La FSSS-CSN réagit fortement aux propos d’Yves Desjardins et de Gaétan Barrette

Gilles Gagné n’en revient tout simplement pas des propos tenus par le ministre de la Santé et des Services sociaux, Gaétan Barrette, et par le président du Regroupement québécois des résidences pour aîné-es (RQRA), Yves Desjardins, concernant le manque de personnel dans les résidences privées pour personnes âgées. Le représentant du secteur des centres d’hébergement privés pour aîné-es de la FSSS-CSN juge les commentaires diffusés sur les ondes de RDI d’autant plus ironiques qu’ils ont été exprimés la veille de la Fête internationale des travailleuses et des travailleurs du 1er mai, dont la revendication cette année porte sur le salaire minimum à 15 $.

« Je suis resté bouche bée en les entendant parler de belles opportunités de carrières pour les préposées aux bénéficiaires, affirme-t-il. Tous deux connaissent très bien les raisons du manque de personnel dans les centres pour aînés : le salaire moyen y gravite autour de 12,80 $ l’heure. Celui des préposés aux bénéficiaires se situe très souvent sous les 11 $. À partir de ces simples données, pas besoin de chercher de midi à quatorze heures les raisons pour lesquelles le taux de roulement est aussi élevé. »

À ce sujet, Gilles Gagné souligne que les centres d’hébergement affiliés à la FSSS-CSN sont nombreux à connaître des taux de roulement annuel extrêmement élevés. « On estime que ça tourne, bon an mal an, autour de 50 % du personnel, et souvent même davantage. Dans une résidence de la région de Québec, plus de 90 % des employé-es ont quitté leur emploi au cours de la dernière année ! »

Des grèves multiples
Des négociations battent leur plein depuis des mois dans plusieurs centres d’hébergement affiliés à la FSSS-CSN. « Nous demandons une augmentation de 1,50 $ l’heure sur trois ans. Quand on sait que les propriétaires de la majorité des résidences s’appellent Chartwell, Groupe Savoie, Réseau Sélection ou Cogir, on ne peut pas dire que ce soit exagéré. N’oublions pas qu’il s’agit de favoriser la rétention et d’assurer le bien-être et la sécurité des résident-es ! Pourtant, nous avons dû nous battre et même déclencher la grève dans plusieurs cas. Ce n’est pas normal. »

Le vice-président de la FSSS-CSN, Dany Lacasse, rappelle pour sa part que les travailleuses et travailleurs de la résidence Dollard-des-Ormeaux, qui appartient au Groupe Savoie, ont déposé un avis de grève qu’ils entendent déclencher le 9 mai prochain. « Le propriétaire Eddy Savoie leur refuse l’augmentation de 1,50 $ l’heure demandée. Inutile ici de rappeler la façon odieuse avec laquelle ce milliardaire avait traité la soixantaine d’employés du Manoir Sherbrooke en Estrie, en refusant de leur rembourser les quelque 80 000 $ en primes de soins dentaires qui avaient été retenues sur leur paye. Bien sûr, la CSN avait contesté et obtenu gain de cause dans cette affaire, mais le comportement de l’homme d’affaires est inadmissible. J’invite monsieur Desjardins à rappeler ses membres à l’ordre avant de se présenter en ondes et de faire de telles affirmations. Le ministre Barrette pourrait bien lui aussi prendre une part de responsabilité face à cette situation », conclut Dany Lacasse.

 

 

Pour le salaire minimum à 15 $ l’heure !

À la veille de la Journée internationale des travailleuses et travailleurs, les membres de la campagne 5-10-15, dont la CSN est membre, sont catégoriques : la hausse de 50 cents prévue au salaire minimum à compter de demain est nettement insuffisante pour permettre aux travailleuses et travailleurs les plus démunis de se sortir de la pauvreté.

Lisez la déclaration de la Confédération syndicale internationale à l’occasion du 1er mai, Fête internationale des travailleuses et des travailleurs.

L’une des revendications de la campagne 5-10-15, soit la hausse du salaire minimum à 15 $ l’heure, rallie une majorité d’organisations de la société civile. Cette année, le thème retenu par la Coalition du 1er mai, qui rassemble des groupes communautaires, des associations étudiantes et des organisations syndicales, fait écho à cette revendication. Ainsi, la plupart des activités qui se tiendront partout au Québec à l’occasion de la Journée internationale des travailleuses et travailleurs se feront sous le thème « Le travail, pas à n’importe quel prix ! ». La campagne 5-10-15 appelle d’ailleurs la population à prendre part en grand nombre à ces activités.

Contrer les épouvantails du patronat
« Travailler à temps plein au salaire minimum signifie, pour plus de 210 000 personnes au Québec, qu’elles sont emprisonnées dans la pauvreté et doivent compter sur les banques alimentaires pour joindre les deux bouts », soutient Virginie Larivière, co-porte-parole de la campagne 5-10-15, qui précise que près d’un million de travailleuses et travailleurs verraient une amélioration importante de leurs conditions de vie si le salaire minimum était haussé à 15 $ l’heure.

« Certains considèrent cette mesure sous un angle strictement comptable alors qu’il s’agit de lutter contre l’exploitation, les inégalités économiques et la précarisation de l’emploi », ajoute Mélanie Gauvin, également co-porte-parole de la campagne. « Plutôt que de brandir des épouvantails, le patronat et le gouvernement devraient reconnaître ses effets structurants pour l’ensemble de la société québécoise. »

La campagne 5-10-15 estime que l’on peut aussi envisager cette mesure dans une perspective de développement économique. L’augmentation du salaire minimum offre de multiples avantages pour les entreprises qui y adhèrent. Le fait d’accorder des salaires décents favorise le développement de meilleures relations de travail, une productivité accrue et une stabilité dans l’emploi. De meilleurs salaires peuvent aussi amener les entreprises à déployer de nouvelles stratégies, notamment en innovant au plan technologique, les rendant ainsi plus compétitives.

Par ailleurs, l’augmentation du pouvoir d’achat de ces travailleuses et travailleurs aurait aussi des impacts bénéfiques sur l’économie en général.

« Nous allons continuer à marteler notre message : il faut se mobiliser collectivement en faveur du salaire minimum à 15 $ l’heure et faire valoir les avantages que cela comporte tant pour les travailleuses et travailleurs que pour l’économie du Québec », concluent les deux représentantes de la campagne.

À propos
Lancée le 7 octobre 2016, la campagne 5-10-15 revendique le droit d’obtenir son horaire de travail 5 jours à l’avance, de disposer de 10 jours de congé payé par année pour maladie ou responsabilités familiales et de gagner un salaire minimum de 15 $ l’heure.

Membres : le Front de défense des non-syndiquéEs, le Collectif pour un Québec sans pauvreté, la Centrale des syndicats démocratiques (CSD), la Confédération des syndicats nationaux (CSN), la Centrale des syndicats du Québec (CSQ), le Syndicat de la fonction publique et parapublique du Québec (SFPQ) et le Syndicat de professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec (SPGQ).

cinqdixquinze.org; FB : Campagne 5-10-15

217 décès en 2016 : l’État doit agir rapidement !

La CSN soulignera dans la dignité et le recueillement la Journée internationale de commémoration des travailleuses et des travailleurs morts ou blessés au travail. En ce vendredi, partout au Québec, dans de nombreux milieux de travail, une minute de silence sera observée à 10 h précises afin d’honorer leur mémoire.

Les statistiques 2016 dévoilées par la CNESST sont non seulement inquiétantes, elles sont les pires enregistrées depuis les dix dernières années. On déplore 80 morts à la suite d’un accident (11 de plus qu’en 2015) et 137 décès à la suite d’une maladie professionnelle (10 de plus qu’en 2015). « Comment expliquer cette tendance à la hausse si ce n’est par la déficience de la prévention dans bien des milieux de travail, analyse Jean Lacharité, vice-président de la CSN. La réalité cruelle contredit les discours rassurants du patronat et du gouvernement. L’État doit en prendre acte et agir au plus vite. »

Nos dirigeants politiques doivent faire en sorte que les mécanismes de prévention prévus à la Loi sur la santé et la sécurité du travail s’appliquent à l’ensemble des travailleuses et des travailleurs québécois. Rappelons-nous qu’actuellement, ces mécanismes ne s’appliquent qu’à près de 20 % d’entre eux. C’est dire qu’une forte majorité en sont toujours exclus.

