Dans la foulée de la publication, par l’Ordre des infirmières et infirmiers du Québec (OIIQ), de sa planification stratégique 2020-2023, la Fédération nationale des enseignantes et des enseignants du Québec (FNEEQ–CSN) réagit aujourd’hui afin de rétablir les faits dans un débat qui dure depuis trop longtemps : le DEC en Soins infirmiers est et doit demeurer qualifiant.
Encore une fois, l’Ordre réclame que le diplôme qualifiant à la profession infirmière soit le baccalauréat universitaire plutôt que le DEC. Il est utile de rappeler que les arguments principaux brandis par ce dernier s’appuient sur une étude comparative des formations en soins infirmiers offertes dans différents pays du monde qui ne tient pas compte de la réalité des cégeps propre au Québec ni de la teneur de ces formations. Malgré les décisions des gouvernements précédents ayant maintenu le DEC qualifiant, l’OIIQ revient à la charge avec cette idée.
Pourtant, le ministère de l’Enseignement supérieur prescrit actuellement pour cette formation 2 805 heures de cours, dont 1 110 heures de laboratoire et 1 035 heures de stage en milieu hospitalier. « Il s’agit d’une formation solide qui prépare adéquatement à la réalité du milieu. De plus, celle-ci est régulièrement mise à jour en tenant compte des personnes intervenant dans le milieu de la santé », affirme Yves de Repentigny, vice-président de la FNEEQ responsable du regroupement cégep. « Les enseignantes et les enseignants donnant la formation en soins infirmiers sont pour la plupart issus du milieu de la santé et tout à fait en mesure de poser un regard critique sur la formation », ajoute-t-il.
M. de Repentigny rappelle que l’examen d’entrée de l’Ordre est unique, quelle que soit la formation suivie, et que les étudiantes ayant un DEC en soins infirmiers le réussissent aussi bien que celles qui possèdent un baccalauréat, même mieux selon les années. Le taux de placement des détentrices du DEC dépasse souvent les 90 %. Cela n’exclut pas que des diplômées collégiales poursuivent des études universitaires afin d’approfondir leur formation, notamment à travers les cheminements DEC-bac : cependant, les profils de sortie du baccalauréat sont plutôt tournés vers des actes très spécialisés, comme la recherche ou la gestion, et non pas directement vers les soins directs aux patientes et aux patients.
Les détentrices du DEC représentent environ les deux tiers de l’effectif infirmier. Or, les besoins en santé sont criants, notamment en ce qui a trait aux infirmières qui dispensent des soins directs aux patientes et aux patients. Selon le ministère de la Santé, c’est près de 24 000 infirmières qui devront être embauchées d’ici 2023. Exiger une prolongation des études aurait pour effet de retarder l’entrée dans la profession de plusieurs d’entre elles, aggravant ainsi la pénurie de personnel. De plus, le réseau des cégeps est présent sur tout le territoire du Québec avec 53 autorisations de donner ce programme et la formation collégiale est gratuite : la proximité est le premier facteur d’inscription dans un programme. Dans cette perspective, le DEC répond directement à la nécessité d’endiguer la pénurie de main-d’œuvre et de diplômer des gens dans toutes les régions du Québec. « Le cégep est un trait distinctif de la nation québécoise et la formation qu’il offre en soins infirmiers en est un élément phare toujours pertinent. L’OIIQ peut-il en prendre acte une fois pour toutes? » demande M. de Repentigny. « Décourager les candidates et les candidats à la profession en criant au loup, ce n’est vraiment pas rendre service à la population. »
Afin de faire face aux défis actuels et futurs de la formation en soins infirmiers, la mise en place d’un comité de programme national regroupant des enseignantes de toute la province serait une avenue judicieuse et intéressante à considérer. Cela permettrait de partager cette expertise et, s’il y a lieu, de proposer des solutions aux problèmes identifiés pour maintenir une formation de qualité.