La divulgation aujourd’hui du texte du Partenariat transpacifique (PTP) confirme qu’il s’agit d’un accord dommageable qui sert les intérêts des grandes entreprises aux dépens des emplois au Canada et de notre souveraineté. Il est vital que le gouvernement libéral maintenant au pouvoir négocie des modifications. Les deux plus grands réseaux d’organisations sociales luttant au Canada pour des accords commerciaux justes et équitables exigent du premier ministre Justin Trudeau qu’il respecte son engagement électoral sur le PTP de « tenir un débat public approfondi et ouvert au Parlement pour faire en sorte que les Canadiennes et Canadiens soient consultés ».
Le Réseau pour un commerce juste / Trade Justice Network (RCJ-TJN) et le Réseau québécois sur l’Intégration continentale (RQIC), dont est membre la CSN, somment le gouvernement de réaliser une étude d’impact en profondeur pour s’assurer que le PTP serve l’intérêt public. « Nous sommes tous en faveur du commerce et des échanges; le mode de vie de millions de Canadiennes et Canadiens en dépend. Mais il doit s’agir d’un commerce juste et équitable – et il doit être bon pour le Canada », a affirmé Martin O’Hanlon, Président au Canada du Syndicat des communications d’Amérique (SCA-CWA) et porte-parole pour le RCJ-TJN.
« Il est vital pour notre économie et pour notre démocratie qu’ait lieu un débat réellement ouvert sur le PTP et que le gouvernement montre sa volonté politique d’y apporter des révisions. » Larry Brown, co-président du RCJ-TJN soutient que les décisions du gouvernement doit reposer sur des faits et des analyses d’impact rigoureuses. « Une révision indépendante et impartiale de l’accord est nécessaire », affirme M. Brown. « Nous savons qu’il y aura des pertes d’emplois. Quels seront les bénéfices? On ne peut être appelé à accepter un accord de libre-échange qui transformera notre économie sans que toute l’information soit disponible, uniquement sur la base d’une rhétorique joviale », a-t-il ajouté. Le texte vient à peine d’être rendu public, mais il est déjà clair que le PTP constituerait un désastre pour plusieurs travailleur-euse-s et leurs familles, ainsi qu’une menace pour la vie démocratique au pays.
Il est pressenti que l’accord conduirait à la perte de milliers d’emplois au Canada et forcerait nos travailleuses et travailleurs à entrer en compétition avec des salaires de 65 cents l’heure au Vietnam ou des conditions de travail proches de l’esclavage en Malaisie. L’accord permettrait aussi aux entreprises transnationales de piétiner la souveraineté du Canada en leur octroyant le privilège de poursuivre des gouvernements devant des tribunaux d’arbitrage commercial opaques -contournant nos cours de justice- si elles estiment être lésées et perdre des profits à cause de nos normes de travail, de santé, de protection de l’environnement, entre autres. « Le Canada est présentement poursuivi pour plus de 6 milliards de dollars en vertu de l’ALÉNA et du mécanisme Investisseur-État (RDIÉ) », a tenu à souligner Pierre-Yves Serinet, porte-parole du RQIC.
« Le PTP approfondit les restrictions au droit de réguler pour l’intérêt public. Le RDIÉ limite la capacité des gouvernements de faire face aux changements climatiques, par exemple, le mécanisme doit être retiré des accords de libre-échange afin de maintenir la marge de manœuvre politique nécessaire à la mise en œuvre de mesures solides face aux défis environnementaux », a affirmé Pierre-Yves Serinet, alors que le Premier ministre Trudeau se prépare à participer à la Conférence sur les changements climatiques COP21 à Paris où il a signalé son intention de refaire du Canada un acteur engagé. Il est inquiétant, et très parlant, que le PTP ait été négocié en secret avec une participation significative de plus de 600 lobbyistes du monde des affaires, tandis que les dirigeant-e-s syndicaux, les environnementalistes et autres experts sociaux n’ont pas été consultés. Même les parlementaires n’ont pas eu voix au chapitre.
L’accord contient d’autres problèmes sérieux qui méritent un débat:
- Le gouvernement pourrait être forcé de vendre ses Sociétés de la Couronne, comme Postes Canada.
- Les gouvernements fédéral, provinciaux et municipaux ne pourraient plus garantir que les contrats gouvernementaux soient accordés à des entreprises canadiennes ou locales, ce qui pourrait avoir un effet dévastateur sur certaines communautés.
- Les nouvelles protections accordées aux grandes entreprises pharmaceutiques coûteront annuellement des milliards de dollars aux Canadiens.
- On impose de nouvelles limites sur notre capacité à décider de nos propres règles en matière d’utilisation d’internet et de protection de la vie privée.
- L’accord n’inclut pas de mécanismes contraignants pour faire respecter les normes en matière de droits du travail et de protection de l’environnement.
Une entente de principe a peut-être été signée, mais il ne s’agit pas encore d’un accord final. Plusieurs obstacles se dressent, dont une adoption au Congrès des États-Unis, sans compter la présence de campagnes citoyennes vigoureuses contre le PTP dans plusieurs pays. « Il est maintenant temps pour les Canadiennes et les Canadiens de dire à leurs politiciens ce qu’ils n’aiment pas du PTP et que le Parlement ne devrait pas le ratifier sans que des modifications fondamentales puissent être apportées », a conclu M. Brown. « Nous devons protéger les emplois au Canada et le principe de souveraineté. Nous devons nous assurer que tous les pays membres du PTP rencontrent les exigences au plan démocratique, les normes des droits du travail, de la santé et de l’environnement. »