Dans son documentaire Une histoire sur le goût de la langue, Hélène Choquette brosse le portrait des luttes menées pour la reconnaissance et la protection de la langue française au Québec, de l’arrivée des premiers colons à aujourd’hui. À travers les témoignages divers, elle montre comment la langue est devenue une composante essentielle de l’identité et de la cuture québécoises.
« Porteurs d’eau, scieurs de bois, locataires et chômeurs dans leur propre pays »
La lutte pour la reconnaissance du français au Québec est avant tout une lutte des classes, le français étant historiquement la langue de la classe ouvrière. L’infériorisation linguistique des Québécoises et des Québécois francophones va donc de pair avec leur exploitation économique. La question linguistique est présente dès la fondation des premiers syndicats catholiques. Dans les années 1950, la CSN s’est battue pour le droit de travailler et de négocier en français. Le documentaire retrace des grèves marquantes comme celles des ouvriers d’Arvida en 1957 et des réalisateurs de Radio-Canada en 1959 qui marquera le début de la carrière politique de René Lévesque et un déclencheur de son engagement en faveur de la souveraineté du Québec.
La langue, c’est l’ADN d’un peuple
La défense du français est au cœur du projet souverainiste et fait partie intégrante de l’affirmation de l’identité québécoise. Du foisonnement culturel des années 1970 aux deux référendums de 1980 et 1995, le documentaire inscrit la lutte pour la protection du français dans le projet souverainiste, alors porté majoritairement par les mouvements de gauche, syndicalistes et féministes. Ces derniers s’inspirent des mouvements sociaux de libération, dont ceux des communautés noires pour les droits civiques aux États-Unis.
L’adoption de la loi 101 en 1977 marquera un tournant majeur dans la reconnaissance du statut du français comme langue publique commune de toutes les personnes qui vivent au Québec. Alors que René Lévesque parlait du Québec comme « la patrie de tous les Québécois qui l’habitent et qui l’aiment », le documentaire met le doigt sur le rapport complexe, parfois difficile, entre immigration et protection de la langue française au Québec. Le témoignage d’un « enfant de la loi 101 » souligne qu’historiquement, les communautés immigrantes ont joué un rôle essentiel dans le maintien du français au Québec. D’un autre côté, les propos de Jacques Parizeau lors de l’échec du deuxième référendum ont provoqué une rupture majeure entre des communautés immigrantes et le mouvement souverainiste.
« Je trouve que le documentaire met bien la table au débat actuel, alors que les mouvements de droite instrumentalisent la protection de la langue française au profit d’un discours nationaliste anti-immigration. « Pourtant, les personnes immigrantes sont majoritaires à étudier et à travailler en français », partage une déléguée présente à la projection.
À la toute fin du documentaire, on évoque les solidarités à créer entre les Québécoises et les Québécois francophones et les peuples autochtones autour de ces enjeux. « J’aurais trouvé intéressant que le documentaire développe davantage cet aspect, car selon moi, notre lutte pour protéger la langue française est inséparable des luttes menées par les peuples autochtones pour défendre leurs langues et leur droit à l’autodétermination », soulève un autre délégué.
Produit à l’initiative de la CSN, le documentaire a été diffusé juste avant l’ouverture du 67e Congrès de la CSN. Il est accessible en ligne sur le site de la CSN.