Être ou ne pas être féministe pour une ministre de la Condition féminine, telle est la question. Et cette problématique fondamentale, n’en déplaise à Philippe Couillard qui la juge inutile, a fait couler beaucoup d’encre cette semaine. En rédigeant ces lignes, mon intention n’est pas de reprendre le débat, du moins pas directement. D’autres ont su mettre en évidence l’absurdité des propos qui ont fait les manchettes ces jours-ci.
Le 7 mars, une rencontre est prévue entre la ministre Thériault et les porte-parole du Collectif 8 mars, qui réunit les groupes de femmes et l’ensemble des centrales syndicales du Québec et qui représente plus de 700 000 femmes. Cette rencontre était inscrite à l’agenda depuis quelque temps déjà. Son but: sensibiliser la ministre aux problèmes persistants en matière d’inégalité et entreprendre une réflexion collective sur les moyens à mettre en œuvre pour les résoudre. Or, à la lumière des récentes déclarations de Lise Thériault, je me demande sérieusement à quel point elle est en mesure de travailler au mieux-être des femmes qui demandent d’être enfin entendues.
Du plomb dans l’aile de l’égalité
En novembre dernier, le gouvernement a engagé, dans la précipitation, des consultations au sujet de la politique d’égalité entre les femmes et les hommes qu’il est en train de renouveler.
Par le fait même, il mettait de la pression sur les groupes concernés afin qu’ils produisent leur rapport à toute vitesse. Pourquoi cette urgence? Serait-ce qu’il visait le 8 mars 2016 pour lancer son plan sur l’égalité et étouffer les critiques qui se multipliaient face à l’inaction de Stéphanie Vallée, ministre de la Condition féminine de l’époque (une autre, d’ailleurs, qui se défend d’être féministe)? Au-delà de cet empressement, le gouvernement avait-il la volonté profonde de s’attaquer aux problèmes concrets qui freinent l’égalité ou cette opération n’était-elle que de la poudre aux yeux pour faire taire les femmes ?
Une politique sur l’égalité déposée ces jours-ci risquerait de soulever l’ironie et le sarcasme.
Quelle crédibilité peut-on espérer de Lise Thériault et du gouvernement dans l’élaboration d’un tel programme? Toute l’année durant, on a assisté au saccage des droits des femmes sans que Stéphanie Vallée ne lève le petit doigt. On sait désormais que la ministre actuelle loge à la même enseigne que sa prédécesseure. Les femmes ne peuvent que se poser des questions sur les réelles motivations de la ministre Thériault.
«Mordre la main qui nourrit»
L’affirmation d’une ministre de la Condition féminine niant être féministe est un contresens total, une insulte envers celles qui ont défendu au quotidien le droit à l’égalité pour toutes les femmes. Qu’elle ait ensuite tenté de corriger le tir en se disant «féministe à sa manière» ne change rien à l’affaire. Sans le combat des féministes de toutes les époques, les ministres Thériault et Vallée ne seraient pas assises à l’Assemblée nationale aujourd’hui. J’aimerais le leur rappeler.
Avec les déclarations maladroites de Lise Thériault, on est en droit de se questionner sur son réel intérêt à discuter avec les porte-parole du Collectif 8 mars. Comment peut-on penser qu’elle saura écouter les femmes du Québec? La question demeure entière.
Mais je suis d’une nature optimiste. C’est pourquoi j’ose tout de même espérer de sa part de l’ouverture envers les femmes, des féministes, qui seront venues à sa rencontre.