À l’occasion de l’audience de la Commission nationale d’examen sur l’assurance-emploi, les quatre organisations syndicales CSD, CSN, CSQ et FTQ ont présenté, par le biais d’un mémoire conjoint, un ensemble de propositions pour que le régime retrouve sa vocation d’origine en protégeant efficacement les travailleuses et les travailleurs victimes du chômage.
La Commission a été mise sur pied dans le sillage de la réforme de l’assurance-emploi du gouvernement Harper, décriée par une large coalition de syndicats et d’organismes. Cette réforme accentuera l’insécurité et la précarité sur le marché du travail, en plus de frapper de plein fouet certaines industries.
Une réforme qui aggrave le problème
« S’il y a une région défavorisée en ce qui a trait à la précarité des emplois, c’est bien la Gaspésie-Îles-de-la-Madeleine. Cette région, en fait, nous rappelle la nécessité criante d’avoir un véritable régime d’assurance qui protège réellement les personnes contre la perte d’emploi en leur garantissant un revenu de remplacement décent pendant les périodes difficiles », a commenté Jean-Luc Harel, conseiller syndical à la CSD.
Alors qu’en 1989, 83,8 % des chômeuses et chômeurs avaient accès à des prestations régulières, ce taux est passé à 43,9 % en 1997, soit une baisse de 39,9 points de pourcentage. Depuis cette période, la couverture n’est pas allée en s’améliorant. En 2011, le pourcentage des personnes admissibles est passé à 41,3 %, atteignant ainsi son plus bas niveau depuis la fin des années 1990.
« En Gaspésie et aux Îles-de-la-Madeleine, la réforme a des conséquences désolantes tant dans le secteur de la santé et des services sociaux qu’en éducation. Plusieurs de nos membres, même lorsqu’ils obtiennent un contrat à temps partiel, doivent compenser par les prestations d’assurance-emploi afin de s’assurer un revenu décent. Et cette réforme est loin de toucher seulement les syndiqués. Dans notre région, chaque famille est importante et lorsque l’une d’elles doit quitter la région pour trouver un meilleur revenu, les employés des services publics écopent : des postes sont supprimés dans les établissements d’enseignement et dans les services de santé, etc. Dans ce cercle vicieux, la région est de nouveau privée d’expertise et de services, ce qui empêche de nouvelles familles de s’y établir. Cette réforme de l’assurance-emploi contribue à faire tourner la roue de l’exode vers les grands centres et de l’appauvrissement des régions », a déclaré Yves-Daniel Garnier, président du Syndicat du personnel enseignant du Cégep de Gaspésie et des Îles à Gaspé (CSQ).
Des changements qui s’imposent
Les quatre organisations demandent au gouvernement d’apporter plusieurs changements à l’assurance-emploi pour mieux protéger les personnes en situation de chômage. Alain Harrisson, conseiller régional pour la Fédération des travailleuses et travailleurs du Québec (FTQ) :
« L’importance de l’assurance-emploi pour la Gaspésie et les Îles-de-la-Madeleine est capitale. Le travail saisonnier comme la pêche, la foresterie, la construction et l’agriculture est partie intégrante de notre activité économique. En 2012, 13,1% des emplois de la région provenaient de ces secteurs. Ce revenu d’appoint, payé par les travailleurs et travailleuses ainsi que par les employeurs et employeuses, est essentiel pour que la population puisse vivre décemment toute l’année. L’assurance-emploi doit être accessible et efficace pour que notre région demeure vivante et dynamique, c’est aussi simple que ça! », a-t-il expliqué.
Les questions de l’emploi convenable et de l’abolition du projet-pilote sur le « trou noir » ont également été évoquées par le président du Conseil central Gaspésie-Îles-de-la-Madeleine, Jacques Mimeault : « En plus des effets de la réforme comme l’élimination de l’emploi convenable, qui accordait au prestataire un délai raisonnable pour rechercher un poste correspondant aux conditions de son emploi précédent, l’abolition du projet pilote no 15, qui fait en sorte que les travailleuses et travailleurs subissent la période « trou noir », nous frappe de plein fouet. Durant cette période, les bénéficiaires de l’assurance-emploi ne perçoivent plus leurs prestations arrivées à terme et attendent la reprise de la saison de travail. Or, ils continuent à devoir assumer leurs dépenses d’épiceries, d’Hydro, de chauffage et de téléphone, pour ne nommer que celles-là.
La Revue de l’Emploi d’Emploi-Québec offrait en ligne 160 emplois pour le mois de juin, et ce, pour l’ensemble de la Gaspésie et des Îles et tout secteur confondu. D’ici quelques semaines, les secteurs de l’hôtellerie, de la transformation halieutique, de la sylviculture et de la pêche, entre autres, termineront leurs saisons. Comment peut-on penser que ces travailleurs pourront se retrouver un autre emploi dans la semaine suivante? Ce n’est tout simplement pas réaliste », a-il souligné.
Les quatre organisations syndicales enjoignent le gouvernement à prendre ses responsabilités en ce qui a trait au mode de financement du régime, auquel seuls les travailleuses et les travailleurs et les employeurs sont appelés à participer à l’heure actuelle.
« En 1990, malgré une vaste opposition, le gouvernement canadien a cessé de participer financièrement au régime. Nous avons toujours dénoncé ce désengagement de l’État et exhortons le gouvernement à assumer de nouveau la part des dépenses qui lui revient », ont finalement déclaré les représentants de la CSD, de la CSN, de la CSQ et de la FTQ en concluant :
« Si le gouvernement fédéral persiste et signe dans son entreprise de réduction des droits des chômeuses et des chômeurs et refuse de bonifier le régime d’assurance-emploi dans le sens de nos propositions, nous exigerons la création d’un régime québécois d’assurance-chômage, dans la mesure où les paramètres de ce nouveau régime en matière de couverture, de financement et de gouvernance répondent aux revendications de nos organisations. »