Transition juste

Ça va bon train

Le secteur ferroviaire est en plein essor à travers le monde.

Par Mathieu Murphy-Perron

La transition juste doit être au cœur de la transformation économique afin d’accompagner le personnel des secteurs les plus touchés vers de nouveaux métiers où il sera possible de s’épanouir. Le secteur ferroviaire pourrait accueillir ces personnes qui voient leur travail transformé ou aboli. Voici comment.

Alors que les ravages de la crise climatique entraînent des changements majeurs en matière d’emploi, divers secteurs et entreprises procèdent à la décarbonation de leurs activités. Or, celle-ci n’est pas sans provoquer à son tour la décroissance de plusieurs métiers. À l’inverse, les emplois durables sont porteurs d’avenir pour le marché du travail. Le gouvernement fédéral s’est récemment engagé à les faire progresser dans chaque région du Canada, avec son Plan pour des emplois durables.

Tout le monde à bord
Le secteur ferroviaire est en plein essor à travers le monde. Bien que l’Amérique du Nord accuse un grand retard face à d’autres régions, plusieurs projets en cours au Québec nécessiteront un afflux de travailleuses et de travailleurs pour veiller à leur succès. En Gaspésie, le train ne roule plus depuis une décennie. L’état des rails ne permettait plus son passage sécuritaire, mais grâce à de nombreux investissements pour les revitaliser, le passage des trains de marchandises reprendra dans les prochains mois. Cela dit, rien ne nous permet de prédire ce qu’il en sera du train de passagers, malgré les efforts louables de la Coalition des Gaspésiens pour son retour.

Train de vie
Une passion partagée pour les trains unit Dominique Léger et son époux Gilles Lamy depuis des décennies, le couple s’étant rencontré « sur la job » pour VIA Rail à New Carlisle en 1986. Elle, agente de gare, raconte ses souvenirs de solidarité intervillage, quand les gens utilisaient le train VIA pour se partager du bois de foyer pendant la crise du verglas. Lui, ingénieur et chef de train, se remémore cette fameuse soirée où, face à un certain René Lévesque déçu de ne pouvoir se sustenter dans le train, il commanda pour le politicien un steak dans un restaurant situé près d’une gare. Évidemment, il en profita pour solliciter l’appui de Lévesque afin qu’il aide la région à garder le train gaspésien vivant. « Que ce soit ingénieur-e, agente ou agent à bord ou en appui dans les gares, ces métiers font vivre une région entière et même aujourd’hui, à 55 ans, je la reprendrais, cette job. Sans l’ombre d’un doute », souligne Dominique Léger.

La création d’emplois à pleine vitesse
La lutte pour le retour du train régional en Gaspésie n’est pas la seule nouvelle ferroviaire à faire jaser. Il y a aussi le développement de nouveaux rails pouvant accueillir des trains à grande vitesse (TGV) ou des trains à grande fréquence (TGF) le long du corridor Windsor-Québec, entre Québec et Toronto, là où réside plus de 50 % de la population du Canada.

« Bien sûr, les grands chantiers de construction stimulent la création d’emplois, mais il faut également noter la quantité importante de travail en continu que des projets de rails génèrent : maintenance, mécanique, ingénierie, logistique, entretien, divers services de commis et service à la clientèle, la liste est longue, » explique Jonathan Peters, professeur en finance au Chazanoff School of Business du City University of New York. « La densité du corridor Windsor-Québec est idéale pour un TGV. Un tel projet d’envergure provoquera non seulement une panoplie d’emplois directs et indirects, mais il facilitera également un accès au marché de travail loin de son domicile, ce qui peut avoir des retombées positives sur la crise du logement. »

Ne pas rater le train
« Ce n’est pas seulement pour la création d’emplois que le train de passagers doit revenir en Gaspésie, mais aussi pour permettre à des touristes de découvrir la région et pour faciliter le déplacement des aîné-es, des jeunes, des gens sans voiture », plaide Gilles Lamy.

Reste à voir si les gouvernements rateront le train ou s’ils finiront par embarquer dans un projet qui dynamisera la région, qui aidera à freiner l’exode des populations et qui facilitera la transition juste vers des emplois de qualité pour des gens bousculés par la crise climatique.

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