Soumis à un sous-financement chronique depuis plus de 25 ans, le réseau de la santé et des services sociaux québécois n’aura jamais été aussi ébranlé et affaibli qu’avec les mesures d’austérité qui continuent de s’abattre sur le Québec depuis l’élection des libéraux de Philippe Couillard, en 2014. Ces compressions sans précédent ont eu des effets désastreux sur la population et sur les 257 000 travailleuses et travailleurs qui œuvrent dans le réseau. Pour faire avaler cette pilule austère, le ministre de la Santé, Gaétan Barrette, a imposé une énième réforme qui force entre autres la fusion des établissements en mégacentres, dont treize centres intégrés et neuf centres intégrés universitaires. Du jamais vu. Pourtant, c’est le même gouvernement qui s’est récemment vanté de dégager des surplus budgétaires de 3,7 milliards de dollars en 2015-2016, et de 1,7 milliard pour les six premiers mois de l’année 2016. Et ce n’est pas l’injection récente de quelque 300 millions de dollars dans le réseau qui va changer la donne. Des miettes en comparaison du 1,5 milliard versé au Fonds des générations l’an dernier et des 2 milliards de plus que souhaite y verser le gouvernement l’an prochain.
Un aveuglement total
Cette refonte sans précédent des services devait d’abord remettre le patient au centre des activités du réseau, aux dires des libéraux du premier ministre Philippe Couillard, lui-même auteur d’une autre réorganisation inachevée décrétée en 2004. C’est tout le contraire qui s’est produit, générant pour la population une détérioration des services ainsi que de la détresse et des cris du cœur. Malgré les rapports dévastateurs du Protecteur du citoyen et du Commissaire à la santé et au bien-être démontrant la détérioration de l’accès et de la qualité des services aux usagers, le gouvernement a toujours maintenu que les services directs n’ont jamais été affectés.
En outre, des centaines d’organismes communautaires et d’associations de défense des droits ont tour à tour fustigé cette réforme. D’autres comme Médecins québécois pour un régime public ou encore le Réseau de recherche en interventions en sciences infirmières du Québec de l’Université de Montréal ont joint leur voix à ce concert de protestations, critiquant par ailleurs le renforcement du pouvoir médical sur notre système public de santé et de services sociaux. Des constats d’ailleurs partagés par les trois partis de l’opposition.
Pour leur part, les syndicats affiliés à la CSN n’ont cessé de manifester et continuent de décrier les effets néfastes des fusions et des mesures d’austérité ou « d’optimisation », ainsi que la dégradation marquée des conditions de travail et les pertes d’emplois. Même les gestionnaires n’ont pas échappé aux pressions et aux diktats du ministre Barrette, devenu seul décideur d’un réseau ultra centralisé. Jamais dans l’histoire du réseau n’aura-t-on vu une telle unanimité contre une réforme.