« L’an 2014 aura été celui des solidarités, 2015 sera l’année de toutes les mobilisations », prédit le président de la Confédération des syndicats nationaux (CSN), Jacques Létourneau. Au cours des 12 prochains mois, la lutte aux mesures d’austérité du gouvernement Couillard et la campagne électorale fédérale seront au centre des énergies militantes pour une meilleure redistribution de la richesse au Québec, alors que près des deux tiers des membres de la CSN seront en négociation de leurs conditions de travail et de salaire. Voir la vidéo (2 minutes) de la conférence de presse.
« Avec l’année qui vient de se terminer, il ne faut pas être devin pour prévoir que les occasions de prendre la rue seront très nombreuses en 2015, surtout si les mesures d’austérité annoncées en 2014 par le gouvernement libéral se mettent effectivement en place, a déclaré Jacques Létourneau, lors de la traditionnelle conférence de presse de début d’année de la CSN. Nous n’avons vu que la pointe de l’iceberg des compressions, mais sur le front de la mobilisation, les libéraux de Couillard en auront plein la vue ! La CSN sera de ce combat. L’enjeu est de taille : le maintien de l’État social québécois, mais aussi la préservation et la création d’emplois de qualité. »
2014 : La solidarité en quatre temps L’austérité dans la mire
Dans son bilan de 2014, la CSN identifie quatre temps forts des solidarités qui se sont tissées au cours de la dernière année. Les plus marquées sont certes celles qui se sont déployées contre les politiques d’austérité du gouvernement Couillard, où un éventail de groupes et de syndicats se sont serré les coudes pour s’y opposer.
« Depuis le début des travaux à l’Assemblée nationale, à la fin de l’été, pas une semaine ne s’est passée sans que les effets de ces mesures ne soient dénoncés aux quatre coins du Québec », a mentionné Jacques Létourneau. Partant de leur réalité, les syndicats, en particulier ceux de la CSN, et les groupes féministes, populaires et environnementaux ainsi que les associations étudiantes ont bien montré à quel point les politiques sociales et les services publics, qui visent à redistribuer la richesse et à établir un filet de protection sociale depuis 50 ans, sont mis à mal par les libéraux. En ce sens, les objectifs ont pleinement été atteints, comme l’ont démontré toutes les manifestations régionales et nationales, culminant avec celles du 29 novembre qui ont attiré plus de 125 000 personnes à Montréal et à Québec.
La CSN dénonce l’adoption de projets de loi, dont celui sur les régimes de retraite des employé-es municipaux, les mesures de régression sociale qui conduisent à la disparition des organismes de concertation et de développement social, comme les CLD, les CRE et les CJE, ainsi que les reculs aux services de garde, les fusions et les compressions dans la santé et l’éducation. « En diminuant les revenus de dizaines de milliers de travailleuses, de travailleurs et de retraité-es et en privant les régions d’organismes solidement implantés dans leurs communautés qui soutiennent des projets créateurs d’emplois, les libéraux de Philippe Couillard nous ont fait voir où ils logent. En détruisant le modèle québécois, ils nous démontrent clairement qu’ils ne défendent pas les intérêts des gagne-petit et de la classe moyenne », a analysé le président de la CSN. Au regard de la création d’emplois, l’une de ses promesses durant la campagne électorale, la performance du Parti libéral a, en outre, été littéralement misérable…
Environnement
Sur le plan environnemental, les communautés locales se sont levées contre les dangers identifiés des projets d’Enbridge et de TransCanada. La population en a été suffisamment alertée pour que le gouvernement impose des conditions à l’approbation du projet du port pétrolier à Cacouna. « Il reste encore à faire, mais le travail de conscientisation des groupes écologistes et des regroupements de citoyens a été remarquable sur les projets visant à faire du Québec la plaque tournante du pétrole des sables bitumineux de l’Alberta », a poursuivi le président de la CSN. En 2014, le maintien de la bourse du carbone est aussi un bon point à retenir. L’année 2015 permettra certainement aux mobilisations citoyennes de prendre de l’ampleur. Le Jour de la Terre, le 22 avril, sera l’une de ces occasions.
Radio-Canada
La solidarité qui s’est construite autour de la campagne Tous amis de Radio-Canada a également été un moment fort de 2014. « L’attachement à notre diffuseur public ne s’est jamais démenti, a mentionné le président de la CSN, et c’est lors de la manifestation du 16 novembre, qui a réuni quelque 25 000 personnes à Montréal, qu’il s’est le plus visiblement manifesté. En outre, la motion votée unanimement par les député-es de l’Assemblée nationale défendant la SRC/CBC a permis de réitérer l’importance de cette institution pour la francophonie. » La CSN revendique la création d’une commission parlementaire publique sur son avenir et un moratoire sur les compressions qui lui sont imposées par le gouvernement Harper.