L’importance de la lutte syndicale

Le 28 avril nous rappelle également qu’il faut poursuivre sans relâche l’action syndicale pour la prévention des accidents et des maladies du travail. Malheureusement, la CSN a été interpellée à plusieurs reprises l’an dernier afin de guider et épauler des syndicats qui ont fait face à des tragédies mortelles. Chaque mort en est une de trop !

« Les améliorations des lois au Québec sont le résultat de longues luttes acharnées des travailleuses et des travailleurs de toutes les régions. Mourir en gagnant sa vie, c’est l’ultime violence que le travail puisse infliger ! » de conclure Jean Lacharité.

Bénévolat dans les travaux de construction – Un projet de règlement inacceptable

La Confédération des syndicats nationaux encourage les citoyennes et les citoyens à s’impliquer bénévolement dans leur communauté. Or, le projet de règlement présenté par la ministre du Travail, Dominique Vien, prend prétexte du manque de personnel dans les services publics et de l’état de délabrement des bâtiments publics, causé par les politiques d’austérité et le sous-financement récurrent, pour imposer une très large dérèglementation des travaux de construction avec des conséquences importantes sur l’industrie de la construction comme sur la santé et la sécurité de la population. C’est bien à cause du sous-financement des réseaux que des édifices doivent aujourd’hui faire l’objet de travaux majeurs, voire être carrément démolis puis reconstruits et pour la CSN c’est sur le volet du financement qu’il faut agir afin d’assurer la pérennité de nos bâtiments publics.

« Nous appelons le gouvernement à être transparent et à se mettre en mode écoute lors des consultations à venir, auxquelles nous participerons. Si l’objectif du règlement est de favoriser l’engagement bénévole, nous pensons que le gouvernement ne s’y prend pas de la bonne façon et qu’il créera beaucoup plus de problèmes qu’il n’en solutionnera », réagit le président de la CSN, Jacques Létourneau.

« Cela fait des décennies que nous prévenons le gouvernement comme les gestionnaires des réseaux publics des dangers de ne pas financer adéquatement l’entretien des édifices. La réponse à des années de compressions ne peut pas être de se délester collectivement de nos responsabilités à cet égard », souligne le vice-président de la Fédération de la santé et des services sociaux, Guy Laurion.

Le projet de règlement ne fait pas que permettre le recours à des bénévoles pour de menus travaux de rafraîchissement des bâtiments publics. Il ouvre la porte à la réalisation de travaux importants qui nécessitent une expertise et une imputabilité. « Par exemple, l’amiante est omniprésent dans nos écoles. Des travaux mal faits favorisent les infestations de moisissures. Les ouvriers spécialisés des établissements sont formés et dotés d’équipements particuliers. Ils doivent respecter des protocoles rigoureux. Ce qui est en cause, c’est la santé et la sécurité de la population et du personnel œuvrant dans nos écoles, nos cégeps, nos établissements de santé et de services sociaux. C’est aussi celle des parents et des bénévoles qui n’ont pas l’expertise pour effectuer des travaux majeurs dans les bâtiments publics », explique le président de la Fédération des employées et employés de services publics, Denis Marcoux.

La CSN dénonce par ailleurs le fait que par l’entremise de ce règlement, le gouvernement exclut des travaux aux règles normalement applicables à l’industrie de la construction. « Ce règlement n’est pas un assouplissement de certaines règles trop rigides, c’est la concrétisation d’un fantasme patronal de dérèglementation tous azimuts. On parle de « bénévolat », mais il s’agit ici de désassujettissement du secteur de la construction sans débat. C’est troublant ! », ajoute le président de la CSN–Construction, Pierre Brassard.

Impact direct sur les médias régionaux

La Fédération nationale des communications (FNC–CSN) et ses syndicats déplorent la décision de TC Transcontinental de procéder à l’abolition d’une vingtaine de postes dans ses journaux locaux et régionaux à travers le Québec. Cette manœuvre ne sera pas sans affecter directement et sérieusement le contenu de ces publications. « Nos membres ne peuvent faire plus avec moins. Il y aura des impacts sur le contenu offert et donc sur la qualité de l’information », déplore la présidente de la FNC–CSN, Pascale St-Onge.

Au total, six postes ont été coupés dans les syndicats affiliés à la FNC–CSN. Un à Lévis, un au Saguenay–Lac-Saint-Jean, deux dans Lanaudière, un dans les Laurentides et un en Abitibi.

« Ici, en Abitibi, c’est la première fois que les journalistes sont touchés par ces coupes, explique Thierry De Noncourt, président du Syndicat des journalistes de la Frontière (CSN). « C’est certain qu’on ne pourra pas compenser les heures de travail que la personne mise à pied faisait. Dans son cas, elle était dédiée aux enquêtes. C’est donc inévitable que la qualité de l’information offerte aux gens d’ici sera affectée », dénonce M. Denoncourt.

Même chose à Saint-Jérôme, où un poste à temps plein est éliminé. « Depuis environ 5 ans, nous subisons coupes après coupes. Il fut un temps où notre journal comptait 82 pages. Aujourd’hui, il est réduit de moitié », explique Martin Fillion, vice-président du Syndicat des travailleuses et travailleurs des médias des Laurentides (CSN).

« Qui va couvrir les événements qui font moins les manchettes, mais qui sont tout de même importants pour nos communautés ? Ce sont les petites nouvelles locales qui vont écoper. La diversité dans nos pages ne sera plus au rendez-vous », explique M. Fillion.

Du côté de Lanaudière, deux personnes feront les frais de cette restructuration. « À Joliette, c’est le poste de fin de semaine qui disparaît. Qui couvrira tout ce qui se passe pendant ces deux journées ? » s’inquiète Olivia Nguonly, présidente du Syndicat de l’information de Transcontinental (CSN). C’est sans compter que dans plusieurs endroits, le ratio publicité–article est de plus en plus préoccupant. « C’est à se demander si nous ne sommes pas en train de devenir des publisacs », déplore la présidente.

Pression sur les travailleurs

Depuis maintenant plusieurs semaines, les employé-es de TC Transcontinental doivent travailler sous une pression difficile à supporter et leur surcharge de travail est importante. Les coupes effectuées antérieurement et l’annonce, la semaine dernière, de la mise en vente de publications locales et régionales, ont rendu le climat de travail lourd. « Les suppressions annoncées aujourd’hui viendront ajouter à l’inquiétude générale qui règne », dénonce Mme St-Onge. La FNC–CSN se questionne aussi sur la stratégie adoptée par l’entreprise, qui consiste à couper le plus possible afin d’attirer les acheteurs potentiels. « Pour nous, c’est une mauvaise stratégie. Pour attirer de nouveaux propriétaires, il faut offrir un produit de qualité. Ce n’est pas en coupant dans le personnel que TC Transcontinental réussira à produire un contenu complet qui répondra aux besoins des gens des régions », déplore Pascale St-Onge.

« De plus, les propriétaires de presse ont indéniablement une responsabilité envers les populations qu’elles desservent. Celle d’offrir une information de qualité. De toute évidence, TC Transcontinental n’a pas compris ce principe, mais elle devra le prendre en compte tôt ou tard », conclut la présidente de la FNC–CSN.

La CSN demande au gouvernement fédéral une action immédiate concernant la taxe sur le bois d’œuvre canadien

La CSN réagit fortement à la décision imminente du gouvernement américain d’imposer des tarifs punitifs sur le bois d’œuvre canadien et incite le premier ministre canadien à prendre dès maintenant les mesures qui s’imposent pour soutenir l’industrie forestière.

« Lors d’une rencontre récente avec des représentants de Justin Trudeau concernant cette épineuse question, nous avons obtenu l’assurance selon laquelle une forme de soutien adéquat allait être apportée dès que la teneur de la décision serait connue. Nous enjoignons le bureau du premier ministre à joindre la parole aux actes et à réagir aujourd’hui même, dès que l’annonce inadmissible tombera », affirme d’entrée de jeu le président de la CSN, Jacques Létourneau.

