la CSN, Marc Comby est convaincu que les organisations syndicales gagnent à investir dans la conservation de leurs archives. Récemment, l’homme, bardé d’une seconde maîtrise – celle-là en histoire – a mis tous ses talents et toute son énergie à nourrir le livre de son confrère Yves Desjardins, Le Québec à l’ouvrage, lancé à l’occasion du centenaire de la CSN.
Les jeunes générations ont parfois tendance à tenir bien des choses pour acquises, souligne l’archiviste. « Le jeune qui entre à l’usine avec un bon salaire ne sait pas toujours que son grand-père crevait de faim dans la même usine. Il a fallu qu’il se batte pour obtenir des conditions de travail décentes. »
« Pour le centenaire de la CSN, on a voulu raviver notre mémoire historique afin que les jeunes prennent conscience que ce qu’ils ont, ils le doivent à des gens qui, avant eux, ont bossé fort et ont milité activement. La mémoire historique sert à perpétuer et à consolider l’institution et l’action syndicale. »
La façon de conserver les archives diffère d’une centrale syndicale à l’autre. « Les archives des différentes organisations en disent long sur leur propre histoire », explique-t-il.
« À la CSN, nos origines sont catholiques. Du point de vue des archives, c’est notre avantage. Les aumôniers savaient parler français. Ils savaient écrire et étaient minutieux. Ils notaient tout, ils conservaient tout. On a donc des archives fascinantes et des milliers de documents, dont nos procès-verbaux. »
Le dernier inventaire du centre de documentation fait état de 141 fonds d’archives de la CSN, des conseils centraux et des fédérations, d’une quarantaine de journaux et d’un nombre incalculable de procès-verbaux et de mémoires numérisés depuis 1921. Des pans entiers de l’histoire du Québec moderne accessibles aux militantes et aux militants, aux médias ainsi qu’aux chercheuses et aux chercheurs universitaires.
À elle seule, la photothèque de la CSN compte plusieurs dizaines de milliers de photos argentiques, dont la majorité a été numérisée. Celles-ci n’ont toutefois pas encore été entièrement indexées ni cataloguées. « Il y a encore du travail pour des années. Lentement mais sûrement, le centre continue à mettre à la disposition des membres documentation et archives », conclut Marc Comby.