La CSN constate que le ministre des Finances du Québec, Éric Girard, a finalement mis le dogmatisme de côté et entendu raison, en partie, quant au report de deux ans du retour à l’équilibre budgétaire. Cette flexibilité, souhaitée par la centrale syndicale, permettra au gouvernement d’éviter les coupes draconiennes dans les principales missions sociales de l’État.
« On ne peut nier les efforts consentis par le ministre des Finances quant à la croissance des dépenses de programmes, reconnaît le président de la CSN, Jacques Létourneau. Mais il reste tellement de manque à gagner pour rattraper les effets dévastateurs des années d’austérité que nous avons connues, il reste tant de besoins de la population auxquels nos réseaux publics sont incapables de répondre que nous sommes en droit de nous demander si les investissements seront suffisants. D’autant plus que l’on poursuivra les versements au Fonds des générations, même dans un contexte déficitaire. Juste pour l’année qui se termine, c’est une somme de trois milliards, dont nous aurions eu grandement besoin. C’est un non-sens complet que le gouvernement envisage de se priver de ce même montant pour l’année qui s’amorce. »
Haro en santé et en éducation
Pour la CSN, la croissance anticipée des dépenses en santé et en services sociaux ne permettra pas de mettre un frein à l’effritement de plusieurs missions fondamentales de l’État. « Lorsqu’on retire toutes les mesures devenues nécessaires strictement en raison de la pandémie, on constate une stagnation, voire une régression de certains budgets, notamment dans les services sociaux. Malheureusement, malgré les histoires d’horreur que nous entendons chaque jour, que ce soit en santé mentale, à la protection de la jeunesse ou encore dans les soins pour les aînés, dans les faits, le budget présenté aujourd’hui laisse entrevoir une réduction du panier de services. Et pas seulement en 2022 », souligne Jacques Létourneau.
Le gouvernement demeure muet quant au renouvellement des conventions collectives du secteur public, déplore la centrale syndicale. « On le sait et le gouvernement le sait aussi : le principal obstacle à la dispensation des services de santé et d’éducation, c’est le manque criant de main-d’œuvre dans nos réseaux publics, rappelle le président de la CSN. Et tout le monde le reconnaît, la principale raison de ce manque de main-d’œuvre, ce sont les mauvaises conditions de travail du secteur public, tant sur le plan des salaires que de la charge de travail. Or, le budget ne contient aucune indication laissant envisager le nécessaire coup de barre que nous attendions de la part du gouvernement. »
Des sommes nettement insuffisantes pour les femmes victimes de violence
La CSN déplore vivement les sommes faméliques réservées aux centres venant en aide aux femmes victimes de violence. « On compte déjà sept féminicides de trop cette année. Faute de moyens, les maisons d’hébergement doivent refuser 75 % des demandes qu’elles reçoivent. Et le ministre des Finances nous annonce aujourd’hui qu’il injectera… moins de cinq millions cette année. Quel est l’objectif du gouvernement, d’abaisser à 71 ou 72 % le nombre de demandes refusées ? »
La centrale syndicale aurait également souhaité des mesures beaucoup plus costaudes pour favoriser la création de places en services de garde subventionnés. « Il y a plus de 50 000 enfants dont les parents sont en attente d’une place en CPE ou en milieu familial régi, rappelle Jacques Létourneau. Or, c’est moins de vingt millions qui seront alloués à la « stimulation » de la création de nouvelles places. Quand on sait à quel point les femmes ont été les premières victimes de la pandémie, qu’elles ont été deux fois plus nombreuses que les hommes à avoir perdu leur emploi, il faut tout faire pour favoriser leur retour sur le marché du travail, notamment en consolidant nos services de garde. Malheureusement, l’occasion en ce sens est aujourd’hui ratée. »