« L’industrie forestière constitue un élément crucial de la structure économique du Québec et du Canada, a enchaîné le vice-président de la Fédération de l’industrie manufacturière-CSN (FIM-CSN), Mathieu Lafleur. Nous ne tarderons pas à être durement touchés par les taxes américaines lorsqu’elles commenceront à être prélevées. Le premier ministre du Canada doit développer une stratégie viable pour le bois d’œuvre canadien et tout faire pour réduire les impacts dévastateurs de cette annonce sur les travailleuses et les travailleurs concernés. »

« La décision américaine ne respecte pas l’accord de l’ALENA et doit être contestée, insiste Jacques Létourneau qui poursuit : « Nous n’avons pas manqué de plaider en faveur de la spécificité du nouveau régime forestier du Québec auprès des porte-parole ministériels que nous avons rencontrés. Ceux-ci sont d’accord avec nous : ce régime avant-gardiste doit être défendu fermement. Les acteurs qui gravitent autour de l’industrie forestière du Québec s’attendent à des gestes concrets en ce sens de la part du premier ministre. »

Craignant la multiplication des fermetures de scieries et les mises à pied massives en raison de la hausse des coûts d’exportation, la CSN estime crucial la mise en place de programmes d’aide spécifique aux communautés touchées. « Cela pourrait notamment passer par un accès à des cotisations d’assurance-emploi qui permettraient aux travailleurs affectés de subsister durant leur période de réorientation », ajoute Jacques Létourneau.

Le gouvernement du Québec également interpelé
La FIM-CSN demande également au gouvernement du Québec de maintenir la pression sur son homologue fédéral pour la défense des entreprises et des travailleurs forestiers du Québec. « Il est du devoir de Philippe Couillard d’insister sans relâche auprès de Justin Trudeau pour qu’il défende bec et ongle le régime forestier du Québec face à l’administration américaine. De concert avec les représentants de l’industrie forestière québécoise, le gouvernement Couillard doit également explorer toutes les avenues possibles qui pourraient permettre à ce secteur névralgique de se renouveler dans un cadre tarifaire moins restrictif, soit par la création de produits à valeurs ajoutés non régis par la taxation américaine ou encore par de l’innovation. La FIM-CSN, en tant qu’organisation syndicale, est prête à participer activement à cet exercice. Il faut absolument tout envisager pour évoluer en fonction de la conjoncture sans y perdre de plumes », conclut Mathieu Lafleur.

2017, une année de négociations à conclure

Si l’année 2016 a été marquée par la négociation du secteur public, avec la ratification de l’entente de principe conclue avec le gouvernement du Québec, il n’en demeure pas moins que de nombreux pourparlers ont eu lieu dans le secteur privé et le secteur parapublic en vue de préparer les négociations de 2017. À la CSN, environ 600 syndicats doivent renouveler leur contrat de travail cette année.

À la Fédération du commerce (FC–CSN), un gros chapitre s’est terminé l’année dernière. À l’exception de quelques hôtels comme le Reine Elizabeth à Montréal (fermé un an pour des rénovations), la négociation dans l’hôtellerie se déroule bien avec des hausses salariales de 3 %, 3 %, 3 % et 4 %. On envisage donc l’année avec optimisme. « Avant, dans l’ensemble des secteurs représentés par la FC–CSN, c’était difficile d’obtenir des augmentations salariales de 2 %. Maintenant, la tendance est autour de 2,5 %. Disons qu’on respire mieux », analyse le président de la fédération, Serge Fournier.

D’ailleurs, selon les prévisions salaria­les 2017 de l’Ordre des conseillers en ressources humaines agréés (CRHA), la hausse moyenne devrait s’établir à 2,5 % au Québec, variant entre 2,2 % pour les administrations publiques et 2,7 % pour les secteurs de la finance, de l’assurance et de l’immobilier. C’est légèrement plus optimiste que la moyenne canadienne qui se situe à 2,3 % en raison des feux de forêt de Fort McMurray, qui ont affaibli le secteur primaire.

N’empêche, tout n’est pas gagné pour autant. Par exemple, les quelque 800 salarié-es syndiqués aux usines Olymel de Sainte-Rosalie et de Berthierville, demeurent prudents. « Olymel n’a pas un historique facile de négociation. Dans le passé, les salarié-es ont dû faire des concessions pour que l’usine prospère et demeure concurrentielle. Aujourd’hui, le syndicat est fin prêt pour la négociation et les 400 membres s’attendent à un retour d’ascenseur afin que l’on reconnaisse leurs efforts passés », avance le président du Syndicat des employé-es de l’usine de transformation de la volaille de Sainte-Rosalie, André Ménard.

Même son de cloche du côté de la Fédération de l’industrie manufacturière (FIM–CSN). « La conjoncture est plus favorable. Les entreprises investissent de plus en plus, donc, on ne fait pas juste sauver la mise. Les dernières années, il fallait toujours sauver les meubles en raison des relents de la crise économique », explique le président Alain Lampron. Quelque 400 travailleurs sylvicoles seront en négociation coordonnée cet automne. Trois sections de pompiers forestiers de la SOPFEU négocieront aussi un nouveau contrat de travail, de même que les travailleurs de 18 concessionnaires automobiles répartis dans trois régions (Matane, Victoriaville et Estrie). Les regards se tourneront aussi vers Bibby-Ste-Croix, General Dynamics, Unibéton, Scientific Games et Orica-Canada. De plus, l’arrivée au pouvoir de Trump aux États-Unis force une vigilance accrue auprès des industries du bois d’œuvre et des autres secteurs touchés par la renégociation de l’Accord de libre-échange nord-américain.

Si le contexte est plus favorable du côté du commerce et du manufacturier, on ne peut pas en dire autant pour le secteur médiatique. Récemment, la Fédération nationale des communications (FNC–CSN) a fait parvenir 14 recommandations aux député-es de l’Assemblée nationale pour soutenir les médias qui sont malmenés par la perte de revenus publicitaires, au profit des géants technologiques comme Google et Facebook. C’est dans ce contexte que La Presse négocie cette année. À Radio-Canada, même si le gouvernement de Justin Trudeau a réinjecté des millions de dollars, les quelque 3000 salarié-es sont toujours sans contrat de travail. Certains, depuis quatre ans. « Ce n’est pas facile d’unifier trois conventions collectives pour une première fois. Le dépôt commun des demandes a eu lieu en mai 2016 et le climat est plus productif depuis l’automne dernier, alors que l’employeur a conclu une entente avec le syndicat des réalisateurs. Pour nous, c’est ambitieux de conclure cette année, mais c’est réaliste. Une quinzaine d’articles mineurs ont été réglés et on commence à entrer dans le cœur des discussions, soit la semaine de travail, l’affichage de poste, etc. », explique Johanne Hémond, présidente du Syndicat des communications de Radio-Canada (SCRC–CSN).

À la Fédération des employées et employés de services publics (FEESP–CSN), 21 000 membres doivent renouveler leur contrat de travail, dont les agents de la paix en services correctionnels pour lesquels une entente était intervenue au moment d’aller sous presse, les employé-es de magasins et de bureaux de la SAQ, plusieurs employé-es municipaux, les travailleuses et travailleurs des sociétés de transport de Québec (entente également intervenue à la mi-mars) et de Montréal ainsi que des casinos du Québec et de Gaz Métro. Les travailleuses des CPE et les travailleurs issus du secteur ambulancier, représentés par la Fédération de la santé et des services sociaux (FSSS–CSN), tenteront également d’améliorer leurs conditions de travail. Le milieu de l’enseignement n’est pas en reste, avec la négociation de plus de 33 syndicats affiliés à la Fédération nationale des enseignantes et des enseignants du Québec (FNEEQ–CSN), dont ceux de chargés de cours, de professeurs et de tuteurs.

Dans le secteur de la construction, les négociations ont débuté vers la mi-janvier et il n’a suffi que de trois semaines avant que la partie patronale demande l’intervention d’un conciliateur dans les secteurs institutionnel-commercial et industriel (IC/I). « La partie patronale est revenue de façon plus agressive qu’à la dernière négociation sur la question des heures supplémentaires. Ce sera l’un des principaux enjeux entre l’Alliance syndicale et l’Association de la construction du Québec (ACQ). À la CSN-Construction, on veut que les employeurs reconnaissent une exclusivité sur les fonctions des arpenteurs, qui ont un titre occupationnel. Présentement, certaines de leurs tâches peuvent être faites par d’autres corps de métier et on veut que ça cesse », défend Pierre Brassard, président de cette fédération. La CSN-Construction représente 63 % des arpenteurs du Québec et 8000 membres, qui négocieront, comme le veut la tradition, aux côtés des quatre autres syndicats de la construction.

