Aujourd’hui, à l’occasion de la présentation d’un mémoire à la Commission populaire sur la répression politique, le Conseil central du Montréal métropolitain-CSN (CCMM-CSN) rappelle que de tout temps, les organisations syndicales ont dû faire face à la répression. « Les obstacles à faire valoir les revendications des travailleuses et des travailleurs et la répression ont façonné l’histoire des luttes ouvrières », explique Manon Perron, secrétaire générale du CCMM-CSN. La porte-parole syndicale évoque, entre autres, la grève générale du 1er mai 1886 à Chicago revendiquant la journée de 8 heures de travail. « Le mouvement initié par les syndicats américains, poursuit-elle, avait alors été violemment réprimé par les autorités et avait fait un mort, des dizaines de blessés, et avait mené à l’arrestation de leaders syndicaux et d’anarchistes, dont quatre condamnés à la pendaison en 1887. Cette page de l’histoire du mouvement ouvrier nord-américain a marqué l’imaginaire », insiste madame Perron.
Au Québec aussi, le mouvement ouvrier a subi la répression. La grève d’Asbestos de 1949 est certes l’un des épisodes historiques les plus significatifs, alors que des milliers de grévistes avaient été séquestrés et brutalisés par la police, mais d’autres événements, plus récents ceux-là, démontrent également que les syndicats doivent composer avec la répression. Depuis 1950, quelque 90 lois spéciales ont été adoptées par les gouvernements fédéral et provincial, dont une cinquantaine par le gouvernement québécois. Au Québec, 34 lois spéciales niant les droits syndicaux ont été adoptées au cours des années 1970 et 1980. « Lucien Bouchard a choisi d’appliquer à 11 reprises une solution autoritaire en situation de conflit de travail, et ce, en seulement cinq ans d’exercice du pouvoir ! », se désole la secrétaire générale du CCMM-CSN.
Et aujourd’hui…
« Depuis 1999, les lois spéciales adoptées par les gouvernements se font de plus en plus répressives et sévères, soutient la représentante syndicale. On vise maintenant à limiter l’action politique et l’influence des organisations syndicales, que ce soit en imposant des décrets qui ferment la porte à la négociation, en brimant les manifestations ou en s’attaquant aux structures syndicales pour les affaiblir ».
Tant dans le secteur privé que dans le secteur public, la négociation de conventions collectives et l’exercice du rapport de force pour influencer la partie patronale sont de plus en plus ardus. Les législations visant à « civiliser » les conflits de travail, comme les mesures contre les briseurs de grève, nécessiteraient une modernisation pour continuer à jouer leur rôle. Les technologies de l’information et le recours de plus en plus fréquent à la sous-traitance font en sorte que les employeurs peuvent maintenir leurs opérations sans que les travailleurs de remplacement aient à se présenter à l’établissement. Parmi les exemples éloquents, il y a certes celui du lockout au Journal de Montréal en 2009, durant lequel Québecor a profité de la désuétude de la loi anti-briseurs de grève pour appliquer son plan antisyndical.
« En outre, s’insurge madame Perron, les nombreuses injonctions dans le secteur privé ont pour effet de restreindre l’action collective, alors que des syndicats très militants y pensent à deux fois avant de poser des gestes susceptibles d’être jugés illégaux ». On applique deux poids deux mesures : « L’État n’impose presque jamais de règlementation aux entreprises pour ce qui est de la protection de l’emploi, d’une vie décente et d’un environnement sain. À quand des lois contraignantes sur les délocalisations, les licenciements collectifs, les fermetures d’entreprises, la pollution industrielle ? », questionne-t-elle avec justesse.
Le mouvement syndical subit de nombreuses attaques pouvant être définies comme étant de la répression politique. Les projets de loi et les recours devant les tribunaux sont des formes de discrimination politique, qui visent à miner l’action collective, à brimer le droit d’association et à étouffer toute opposition.
Commission populaire sur la répression politique En septembre 2013, devant le refus du gouvernement Marois de donner suite aux demandes d’enquête publique concernant la répression policière survenue lors du printemps érable, des citoyennes et des citoyens ont décidé de mettre sur pied une commission populaire sur la répression politique. On dénonçait notamment le manque de transparence de la Commission spéciale d’examen des événements du printemps 2012, la commission Ménard.
À propos du CCMM-CSN
Organisme régional affilié à la CSN, le Conseil central du Montréal métropolitain regroupe plus de 100 000 membres des secteurs public et privé, répartis au sein de près de 400 syndicats à Montréal, à Laval et dans le Grand Nord du Québec.