Plutôt que de cibler le véritable fléau du prosélytisme et des débordements, le gouvernement de la CAQ et son ministre de l’Éducation, Bernard Drainville, s’en prennent directement aux droits fondamentaux des travailleuses et travailleurs. La Fédération des employées et employés de services publics (FEESP-CSN), représentant la majorité du personnel de soutien scolaire au Québec, condamne avec force le projet de loi présenté ce matin qui, sous le couvert de la laïcité, attaque frontalement la dignité du personnel des écoles primaires et secondaires en élargissant notamment les restrictions vestimentaires qui s’appliquaient déjà au personnel enseignant. Si le projet de loi est placé comme réponse à un réel problème répertorié dans 17 écoles au Québec, son application trop large passe à côté de la cible et aura des répercussions dramatiques pour des milliers de parents dès la rentrée de septembre 2025.
« À la CSN, nous défendons sans réserve la laïcité de l’État et une vision sociale de l’éducation, insiste Caroline Senneville, présidente de la CSN. Pour nous, l’école doit transmettre des connaissances et préparer les enfants à vivre ensemble. Nous aspirons à une école inclusive favorisant intégration, francisation et solidarité dans une société diversifiée. Mais une vie collective ne peut se bâtir sur la fermeture, des restrictions abusives et la négation des droits fondamentaux. Or, Bernard Drainville propose un projet de loi qui impose des limitations injustifiées aux accommodements raisonnables et renforce des contraintes vestimentaires discriminatoires pour le personnel scolaire. »
Il est inadmissible que le gouvernement impose une vision rigide de la laïcité en interdisant le port de signes religieux à tout le personnel. Nous refusons de sacrifier la liberté de religion et d’expression au nom d’une idéologie stigmatisante. « Malgré l’introduction d’une clause de droits acquis, cette mesure impose des restrictions excessives à des milliers de travailleuses et travailleurs qui veulent simplement exercer leur métier auprès des enfants, sans imposer leurs croyances. Il existe des dossiers bien plus urgents en éducation, et la tenue vestimentaire du personnel n’est certainement pas une priorité, » poursuit Caroline Senneville.
Au-delà d’atteindre les droits, cette politique compromet la diversité et l’inclusion dans nos écoles. « En uniformisant l’apparence du personnel, la CAQ envoie un message d’exclusion aux communautés culturelles et aggrave la pénurie de personnel de soutien, notamment dans les grandes villes, » avertit Annie Charland, présidente du Secteur soutien scolaire de la FEESP-CSN.
Quant aux congés religieux, ceux-ci sont reconnus comme accommodements raisonnables et sont une obligation légale, pas une faveur. « La Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse rappelle que ces mesures permettent de concilier travail et convictions sans discrimination. En limitant ces droits, Bernard Drainville trahit la confiance du personnel et sape un environnement de travail inclusif », explique Frédéric Brun, président de la FEESP-CSN.
En s’attaquant aux accommodements raisonnables et aux signes religieux, le gouvernement met des milliers de parents dans l’impasse. De toute évidence, ces mesures nuiront à la rétention du personnel et provoqueront des bris de service. « Même avec une clause grand-père, à Montréal, l’impact sera immédiat : si ce projet de loi va de l’avant, des milliers de parents devront trouver une alternative aux services de garde scolaire pour prendre soin de leurs enfants tôt le matin, pour le dîner et après les classes se terminant vers 15 h 30 », affirme Annie Charland.
La FEESP-CSN défend la laïcité comme principe de neutralité, mais refuse qu’elle serve à justifier des restrictions politiques arbitraires. « Le problème n’est ni la diversité ni le port de symboles religieux, mais bien le prosélytisme, souligne Frédéric Brun. Si le gouvernement était cohérent, il appliquerait les mêmes règles aux symboles et accessoires chrétiens. Plutôt que d’élargir la laïcité sans raison, il devrait faire respecter les lois existantes et agir concrètement pour répondre rapidement aux véritables débordements, comme ceux de l’école Bedford. »
« Par ailleurs, il faut rappeler que les débordements de l’école Bedford ont eu lieu alors que des règles strictes liées à la laïcité étaient déjà en vigueur, souligne Caroline Senneville. L’élargissement de ces mesures n’est donc pas une réponse adéquate pour faire face à ces situations particulières. »
La FEESP-CSN est ferme : le gouvernement doit abandonner cette initiative et, plutôt que de s’en prendre à nouveau à la tenue vestimentaire du personnel ou aux demandes de congé, il doit mettre en place de véritables solutions pour soutenir les travailleuses et travailleurs du réseau scolaire, notamment en abolissant le gel d’effectif imposé depuis la fin 2024 et en offrant de meilleures conditions de travail et des mesures concrètes pour attirer et retenir le personnel essentiel à la réussite éducative des élèves.
À propos
La Fédération des employées et employés de services publics représente environ 69 000 membres dans près de 425 syndicats, dont 36 000 travailleuses et travailleurs de soutien dans le réseau scolaire dans 37 syndicats regroupés au sein de notre Secteur soutien scolaire, ce qui fait de la FEESP-CSN l’organisation représentant la vaste majorité du personnel de soutien au Québec.