La Fédération nationale des communications (FNC-CSN) et l’Association des journalistes indépendants du Québec (AJIQ) unissent leur voix pour exiger de Groupe TVA qu’il respecte les contrats de base que les pigistes ont signés avec TC Média, si jamais le Bureau de la concurrence lui permettait effectivement d’acquérir 15 magazines appartenant à TC Média.
Après une large mobilisation menée par les journalistes indépendants au printemps 2013, l’AJIQ avait réussi à faire reculer TC Média dans son intention d’imposer à ses pigistes un nouveau contrat qui leur ferait perdre des droits d’auteur et, surtout, leur droit moral (la paternité de leurs œuvres). Les pigistes sortaient enfin gagnants d’une bataille avec un grand groupe de presse. Depuis 2009, Quebecor utilise le contrat le plus abusif du milieu au Québec : cession de certains droits d’auteur, cession du droit moral, utilisation des œuvres à n’importe quelle fin, sur n’importe quelle plateforme, dans n’importe quelle langue, dans n’importe quelle technologie présente et à venir, pour la fin des temps et dans l’univers entier, sans avoir à verser de redevances additionnelles. La FNC et l’AJIQ sont donc très inquiètes de l’acquisition prochaine de 15 magazines de plus dans le giron de Quebecor.
« Déjà que les journalistes indépendants n’ont pas vu leur tarif de base augmenter depuis plus de 25 ans, si la transaction est autorisée par le Bureau de la concurrence, voilà 15 autres magazines qui risquent de violer les droits d’auteur de nos membres s’ils appliquent la politique de leur nouvel acquéreur. Avec toutes ces transactions qui concentrent les médias entre les mains des mêmes propriétaires, ça devient vraiment difficile de trouver des donneurs d’ouvrage qui offrent des conditions de travail décentes pour les pigistes », dénonce Simon Van Vliet, vice-président aux affaires stratégiques et juridiques de l’AJIQ et porte-parole.
« Pourtant, nous sommes de plus en plus de pigistes en information au Québec. Avec toutes les compressions qui affectent les différents médias, beaucoup de salarié-es ont été remplacés par des contractuel-les et c’est toujours plus difficile pour les journalistes indépendants de vivre de la pige. C’est l’avenir du métier qui est en péril et en bout de ligne, le droit du public à la pluralité des voix et à l’information de qualité », ajoute-t-il.
Pour la secrétaire générale de la Fédération nationale des communications, Pascale St-Onge, cela ne fait que confirmer qu’il est urgent que le gouvernement intervienne et qu’il instaure enfin pour les journalistes indépendants une loi similaire à celle sur le Statut de l’artiste, qui permettrait aux pigistes de négocier collectivement des conditions de pratique minimales.
« Cela fait 25 ans qu’on milite aux côtés de l’AJIQ pour qu’elle puisse être reconnue au sens de la loi en tant qu’association pouvant légalement négocier des contrats de base pour leurs membres, observe Pascale St-Onge. En ce moment, tout le pouvoir est du côté des donneurs d’ouvrage et ils abusent vraiment de cette situation. Le monde de l’information évolue à la vitesse grand V sans que personne ne s’en occupe. Combien de transactions, de compressions et de fermetures ça prendra encore avant que le gouvernement s’aperçoive qu’il y a de graves problèmes avec l’industrie médiatique et qu’on ne peut plus fermer les yeux? Présentement, les rois des médias font ce qu’ils veulent et c’est loin d’être dans l’intérêt du public ou des gens qui travaillent pour eux. »