La langue française, une intégration améliorée et l’élimination des discriminations doivent être au cœur de la nouvelle politique québécoise en matière d’immigration croit la Confédération des syndicats nationaux (CSN), qui a déposé le 29 janvier un mémoire à ce sujet devant la Commission des relations avec les citoyens.
Selon la CSN, les nouveaux arrivants sont une richesse à bien des égards et il est du devoir du gouvernement d’adopter une politique d’immigration qui va au-delà de l’objectif de croissance économique par « l’importation » de travailleurs. La politique doit assurer l’intégration harmonieuse des personnes accueillies, et ce, dans une société francophone et moderne où l’égalité de toutes et de tous est garantie légalement.
« On sait que les nouveaux arrivants éprouvent des difficultés à faire reconnaître leurs diplômes et leurs expériences professionnelles. Les démarches et les frais engagés pour régler ce genre de situation découragent bien des immigrants. C’est sans compter que les employeurs exigent souvent d’eux qu’ils aient une expérience de travail au Canada. Le résultat est que bon nombre d’immigrants n’auront d’autres choix que de se contenter d’un emploi moins qualifié qui ne correspond pas à leurs aspirations », précise Jean Lortie, secrétaire général de la CSN.
En effet, selon une étude de 2010 du ministère de l’Immigration, plus de 56 % des personnes immigrantes détenant un diplôme universitaire étaient surqualifiées pour leur emploi.
Une vision plus humaine de l’immigration
L’économie ne doit pas être le seul critère sur lequel le gouvernement s’appuie pour adopter sa politique. L’immigration doit s’inscrire dans une vision plus large incluant nos valeurs sociales et humaines.
L’intégration des immigrants doit donc comprendre non seulement l’apprentissage du français, mais également celui de l’histoire, de la culture et des institutions.
La politique d’immigration qui sera élaborée doit assurer le respect des droits de la personne et tenter d’éliminer toute discrimination dont sont victimes les nouveaux arrivants. À cet égard, la nouvelle politique devra s’attaquer au problème de l’utilisation grandissante des travailleurs migrants temporaires qui sont employés pour combler des besoins ponctuels avant d’être renvoyés chez eux. Cette main-d’œuvre a aussi droit à des conditions de travail décentes et à des salaires équitables.
La situation des femmes immigrantes doit également être au cœur des préoccupations du Ministère dans l’élaboration de sa politique. Ces dernières font face à diverses formes de discrimination incluant celle liée au sexe.
« Leurs conditions de vie (logement, nourriture, intimité) sont souvent médiocres. Peu d’enquêtes sont menées pour vérifier le respect, par les employeurs, des législations du travail […] Les travailleuses domestiques sont, en outre, exclues de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles et du régime de santé-sécurité », peut-on lire dans le mémoire.
L’apprentissage du français
Il est aussi de l’avis de la CSN qu’il faut allouer des ressources financières plus importantes à l’apprentissage de la langue française et offrir des cours de francisation de base d’une durée suffisante à tous les immigrants et à leur famille afin qu’ils puissent rapidement s’intégrer en français dans notre société.
Les immigrants doivent aussi faire face à un milieu du travail où l’on exige de plus en plus la connaissance de la langue anglaise. Le défi est donc double pour ces nouveaux arrivants, une situation que déplore la Confédération. Il est essentiel que l’Office québécois de la langue française (OQLF) ait la pleine capacité de remplir ses mandats, notamment de s’assurer du respect du droit de travailler en français au Québec.
Le projet de politique d’immigration préconise « une vision porteuse d’un projet collectif rassembleur pour l’ensemble de la société ». De belles paroles qui viennent toutefois en contradiction avec les dernières décisions du gouvernement libéral. « Le seul projet que semble entretenir le gouvernement est celui du démantèlement du modèle social québécois, un modèle fondé sur l’égalité des chances, la solidarité et la protection sociale. L’austérité n’est pas un projet de société. Pour mettre en œuvre la nouvelle politique d’immigration, des ressources importantes devront être investies sans quoi cette politique ne sera qu’un vœu pieux », conclut Jean Lortie.