Les luttes locales
À la CSN, les manifestations de solidarité se sont multipliées tout au long de 2014. D’abord, en appui aux syndicats en lutte pour leurs emplois ou pour leurs conditions de travail, comme celui de l’Hôtel Loews Le Concorde, à Québec, et de ceux de trois marchés Loblaws en conflit de travail en Abitibi-Témiscamingue qui n’ont jamais baissé les bras malgré l’intransigeance du géant canadien de l’alimentation au cours de négociations qui s’étirent depuis plus de deux ans. Le président de la CSN mentionne aussi le 64e Congrès de la CSN, en mai, où les 2800 délégué-es ont discuté et adopté des recommandations visant à améliorer les conditions de vie des non-syndiqués-es, dont un projet pilote de syndicalisation sur une base régionale ou professionnelle, hors du cadre prévu par le Code du travail québécois.
Austérité : le mot de 2014, les maux de 2015
En 2015, les mobilisations se multiplieront contre les politiques d’austérité du gouvernement Couillard. Au cours des prochaines semaines, les discussions se poursuivront entre les organisations syndicales et les groupes féministes, environnementaux et communautaires, et les associations étudiantes pour établir un large front social de défense de l’État social québécois et maintenir la pression. Jacques Létourneau : « M. Couillard répète que ‘‘l’équilibre budgétaire est une absolue nécessité”, mais ils sont de plus en plus nombreux à voir que cet objectif aveugle, idéologique et dogmatique ne sert pas les intérêts des classes populaire et moyenne, qu’il est un leurre. Qui est pour moins de services aux familles, aux femmes, aux personnes âgées ? Qui est pour la suppression de l’aide aux devoirs, du soutien à la création d’emplois, et qui est pour des services de santé déficients? Le gouvernement doit être à l’écoute des besoins de la population et reporter l’atteinte du déficit zéro, un objectif qu’il doit d’abord viser par un développement économique plus soutenu, le maintien et la création d’emplois de qualité et la recherche de nouveaux revenus. »
Les mesures d’austérité seront légion en 2015, une année aussi marquée par des hausses de tarifs qui affecteront les revenus des familles : le projet de loi 10 dans la santé, les chambardements des commissions scolaires, les augmentations de tarifs des services de garde, la diminution du financement des groupes populaires, les compressions dans les cégeps, les universités et les programmes sociaux. Le renouvellement des conventions collectives des 500 000 travailleuses et travailleurs de l’État québécois par le Front commun sera un moment fort de ces mobilisations. « Le gouvernement Couillard a mis la table pour un affrontement avec un gel des salaires et des embauches, ainsi que des reculs tous azimuts aux conditions de travail, a dénoncé Jacques Létourneau.
Les interventions de son escouade austérité, formée des Coiteux, Barrette, Bolduc et Leitão, sont à l’image de sa vision de l’État québécois : épluché, diminué, ratatiné. Nous ne le laisserons pas faire. » Devant la démolition des acquis sociaux et l’image résolument négative du rôle de l’État que les libéraux défendent, la CSN se fera le promoteur d’une fiscalité progressive pour une meilleure redistribution de la richesse et de sa propre politique industrielle visant à assurer un développement harmonieux de l’ensemble des régions, et favorisant la création d’emplois de qualité.
La Marche mondiale des femmes
Sur le thème Libérons nos corps, notre Terre et nos territoires se tiendra la quatrième action internationale de la Marche mondiale des femmes. Du 8 mars, Journée internationale des femmes, à octobre prochain, elle permettra une large mobilisation planétaire pour opposer une autre vision de la vie et du bien-être des communautés que celle promue par les classes dirigeantes. Au Québec, c’est par les mesures d’austérité qui frappent au premier chef les femmes que cette dernière vision se réalise. La CSN participera activement à cette manifestation.
Campagne électorale fédérale : Harper dans la mire
La lutte à l’austérité se transportera aussi à l’échelle canadienne, où la CSN battra la campagne contre les conservateurs de Stephen Harper. « À tous les niveaux, sur les plans social, environnemental, du travail, et même sur la scène internationale, ce gouvernement a été une catastrophe, a indiqué Jacques Létourneau. Nous aurons l’occasion de nous débarrasser de lui et nous mettrons nos énergies pour ce faire. »