Enfin, une négociation piétine toujours avec le ministère de la Santé et des Services sociaux, celle des 200 sages-femmes à la Fédération des professionnèles (FP–CSN), dont l’entente est échue depuis la fin mars 2015. Alors qu’elles cherchent à bonifier leur rémunération de garde, leurs libérations professionnelles et leurs conditions de travail en régions éloignées, la partie patronale refuse de bouger tant qu’il n’y aura pas une bonification des redditions de comptes afin d’élaborer de meilleurs indicateurs de performance.

Débattre d’un plan d’action

Alors que la CSN s’apprête à tenir son 65e Congrès, une petite révolution est en cours dans l’organisation de cet événement triennal, puisqu’on a mis de côté l’approche traditionnelle et classique où la direction de la CSN soumet des propositions qui seront par la suite débattues au congrès. Coup d’œil sur cette transformation qui sera mise à l’épreuve du 5 au 9 juin prochain, au Palais des congrès de Montréal.

À la blague, le président Jacques Létourneau soutient qu’il pourrait déposer des projets de loi et réécrire trois budgets sans problème. « On a tout voté à la CSN », lance-t-il avec un grand sourire. N’empêche, c’est avec beaucoup de sérieux et de volonté qu’il souhaite apporter au prochain congrès un vent de renouveau. « On veut éviter un débat de virgules et de positions parfaites. On veut un débat sur un plan d’action concret. »

Pour ce faire, la direction s’y est pris six mois plus tôt qu’à l’habitude. Donc, depuis l’automne dernier, la CSN a proposé cinq grandes orientations à ses syndicats membres : sécuriser le revenu tout au long de la vie, développer l’économie et créer des emplois de qualité, lutter contre les changements climatiques, consolider les services publics et renforcer la démocratie. Les syndicats de la CSN ont été invités à se prononcer sur divers sujets en répondant à un questionnaire ; 25 % d’entre eux ont répondu à l’appel. Un taux de participation très satisfaisant, selon Jacques Létourneau, étant donné qu’il s’agit d’une première et que cette consultation a coïncidé avec le vote d’allégeance syndicale dans le secteur de la santé et des services sociaux.

Ainsi, 97 % des répondants souhaitent une réforme majeure de la Loi sur les normes du travail, en commençant par le salaire minimum, les congés pour responsabilités familiales et les congés de maladie. Quelque 97 % d’entre eux soutiennent également le droit à la formation continue et au perfectionnement tout au long de la vie. Parmi les recommandations ayant obtenu un taux un peu plus faible de réponse, on trouve l’octroi d’une aide financière publique adéquate et la mise en place de mesures réglementaires pour assurer la production d’une information de qualité et diversifiée au Québec (86 %), et l’élaboration d’un plan d’action crédible visant l’élimination de notre dépendance aux hydrocarbures dans une perspective de transition juste (85 %).

À partir de ces réponses, un manifeste sera rédigé et présenté au comité précongrès et ensuite aux syndicats lors d’une tournée régionale en mai. Les participants n’auront jamais été aussi bien mis au parfum avant le congrès. « Ça ne sera pas tant un congrès d’orientation que de tactiques et de moyens à mettre en branle. Les militantes et militants seront mieux préparés que jamais à débattre, et c’est tant mieux, parce qu’on aime ça, les débats ! », soutient celui qui présidera l’événement pour une deuxième fois. Le congrès laissera donc toute la place nécessaire à l’adoption d’un plan d’action relatif au manifeste.

Une des raisons pour lesquelles le plan d’action est important, c’est que les élections approchent rapidement. En 2018 au provincial et l’année suivante au fédéral. « Alors que le dernier congrès avait été marqué par les conditions de travail des travailleuses et des travailleurs non syndiqués, je crois que l’enjeu majeur de ce congrès sera le danger de l’austérité permanente, de l’américanisation de la société québécoise et de la détérioration du déficit social », prévoit l’économiste et adjointe au comité exécutif, Josée Lamoureux.

« Dans un contexte de corporatisme et d’individualisme, la question politique est plus que jamais importante. Notre pari est de démontrer qu’il y a un lien très étroit entre la politique et la condition générale des travailleurs et des travailleuses. Avec la gang au pouvoir actuellement, le salaire minimum à 15 $ l’heure ne verra pas le jour avant… 2029 ! Si les libéraux sont réélus, ils vont continuer à mettre de la pression constante sur les réseaux publics et les sociétés d’État. Ils n’ont pas bougé d’un iota de leur plan de match initial même s’ils ont quelques milliards en surplus. Ils sont orientés de la même manière », renchérit avec vigueur Jacques Létourneau.
Lors du congrès, qui devrait accueillir plus de 2000 participants, la CSN lancera officiellement son manifeste. « C’est un document qui se veut une déclaration politique et syndicale. Bien sûr, on souhaite que chaque parti se prononce et se commette sur les thèmes du manifeste, mais celui-ci aura une vision au-delà des élections. Ça ne sera pas juste des attaques contre les libéraux », explique Josée Lamoureux.

Ultimement, le président de la CSN espère que les syndicats transposeront quelques priorités du congrès dans leurs propres assemblées générales afin qu’ils s’approprient des actions politiques. « Il faut aller dans les milieux de travail. Il faut parler davantage de politique, pas juste de convention collective. Même si tu as un contrat de travail en béton, comment peut-il résister et survivre si tout l’environnement autour est austère et moribond ? Pas de création d’emplois, pas de développement, pas d’investissement dans les services sociaux et les services publics ? Il faut que les syndicats, dans chaque région, puissent être capables d’interpeller les élus ou les candidats — de tout parti politique — sur des enjeux qui les touchent directement, mais qui interpellent aussi l’ensemble des travailleurs et des travailleuses. »


Consultations précongrès

Sécuriser le revenu tout au long de la vie

L’un des principaux enjeux est la Loi sur les normes du travail qui est entrée en vigueur en 1980 et qui est aujourd’hui mal adaptée aux enjeux du monde du travail d’aujourd’hui. À 10,75 $ l’heure en travaillant à temps plein, un salarié se trouve quand même sous le seuil de faible revenu. Même si la loi s’adresse d’abord aux travailleuses et travailleurs non syndiqués, elle a aussi un impact sur les conditions des travailleurs syndiqués.

Développer l’économie et créer des emplois de qualité

La CSN est toujours en attente d’une politique industrielle cohérente alors que le secteur manufacturier a perdu plus de 160 000 emplois entre 2002 et 2015. Alors que les emplois atypiques prennent de l’ampleur (37 % des emplois en 2015) et que près de 75 % des employé-es dans le secteur privé ne sont pas syndiqués, toute personne doit pouvoir rehausser son niveau de qualification pour élargir ses perspectives d’emploi, soit par l’accès à l’éducation soit par la formation continue.

Lutter contre les changements climatiques

L’abandon des énergies fossiles aura des répercussions sur les emplois existants. Toutefois, le virage vert peut aussi être créateur d’emplois puisqu’il exigera la mise en place de nouvelles technologies et de nouveaux procédés. L’État doit intervenir pour que cette transition soit juste et encourager les entreprises à devenir des précurseurs de la lutte contre les changements climatiques.

Consolider les services publics

À l’heure où les besoins de réinvestissement sont criants dans tous les secteurs, la CSN croit que le Québec doit tourner le dos à l’austérité. Toute baisse d’impôt pour les entreprises et les particuliers, particulièrement les plus riches, doit être écartée. La consolidation des revenus à long terme est aussi nécessaire, notamment en intensifiant la lutte contre l’évasion fiscale et les paradis fiscaux et en ajoutant des paliers d’imposition pour les plus fortunés.

Renforcer la démocratie

Alors que la population est de plus en plus désabusée envers la classe politique et que le taux de participation aux élections demeure faible, la CSN croit que la mise en place d’un mode de scrutin proportionnel mixte permettrait de mieux refléter la volonté de la population. De plus, pour assurer une vitalité démocratique, la population doit avoir accès à une information de qualité et diversifiée. L’État doit donc intervenir dans ce contexte de concentration des médias et de domination des géants technologiques à l’ère numérique.

Une mobilisation exceptionnelle

Après deux ans de négociation, marqués par des actions ciblées contre le ministre de la Sécurité publique, Martin Coiteux, des rassemblements devant les pénitenciers et des manifestations régionales et nationales, le Syndicat des agents de la paix en services correctionnels du Québec (SAPSCQ–CSN), qui représente 2800 membres, est très fier de sa mobilisation.

