« En Palestine, c’est pas comme ici. Notre réalité, nos défis sont d’un autre ordre », lance d’entrée de jeu Manawel Issa Abdelall, membre du comité exécutif de la Palestine General Federation of Trade Union.
L’organisation syndicale compte environ 200 000 membres. De ce nombre, 30 000 travaillent en Israël et possèdent un permis de travail, 30 000 autres travaillent aussi en Israël, mais ne possèdent pas de permis. La Fédération compte aussi plusieurs dizaines de milliers de membres qui travaillent dans les territoires occupés alors que d’autres ne possèdent qu’un permis commercial et non de travail, mais se rendent tout de même en Israël pour y trouver un travail. Des réalités complexes, qui soulèvent de nombreux défis pour les représentants de la Fédération, qui reçoivent en cotisation la modique somme de 8 $ par année, par membre. « Mais bien souvent, nos membres sont tellement pauvres que nous n’exigeons pas les sous. Ils en ont trop besoin », explique M. Abdelall.
Les besoins des syndiqués palestiniens
Malgré la présence de l’organisation syndicale, les Palestiniens ne connaissent que très peu leurs droits. C’est pourquoi la fédération travaille très fort pour créer des alliances avec les groupes militants bien structurés ailleurs dans le monde. « En Palestine, on a besoin du support de tous. L’apport des organisations syndicales, des ONG, est primordial pour nous aider à informer nos membres de leurs droits, à l’aide notamment de documents », note-t-il.
En Palestine, il existe deux lois touchant au travail. Une loi israélienne et une loi palestinienne. « Selon la loi palestinienne, le salaire minimum est de 1400 $ par mois. Selon la législation israélienne, le salaire minimum est de 400$ par mois. Mais trop souvent, lorsque le conciliateur doit trancher, il impose la loi jordanienne, qui prévoit un salaire encore beaucoup plus bas », relate, impuissant, l’élu de la fédération.
La réalité du travail en Israël
De nombreux membres de la Palestine General Federation of Trade Union se rendent travailler en Israël. Ceux qui possèdent un permis sont relativement mieux protégés que ceux qui n’en ont pas. « Si un travailleur se blesse, son employeur viendra le porter au point de contrôle à la frontière et téléphonera à sa famille afin qu’il vienne le chercher. Il ne recevra pas d’aide. Si un travailleur qui possède un permis de travail se blesse, il aura les soins nécessaires. Mais aucun d’entre eux n’ont droit au moindre avantage social. S’ils perdent leur emploi, ils n’auront rien ». Généralement, les travailleurs reviennent en Palestine après leur journée de travail. Mais il arrive parfois qu’un travailleur traverse, et qu’on n’en entende plus parler pendant un mois. « Le travailleur va coucher dans les montagnes ou des cavernes pour se cacher. »
Deux milliards dans les coffres israéliens
« Un de nos plus importants problèmes, c’est que toutes nos cotisations de sécurité sociale payées depuis les années 70 à ce jour sont retenues dans les coffres du gouvernement israélien », dénonce Manawel Issa Abdelall. Pourtant en 1994, dans le cadre de l’Entente de Paris convenue entre Israël et l’Organisation de libération de la Palestine, il avait été convenu que les sommes détenues par Israël seraient transférées au moment où la Palestine se doterait d’un programme de sécurité sociale. « Aujourd’hui, même si la structure est en place, Israël refuse de transférer notre argent. C’est un immense problème ! », note M. Abdelall.
Malgré tous les obstacles, Manawel Issa Abdelall et ses militants se tiennent debout. Et étonnamment, notre congrès les aide dans leurs luttes. « Participer à des congrès comme celui-ci, c’est tellement précieux, ça permet de tisser des liens avec des collègues du Canada bien sûr, mais aussi d’Afrique, d’Amérique latine, d’Europe, etc. Mine de rien, ça aide tous les travailleurs de la Palestine », conclut M. Abdelall, qui participe pour une deuxième fois au congrès de la CSN.