La Confédération des syndicats nationaux (CSN) a présenté ce matin, à l’occasion d’une conférence préparatoire devant la Commission des relations du travail, une requête afin de faire déclarer inconstitutionnelles certaines dispositions sur les services essentiels contenues à l’article 111.10 du Code du travail.
Cet article prévoit que seuls les salarié-es visés par l’unité de négociation en grève doivent être mis à contribution dans l’établissement des services essentiels, excluant donc les cadres et les gestionnaires des établissements. Or, dans un jugement récent concernant une restriction semblable dans la loi de la Saskatchewan, la Cour suprême écrit que « l’objet manifeste du par. 7(2) est de faire en sorte que les gestionnaires et les administrateurs non syndiqués n’aient pas à subir les inconvénients et les pressions auxquels ils seraient normalement exposés lors d’un arrêt de travail. Or, si des membres compétents du personnel sont disponibles pour fournir les services requis, il importe peu qu’il s’agisse de gestionnaires ou d’administrateurs… ».
Par conséquent, ces restrictions font en sorte de réduire le nombre de salarié-es pouvant légalement faire la grève, restreignant sensiblement la portée de ce droit, lui-même protégé par la constitution. Pour la CSN, les cadres et les gestionnaires compétents doivent être pris en compte dans la détermination du personnel nécessaire au maintien des services essentiels. Quatre syndicats CSN sont sensibles à cette cause, car leurs employeurs respectifs ont choisi de contester la liste de services essentiels qu’ils avaient préparée. À l’ issue de la conférence préparatoire de ce matin, la CRT devra convoquer ultérieurement les parties afin de débattre de la requête, sur le fond.
Il s’agit de la première contestation, au Québec, des dispositions concernant les services essentiels à la suite de cette importante décision de la Cour suprême dans le dossier de la Saskatchewan. Pour la vice-présidente de la CSN, Francine Lévesque, il est très important de clarifier la situation. « Les syndicats ont toujours respecté un code d’éthique strict lorsqu’ils devaient recourir à la grève, et ce, même avant que la loi n’instaure un dispositif de services essentiels. Jamais un syndicat ne mettrait sciemment en danger la santé et la sécurité de la population, surtout que tout le travail de ses membres ne vise qu’à offrir des services de qualité à la population. Nous avons toujours considéré que ces dispositions servent surtout à dénier le droit de grève aux salarié-es et à faire pencher le rapport de force davantage vers l’employeur en imposant aux syndiqué-es des obstacles qui n’ont rien à voir avec la protection du public. Nous saisissons ici l’occasion de protéger un peu mieux ce droit, le droit de grève, qui est fondamental pour notre démocratie ».