Tout comme dans le cas de la négociation des travailleuses et travailleurs du secteur public, le gouvernement du Québec a présenté des demandes de recul sur plusieurs gains réalisés par le syndicat ces dernières années. L’employeur a cherché à modifier l’horaire de travail, à s’attaquer aux conditions de travail des employé-es à statut précaire et de ceux à temps partiel et souhaitait davantage de « flexibilité » de la part des agentes et agents correctionnels.

13 millions en gains

Mathieu Lavoie, président du syndicat, estime que « la mobilisation a permis de freiner la grande majorité des demandes de recul tout en améliorant de façon significative la convention collective ». Dans une entente de principe recommandée à l’unanimité par le conseil syndical, le SAPSCQ–CSN a obtenu des gains sur les congés de maladie et les congés mobiles, une diminution des coûts des assurances, le règlement des griefs en suspens ainsi que des avancées pour les salarié-es à temps partiel. Le syndicat s’est aussi entendu avec le Conseil du trésor pour un partage égal des coûts du régime de retraite en 2025. Sur le plan salarial, les agentes et les agents correctionnels obtiendront 6,75 % sur cinq ans ainsi qu’un forfaitaire de 1 % la première année. Les assemblées générales du SAPSCQ se prononceront sur cette entente dans les prochaines semaines.

L’information, catalyseur de mobilisation

Durant cette négociation, le syndicat national a développé une stratégie d’information en continu. Les membres ont reçu 18 Info-négo. « Nous avons pris la décision de mener une négociation très transparente. Nous avons mis beaucoup d’énergie sur l’information transmise aux membres. Nous avons senti l’appréciation sur le terrain », affirme le président.

Les moyens de pression que peuvent utiliser les agents de la paix en services correctionnels sont limités. Toute action qui nuit au déroulement des activités normales du centre carcéral peut être considérée comme une grève illégale. Pour développer un rapport de force, le SAPSCQ–CSN a misé sur la force du nombre. Le 8 juin 2015, 500 agentes et agents se sont mobilisés à Trois-Rivières afin de dénoncer les demandes patronales.

Une participation record

Selon le président du syndicat, la stratégie d’information n’est pas étrangère à l’ampleur de la mobilisation. « Chaque fois que nous avions besoin d’un coup de main, notre monde a répondu présent. Jusqu’à maintenant, cette mobilisation nous a permis de bloquer la grande majorité des demandes de recul de l’employeur tout en réalisant des gains, en encadrant et en clarifiant davantage le droit de gérance », conclut Mathieu Lavoie.

Le cadenassage ou comment sauver des vies

La publicité télé a frappé fort : devant une machine à l’arrêt, on voit un travailleur la réactiver à l’aide d’un simple interrupteur, sans trop se poser de questions. Il en résulte qu’un autre travailleur affairé à des travaux d’entretien à l’intérieur est littéralement écrasé.

Cette publicité de la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST), diffusée au cours de l’hiver, en dit long sur l’importance des problèmes dus à l’absence ou au mauvais usage du cadenassage et autres contrôles des énergies. La CNESST a d’ailleurs recensé entre 2010 et 2014 pas moins de 4643 accidents de travail, dont quatre décès liés au démarrage accidentel ou volontaire de la machinerie.

Si ce nombre d’accidents paraît élevé, c’est que le cadenassage ne se limite pas aux usines, mais s’étend à plusieurs secteurs tels que les institutions scolaires et postsecondaires, l’hôtellerie, les loisirs et la restauration, les services municipaux, l’entretien des édifices publics, les casinos, pour ne nommer que ceux-là. Sous la pression constante des syndicats, et notamment de la CSN, le gouvernement n’a eu d’autre choix que d’adopter, à l’hiver 2016, une réglementation plus contraignante concernant le contrôle sécuritaire des énergies.

Un colloque attendu

C’est pour mieux faire con­naî­tre la portée de la nouvelle réglementation et ses effets concrets sur les travailleuses et travailleurs qu’a eu lieu un colloque sur le thème du cadenassage, le 9 février dernier à Drummondville. Quelque 160 militantes et militants ont participé à l’événement dont l’organisation revient à la Fédération de l’industrie manufacturière–CSN, à la Fédération du commerce–CSN et à la Fédération des employées et employés de services publics–CSN.

Pour Jean Lacharité, vice-président de la CSN, « il est absolument inconcevable qu’en 2017, des travailleuses et travailleurs laissent leur santé et même leur vie au travail en raison de l’absence ou de l’inefficience des mesures de cadenassage. Les entreprises doivent prendre conscience qu’elles peuvent et qu’elles doivent agir rapidement pour réduire, voire enrayer les accidents du travail ». Cette prise de conscience ne va toutefois pas de soi, car plutôt que de mettre en place les mesures de protection et de prévention requises et de les faire respecter, certains employeurs choisissent plutôt d’imposer des sanctions disciplinaires à leurs employé-es sans vraiment faire d’éducation.

Jean Lacharité affirmait dans son mot d’ouverture : « Je connais des entreprises où c’est tolérance zéro sur la question du cadenassage. Mais je sais également qu’il y a des travailleurs dans certaines usines qui disent “je n’ai pas besoin de cadenasser. J’ai toujours fait ça de même, ç’a toujours marché et, de toute façon, ça va plus vite”. Donc, les mesures de prévention appellent également à une responsabilisation accrue des salarié-es. À cet égard, les syndicats ont un rôle très important à jouer pour faire appliquer les mesures de cadenassage, comme prévu dans la nouvelle réglementation. »

Le colloque a été l’occasion pour plusieurs personnes de se sensibiliser aux divers problèmes rencontrés. Christine Leroux, nouvelle vice-présidente en santé et sécurité du travail du Syndicat des travailleuses et travailleurs de Bacon Inter-América (CSN) fait partie de celles-ci : « Au départ, je pensais que le cadenassage était une grosse bibitte et que je ne saurais pas de quoi on parle concrètement. Mais ç’a été tout le contraire. Ce qui m’a le plus surprise, c’est de savoir que des travailleurs délèguent le cadenassage à d’autres dans le but strictement de gagner du temps, au risque d’accroître les accidents. »

Les dégâts de l’austérité

Avec le dernier budget québécois, les libéraux se targuent d’avoir renoué avec l’accroissement des dépenses de l’État. Certes les réinvestissements en éducation, en enseignement supérieur ainsi que dans la santé et les services sociaux, à la hauteur de 4,2 %, correspondent à peu de choses près aux coûts de système. Est-ce à dire qu’il n’y aura pas de réduction de services cette année et que les postes laissés vacants depuis les débuts de l’ère austère du gouvernement Couillard seront enfin pourvus ? Ne rêvons pas en couleur.

Depuis son élection, ce gouvernement a haché menu les budgets des services publics et des programmes sociaux. Des services à la population ont été considérablement réduits et la charge de travail des travailleuses et des travailleurs des réseaux publics n’a cessé de s’alourdir. Le personnel est épuisé.

En clair, le budget actuel ne vient absolument pas corriger les effets des compressions draconiennes passées. Alors qu’il a engrangé des surplus de 6 milliards de dollars sur le dos du monde avec ses mesures d’austérité, il a réduit les budgets de la santé et de l’éducation de 5,2 milliards. Son obsession à verser des parts considérables dans le Fonds des générations prive l’État québécois de ressources pour son développement et pour remplir ses missions.

Les votes dans la santé et les services sociaux

Au moment d’écrire ces lignes, le Tribunal administratif du travail continuait de dévoiler les résultats du plus important vote d’allégeance syndicale de l’histoire du Québec. Découlant de la réforme insensée du ministre Barrette qui a forcé une autre fusion des établissements du réseau, ce vote répondait à sa volonté d’imposer une réduction du nombre de syndicats. Toutes les organisations syndicales ont dénoncé avec force cette opération qui affaiblit le mouvement syndical québécois et nie le droit d’association.

Pour la CSN, les nouvelles sont dures. Des milliers de travailleuses et de travailleurs ont choisi de quitter nos rangs pour joindre d’autres organisations syndicales. Nous devons prendre la pleine mesure de ces résultats. Ces derniers nous imposent de dresser un bilan sans complaisance de notre action, des services que nous offrons et des moyens que nous mettons en œuvre pour réaliser les objectifs que nous poursuivons. Cet examen introspectif, qui touche aussi à la vie militante dans nos organisations affiliées et au syndicalisme que nous promouvons, est une nécessité… incontournable. Au cours de cette période agitée que nous traversons, nous ne regarderons donc pas qu’à côté de nous.

