La Confédération des syndicats nationaux (CSN) veut ici rectifier les faits rapportés dans la chronique de l’économiste Pierre-Yves McSween intitulée « La bulle financière des CPE », diffusée dans La Presse du 8 février. D’entrée de jeu, l’auteur pose la question de la pertinence des CPE strictement en termes comptables et financiers. C’est ignorer le fait que les services éducatifs de qualité offerts en CPE, tout comme en milieu familial régi d’ailleurs, ont un impact positif sur le développement des enfants et sur leur bien-être. L’impact est d’autant plus important pour les enfants de milieux défavorisés.
La CSN a souvent dénoncé et continue de décrier le choix du gouvernement qui, par ses mesures fiscales et tarifaires récurrentes, encourage ouvertement les parents à recourir aux garderies commerciales pour des motifs strictement financiers plutôt qu’au réseau des services de garde régi et subventionné. La qualité des services éducatifs devrait être leur critère le plus important. La plus récente enquête Grandir en qualité a démontré, une fois de plus, que les services offerts en CPE sont de meilleure qualité que ceux offerts en garderies commerciales.
Bien que les CPE ne fassent pas partie du réseau public de l’éducation, nous considérons à la CSN qu’ils ne doivent pas pour autant être considérés comme de simples PME fabriquant des produits de consommation. L’éducation des enfants ne doit donc pas être traitée comme une marchandise. L’impact de services de piètre qualité peut entraîner des effets négatifs à long terme sur le développement d’un enfant. Plusieurs études convergent en ce sens.
Par ailleurs, l’article de Pierre-Yves McSween suggère que les conventions collectives des travailleuses et des travailleurs empêchent des CPE d’optimiser leur gestion des ressources. Or, les conventions collectives respectent en tout point la Loi sur les services de garde éducatifs à l’enfance et son règlement. D’ailleurs, sans ces conventions collectives, les travailleuses seraient maintenues dans des conditions de travail indécentes, ce qui génèrerait dans les CPE un roulement élevé de personnel contraire aux intérêts des enfants, comme c’est le cas dans les garderies commerciales.
Actuellement, plusieurs CPE regroupent les enfants en début et en fin de journée alors qu’ils sont moins nombreux. Par contre, on ne peut pas trimballer les enfants d’un groupe à l’autre tout au long de la journée pour s’assurer du ratio maximal. C’est faire preuve d’une méconnaissance des services éducatifs et des liens d’attachement que de penser ainsi.
Les CPE sont le prolongement des garderies communautaires créées et gérées par les parents et les travailleuses. Ce modèle a fait ses preuves. Y a-t-il place à amélioration ? Bien sûr ! La formation aux nouveaux administrateurs devrait être largement offerte et promue. Des formations sur les enjeux spécifiques de certains CPE devraient aussi être disponibles. La présence de travailleuses au CA devrait être obligatoire, en raison de leur connaissance fine et complémentaire à celle des parents.
Mais pour bien fonctionner, les CPE ont également besoin d’un financement adéquat. Les CPE font partie d’un programme national de services éducatifs à la petite enfance, mis en place depuis une vingtaine d’années, dont le financement est versé aux prestataires de services et non aux parents. D’ailleurs, l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) recommande ce type de financement pour les services de garde. Pourtant, le gouvernement a imposé depuis 2014 des compressions budgétaires de plus de 300 millions de dollars dans le réseau des services de garde en raison de ses politiques d’austérité. Il a en outre mis fin au tarif universel et décrété des hausses récurrentes variant en fonction du revenu familial, forçant les familles à assumer davantage pour les services de garde éducatifs.
Monsieur Pierre-Yves McSween, vous vous inquiétez pour les services de garde en CPE ? Il serait peut-être temps de jeter un coup d’œil sur les impacts des politiques d’austérité du gouvernement.
– Véronique De Sève, vice-présidente de la CSN