Toutefois, il ne s’agit que d’une étape, car il nous faut agir rapidement, en réfléchissant aux conditions à mettre en place pour s’assurer que la CSN continue à jouer pleinement son rôle dans les milieux de travail et dans la société pour améliorer le quotidien des travailleuses et des travailleurs.

Depuis plus de 95 ans, nous avons traversé plusieurs épreuves, voire des tempêtes, engagé de multiples combats et vécu nombre de difficultés. Il a fallu nous battre contre l’antisyndicalisme au début du siècle. Nous le faisons encore aujourd’hui. Nous avons combattu des mesures répressives de plusieurs gouvernements qui visaient à empêcher la syndicalisation ou à brimer l’action collective pour refouler les aspirations des travailleuses et des travailleurs, celles de nos membres.

Dans les années 1970, des dizaines de milliers d’entre eux ont quitté nos rangs, le tiers de nos effectifs, sous prétexte qu’ils ne se reconnaissaient pas dans le syndicalisme que nous portions. Une dizaine d’années plus tard, le patronat canadien et québécois, appuyé par la police et les services secrets, se sont ligués contre nous durant la lutte pour la reconnaissance syndicale au Manoir Richelieu.

Combien de lois spéciales avons-nous affrontées et subies ? Combien de fermetures sauvages d’usines ?

La CSN a mené des batailles très dures, impopulaires, souvent contre plus fort qu’elle, sans jamais lésiner sur les moyens à prendre pour défendre ses membres. Il nous est arrivé de tomber, de perdre aussi. Nous avons été en butte à de nombreuses attaques qui visaient à affaiblir la CSN et ses membres. Chaque fois, nous avons puisé en nous pour nous relever. C’est encore aujourd’hui notre responsabilité, notre obligation de s’atteler à cette tâche. Et nous le ferons avec lucidité, courage et solidarité.

Il ne s’agira pas de la première fois où nous ne devrons compter que sur nos propres moyens.

Un joyau à connaître

Le fonds d’appui aux luttes de la CSN, connu sous le nom de Fonds de défense professionnelle (FDP), a toujours su s’adapter afin de remplir sa mission principale : fournir à ses syndicats affiliés un soutien financier pour pouvoir améliorer les conditions de travail de leurs membres et leur permettre, lorsque nécessaire, de tenir la minute de plus. Regard sur un outil de solidarité unique, et parfois méconnu, adopté par les membres de la CSN il y a déjà 65 ans.

Le Fonds de défense professionnelle est une étiquette, une sorte d’appellation CSN, qui distingue notre centrale de toutes les autres organisations syndicales au Québec. Les membres de la CSN ont créé, au fil des ans, un levier puissant pour mieux traverser les situations difficiles de leur vie syndicale.

Malgré les périodes de turbulence finan­cière qui ont marqué l’évolution de ce fonds, une constante demeure : la volonté des membres de contribuer de façon équitable et solidaire à une caisse dont le modèle est unique dans le monde syndical. En ceci, les syndiqué-es de la CSN jouissent d’un soutien financier concret, d’un outil de solidarité et de résistance qui leur donne tous les moyens pour affronter les coups bas dont ils sont souvent la cible.

Solidaires depuis 1952

Lorsque des conflits de travail éclatent durant les années 40 et 50, la Confédération des travailleurs catholiques du Canada — ancêtre de la CSN —, qui veut appuyer ses membres en grève par le versement d’une prestation de soutien, est souvent contrainte de se renflouer auprès de ses organisations affiliées. Le principe de création du FDP est adopté durant le congrès de 1948, mais il faut attendre 1952 pour que les premières cotisations mensuelles soient prélevées ; celles-ci s’élèvent alors à 10 cents par membre. « Les cotisations étaient loin de couvrir les très nombreux conflits qui éclataient, évoque le trésorier de la CSN, Pierre Patry. Cette situation provoque, au fil des ans, l’endettement progressif du Fonds. » L’équation entre le coût des services fournis et le total des cotisations reçues est fortement débalancée.

Au cours de sa première décennie d’existence, les cotisations au FDP font donc l’objet de nombreux ajustements. Entre 1952 et 1955, elles passent de 10 à 30 cents. En 1957, la formule est à nouveau modifiée pour s’établir, selon le salaire annuel moyen, entre 35 et 85 cents. Malgré ces changements, un constat se dégage en 1958 : le FDP n’arrive toujours pas à répondre aux nombreuses demandes des syndicats en conflit. La CSN se retrouve souvent dans l’obligation d’organiser des campagnes et des collectes de fonds ; elle doit en plus solliciter des dons ou des prêts pour remettre le Fonds à flot. Des opérations de sauvetage comme la campagne du 6 millions en 1981 sont lancées pour aider le fonds à équilibrer ses dépenses. Les bouleversements que connaît la CSN entre 1972 et 1975, et qui provoquent une baisse importante du nombre de membres, ébranlent fortement le mouvement. Dans cette optique, l’idée d’établir une cotisation à pourcentage, qui plane depuis la création du FDP, est adoptée en 1978 et conduit à la stabilisation du Fonds. Cette formule lui permet de constituer une réserve et d’affronter les soubresauts et les périodes chaudes de l’action syndicale.

Le FDP ajuste le tir

À ses débuts, l’objectif du Fonds de défense professionnelle consiste à assurer un bas de laine pour les syndiqué-es en conflit. Au tournant des années 70, la façon dont le Fonds épaule les luttes commence peu à peu à emprunter d’autres formes. À cette époque, Marcel Pepin appelait les syndicats non seulement à militer pour leurs conditions de travail, mais aussi à élargir leur action afin de contrer les injustices systémiques à l’égard des travailleuses et des travailleurs. Cette philosophie du deuxième front conduit la CSN à organiser de vastes campagnes pour contrer les attaques gouvernementales de tous genres. Financées par le FDP, celles-ci visent à assurer la pérennité des services publics et à maintenir les emplois des salarié-es dans ces secteurs. Elles ont également pour motif de protéger l’accès à des services publics de qualité. Refusons l’austérité, Ma place en santé, j’y tiens et Tous amis de Radio-Canada figurent parmi les récentes campagnes du genre.

À partir des années 70, l’importance de lutter sur le deuxième front requiert des ressources du Fonds, car, déjà, les gouvernements laissent le secteur privé s’infiltrer dans l’offre de services publics notamment en santé, dans les services sociaux et en éducation. « Le FDP nous donne les moyens de défendre nos choix sociaux. À titre d’exemple, on peut se demander à quoi serviraient de meilleures conditions salariales s’il fallait débourser des sommes faramineuses pour aller à l’université ou pour se faire soigner lorsque nécessaire », poursuit le trésorier de la CSN.

Photo : Raynald Leblanc

Parallèlement à l’élargissement de la mission du FDP, la façon de négocier des employé-es du secteur public prend elle aussi une autre forme. La réforme du Code du travail vient de leur accorder le droit de grève sous le gouvernement Lesage. La négociation du secteur public, qui s’est centralisée, est dès lors soutenue par le FDP pour la part CSN. Dans la foulée de ces transformations et du premier grand front commun intersyndical de 1972, les actions de mobilisation se multiplient ; le FDP est directement interpellé pour offrir de l’aide aux syndiqué-es en conflit.

Le FDP accompagne la négociation coordonnée

En se regroupant pour négocier, le secteur public a fortement inspiré plusieurs autres syndicats, si bien qu’en 1980, une politique d’avant-garde est adoptée par la CSN pour leur permettre d’organiser une négociation coordonnée. « Avec cette politique, les syndicats évoluant dans un même secteur d’activité peuvent s’unir pour négocier avec les employeurs et revendiquer des demandes communes », enchaîne Pierre Patry. Grâce à l’appui du FDP, de nombreux syndicats ont été et sont aujourd’hui en mesure de créer un véritable rapport de force et d’améliorer leurs conditions de travail, notamment dans les centres d’hébergement privés, dans certaines municipalités en Estrie, dans les centres de la petite enfance, les secteurs de l’alimentation, du préhospitalier et de l’hôtellerie. D’ailleurs, les employé-es du secteur hôtelier se regroupent depuis 30 ans au sein d’une négociation coordonnée rodée au quart de tour. Cette façon de négocier a été très bénéfique pour ce groupe de syndiqué-es, constitué d’un grand nombre de femmes et d’immigrantes. Elles ont obtenu, entre autres, la sixième semaine de vacances, l’ajout d’une journée de maladie, des hausses de salaire importantes et les allocations de retraite. « Dans les années 1980, le salaire de la majorité des préposées aux chambres était environ de 10 cents de plus que le salaire minimum. Aujourd’hui, il n’est pas rare, dans le cadre de la négociation coordonnée, qu’une préposée syndiquée à la CSN gagne plus de 20 $ l’heure », déclare Pierre Patry.

Le FDP, au combat sur deux fronts

Le bien-fondé du Fonds de défense professionnelle n’est plus à démontrer. De nos jours, les attaques se présentent de manière tout aussi virulente, sinon plus qu’autrefois. Le mouvement syndical subit des assauts sans précédent par l’adoption de projets de loi antisyndicaux ou la mise en œuvre de réformes diverses. À cet effet, le ministre Barrette a contribué largement à la démolition du système de santé par sa réforme qui vient grandement complexifier la tâche des syndicats de représenter leurs membres. « Si les gens ne font plus autant la grève, ils n’en continuent pas moins à mener des luttes collectives soutenues par le FDP », explique le trésorier. Le Fonds permet en outre d’organiser la solidarité en s’assurant que les gains obtenus par la lutte des uns ou des autres profitent à l’ensemble. Si le mouvement syndical s’affaiblit, les conditions des travailleuses et travailleurs, syndiqués ou non, en subiront le contrecoup. « On n’est jamais à l’abri d’un coup dur. Avant l’élection du gouvernement libéral de Philippe Couillard, on était loin d’imaginer que le secteur public subirait une fronde aussi grave. Comme le FDP dispose d’une bonne marge de manœuvre, il a pu activer la mobilisation contre les mesures d’austérité, sensibiliser la population et envoyer un sérieux avertissement », affirme Pierre Patry.

Photo : Michel Giroux

Un tel coussin est absolument nécessaire pour permettre aux membres de la CSN de se défendre devant l’adversité. Le FDP, une création de tous les syndicats de la CSN, incarne vraiment la solidarité à la « manière CSN ». Il constitue un instrument indispensable pour se prémunir contre les charges vicieuses et imprévisibles provenant de toutes parts.

Le FDP travaille pour vous

Le FDP est donc une caisse spéciale et unique qui procure plusieurs avantages. Voici un tour d’horizon de ses principales missions.

  • Prestation aux membres durant les conflits.
    La prestation hebdomadaire de 255 $, qui est libre d’impôt, est accessible au huitième jour de grève. « Tout le monde a droit au même montant qui n’est pas un remplacement de rémunération : il s’agit plutôt d’une allocation de secours », précise Pierre Patry.
  • Allocation hebdomadaire aux syndicats.
    Les syndicats peuvent compter eux aussi sur une allocation hebdomadaire variable de la part du FDP. Celle-ci leur permet notamment d’aménager un local de grève et de payer d’autres dépenses courantes reliées au conflit (téléphone, café, transport). Le Fonds accorde aussi du soutien pour les manifestations, les visites dans les instances, les activités de financement, etc. Une aide appréciable pour les syndicats.
  • Le FDP derrière la mobilisation.
    Les syndicats sont très nombreux à se mobiliser pour soutenir leur comité de négociation et à adopter des moyens de pression afin d’exercer leur rapport de force face à l’employeur. Ces actions de mobilisation financées par le FDP, souvent longues, nombreuses et coûteuses, permettent aux membres des syndicats CSN d’améliorer leurs conditions de travail en évitant le recours à la grève.
  • Une assurance pour frais juridiques.
    Le Fonds assume les frais juridiques qu’occasionne l’utilisation de briseurs de grève par l’employeur et ceux qui touchent les suspensions ou les congédiements liés à des activités syndicales. Le FDP peut également apporter son appui lors de la fermeture d’un établissement ou d’une usine. Ces frais peuvent représenter des sommes importantes.
  • Le FDP dans les campagnes.
    En plus de son appui aux grandes campagnes nationales déjà évoquées, le FDP réserve un budget aux fédérations et aux conseils centraux pour mener des campagnes liées à des régions ou à des secteurs d’activité spécifiques. Tout récemment, le Fonds a permis d’empêcher la privatisation des buanderies publiques dans Lanaudière et à Québec.
  • Le FDP et la répartition de la richesse.
    La péréquation distribuée aux fédérations et aux conseils centraux constitue une autre mesure incarnant la solidarité à la CSN. Cet outil permet l’équité dans la qualité des services offerts à tous les syndiqué-es de la CSN, quel que soit leur salaire. À titre d’exemple, les salarié-es du secteur de l’alimentation, membres de la Fédération du commerce (CSN), ont bénéficié d’un tel partage.

En somme, à l’heure où les nombreux dérapages de la droite font craindre le pire pour le mouvement syndical, nous ne saurions nous priver des munitions que nous offre le Fonds de défense professionnelle.

Faits d’armes
Les ex-syndiqué-es CSN de Celanese exultant à l’annonce de leur victoire historique en 2013. | Photo : Michel Giroux

Au fil des ans, la CSN a remporté plusieurs batailles juridiques d’importance grâce au soutien du FDP. En janvier 2014, un tribunal d’arbitrage a condamné Olymel à verser à ses ex-employé-es près de 14 millions de dollars en salaires, avantages sociaux perdus et intérêts. La même année, près de 130 syndiqué-es, injustement congédiés par le Centre de réadaptation en déficience intellectuelle et en troubles envahissants de développement (CRDITED) de Montréal, ont pu réintégrer leur emploi, avec une compensation frisant les quatre millions de dollars. En 2013, après de nombreuses démarches, les ex-syndiqué-es CSN de Celanese de Drummondville ont recouvré une somme de près de huit millions que l’employeur avait détournés de leur caisse de retraite lors de la fermeture de l’usine en 2000. En 1999, après une longue saga judiciaire, la CSN a obtenu la réintégration de près de 150 travailleurs de Métro-Richelieu, congédiés illégalement des années auparavant, le FDP leur a versé plus de 25 millions.

Outil d’inclusion et de solidarité

En soutenant la francisation dans nos milieux de travail, nous contribuons clairement à la pérennité du français au Québec comme langue commune. Mais les enjeux sont très diversifiés. Pour les travailleuses et les travailleurs, connaître le français, c’est pouvoir en apprendre sur leurs droits au travail et sur les moyens de les défendre, par exemple en santé et en sécurité. C’est le meilleur moyen de favoriser l’inclusion et de développer une véritable solidarité entre tous les travailleurs et travailleuses, sans égard à leurs origines. Le 23 mars, à l’occasion de la Journée de la francisation CSN, plus de 70 délégué-es de toutes les fédérations et de plusieurs régions du Québec se sont réunis à Montréal pour échanger sur les défis de la francisation.

L’action dans les milieux de travail s’avère plus nécessaire aujourd’hui que jamais alors que le français comme langue de travail est en recul dans la région de Montréal, particulièrement dans les petites et moyennes entreprises. Mais même dans les municipalités et dans les établissements et institutions publiques, on assiste à des reculs préoccupants quant à la défense du français. La CSN a produit une nouvelle version de sa brochure sur la francisation à l’intention des syndicats.

Le gros lot aux médecins

Au Québec, les médecins sont des privilégiés. Ils jouissent d’un statut unique, qui leur offre beaucoup d’avantages financiers, mais ne leur impose aucune obligation de résultat. Aujourd’hui, leur rémunération atteint des sommets. Ils coûtent à l’État québécois
la somme de 7,3 milliards de dollars annuellement.

Actuellement, nos médecins gagnent environ 12 % de plus que leurs homologues ontariens. Leur revenu moyen atteint 7,6 fois la rémunération moyenne des autres travailleuses et travailleurs québécois. Ce qui ne les empêche pas d’en réclamer encore davantage. Les omnipraticiens, dont la rémunération moyenne est évaluée à 243 000 dollars par année, exigent maintenant de nouvelles hausses salariales. Ils trouvent injuste l’écart qui les sépare des médecins spécialistes, dont le salaire moyen excède 400 000 dollars annuellement. En avons-nous pour notre argent ? La rémunération à l’acte aurait-elle fait son temps ?

Le moins qu’on puisse dire, c’est que les médecins québécois sont très attachés au système de rémunération à l’acte. Et pour cause. Depuis des décennies, ils se battent bec et ongles pour préserver ce mode de rémunération, qui les a toujours grandement favorisés. Au Québec, où les médecins sont très majoritairement rémunérés à l’acte, ils en tirent plus de 80 % de leur rémunération.

Reconnus comme des travailleurs autonomes, les médecins sont en fait de « faux travailleurs autonomes », explique le chercheur Guillaume Hébert, de l’Institut de recherche et d’information socio-économique (IRIS) : « Au Québec, les médecins ont un statut unique. Ils sont de “faux travailleurs autonomes” extrêmement privilégiés. Contrairement aux autres travailleurs québécois, ils obtiennent toutes sortes d’avantages fiscaux. Ce statut leur permet de s’incorporer en créant une société par actions (SPA). Cette incorporation fait en sorte que les médecins, déjà grassement rémunérés, paient beaucoup moins d’impôts. Ce qui est bien sûr très difficile à justifier. » Surtout si l’on tient compte des hausses de rémunération consenties aux médecins ces dernières années. Plusieurs études récentes démontrent que les médecins ont littéralement empoché le gros lot depuis 2007. Tout a commencé sous la houlette du docteur Gaétan Barrette, ex-président de la Fédération des médecins spécialistes et du docteur Philippe Couillard, ex-ministre de la Santé. Sous prétexte d’accorder à nos médecins la parité avec leurs collègues ontariens, le gouvernement a créé une caste de privilégié-es dont les salaires dépassent maintenant ceux des médecins ontariens. Nos médecins accaparent aujourd’hui près du tiers du budget de la santé. Leur rémunération globale atteint 7,3 milliards de dollars par année. Elle devrait dépasser les 9 milliards en 2020-2021.

Une étude réalisée par le chercheur Guillaume Hébert de l’IRIS, et publiée en juin dernier, montre bien que la rémunération des médecins a littéralement explosé de 2004 à 2014. Le salaire moyen des médecins spécialistes est passé de 237 000 dollars à plus de 400 000 dollars, une hausse de 66 % en dix ans. Le salaire des omnipraticiens a bondi de 54 % pendant la même période, passant de 158 000 dollars à 243 000 dollars. La hausse salariale s’est poursuivie en 2014-2015. À la fin de 2015, 174 médecins ont facturé plus d’un million de dollars à la RAMQ.

Des médecins mieux payés, mais moins disponibles

Une autre étude menée par le chercheur Damien Contandriopoulos, de l’Université de Montréal, démontre que malgré ces hausses de rémunération, le nombre d’actes médicaux posés par les médecins entre 2010 et 2015 n’a pas augmenté, alors que la population québécoise a connu, elle, une croissance de 4 % et que le nombre de personnes âgées n’a cessé de progresser. Le chercheur s’interroge. Y a-t-il eu un rationnement des soins et des chirurgies imposé par le ministère de la Santé ? Pourquoi les médecins travaillent-ils moins qu’auparavant ? Selon le chercheur, il est indéniable que le mode actuel de rémunération des médecins est responsable de plusieurs problèmes de notre système de santé. La rémunération à l’acte n’a jamais été remise en question, pourtant, selon lui, aucune preuve scientifique n’a jamais démontré son efficacité et sa pertinence. Il rappelle que les coûteuses incitations financières consenties aux médecins n’ont pas donné les résultats escomptés.

Une autre étude, menée cette fois par trois chercheurs de l’IRIS, Jennie-Laure Sully, Minh Nguyen et Guillaume Hébert, et rendue publique le 18 janvier dernier, révèle que les fortes hausses salariales accordées aux médecins ont eu pour effet de diminuer le nombre d’actes médicaux et le nombre de jours travaillés. De l’aveu même du ministre Barrette, les médecins québécois travailleraient huit heures de moins par semaine que les médecins ontariens. De plus, la moyenne de patients traités par médecin serait de 1549 en Ontario contre 1081 au Québec.

Comme l’explique Jean-Pierre Ménard, avocat spécialisé en droit médical, « dans les faits, les services offerts aux patients par les médecins ont diminué de 10 % en cinq ans. Au Québec, les médecins ne sont soumis à aucune contrainte de productivité. Les médecins sont libres de travailler quand ils veulent, comme ils veulent et de donner le service à qui ils veulent. Ils choisissent leurs patients et leur cadre de pratique et nous on paie et on n’a rien à dire là-dessus. Nous n’avons jamais eu autant de médecins, le Québec a un des ratios médecins-population les plus élevés au Canada. Pourtant la performance des médecins québécois, en termes d’accès aux soins et de suivi des patients, se classe au dernier rang de la moyenne canadienne ».

En 2015, le Québec comptait 242 médecins pour 100 000 habitants, alors qu’au Canada on en dénombrait en moyenne 233 pour 100 000 personnes. Pourtant, 30 % des Québécoises et Québécois n’ont toujours pas de médecin de famille. Selon les calculs de l’IRIS, si l’on économisait un milliard de dollars par année dans le salaire des médecins, on pourrait embaucher 20 000 préposé-es aux bénéficiaires ou 15 000 infirmières de plus.

La solution : abolir la rémunération à l’acte

L’étude de l’IRIS, menée en collaboration avec la CSN et rendue publique en janvier dernier, suggère des mesures pour réduire le salaire des médecins et améliorer l’accès aux soins. Première mesure suggérée : l’abolition de la rémunération à l’acte. Une pratique, qui, selon le chercheur Guillaume Hébert, « encourage des soins non pertinents, mais rentables pour le médecin. Elle décourage l’interdisciplinarité, nuit au travail d’équipe et va à l’encontre d’une médecine axée sur les soins préventifs ». L’étude recommande le salariat des médecins, une formule qui existe notamment en France, et qui donne de bons résultats, nous dit Guillaume Hébert. « On l’a vécu aussi ici dans les CLSC, mais les médecins l’ont fortement combattue, ce qui fait que peu de médecins sont devenus salariés au Québec. Cette formule donne pourtant de bons résultats. C’est une voie prometteuse pour améliorer l’accès aux soins de santé, contrairement à ce que laissent entendre les médecins qui s’y opposent. Les médecins devraient être considérés comme des employé-es, à l’instar de toutes les autres personnes qui œuvrent dans le système sociosanitaire. »

L’IRIS propose également d’abolir le statut de travailleur autonome des médecins : « Le principe, c’est que les médecins sont des professionnels de la santé comme les autres, ce ne sont pas des figures divines du système de santé. Ce ne sont pas des gens à qui l’on devrait confier un pouvoir extraordinaire ou des gens à qui l’on devrait subordonner les autres professionnels de la santé. C’est un professionnel qui a fait de longues études, mais ça ne lui confère pas nécessairement une toute-puissance. »

L’étude de l’IRIS propose enfin d’accroître le nombre d’actes que peuvent effectuer des professionnel-les de la santé autres que les médecins. Ce qui permettrait d’améliorer l’accès aux soins et de réduire les coûts de la santé.

À la recherche d’une transition juste

Élévation globale du niveau des mers, vagues de chaleur, blanchissement des coraux, réfugiés climatiques, fonte des calottes polaires, gaz à effet de serre, exploitation des hydrocarbures, énergies renouvelables, la société devient de plus en plus sensibilisée aux enjeux liés aux changements climatiques, mais qu’en est-il des solutions ? Qu’adviendra-t-il des travailleurs et travailleuses dans un monde en mutation ? Devrons-nous faire un choix entre l’environnement et l’économie ? La transition écologique peut-elle être « juste » et équitable pour tout le monde ?

L’idée d’une « transition juste » pour les travailleuses et les travailleurs circule depuis près de vingt ans, principalement dans le cadre des négociations climatiques des Nations unies (COP). Mais ce n’est que récemment qu’elle s’est mise à susciter la curiosité des acteurs politiques responsables du développement durable. Pourtant, malgré le récent intérêt porté au principe de transition juste, il ne bénéficie pas de la même popularité à la COP et chez les environnementalistes que dans le public ou chez les travailleuses et travailleurs visés par les mesures qui y sont rattachées.

Regard vers la transition

La transition juste est un cadre d’action développé par le mouvement syndical qui propose l’adoption de mesures visant à sécuriser la qualité de vie des travailleuses et des travailleurs lors du passage vers une économie sobre en carbone. Sachant que plusieurs secteurs d’activité risquent d’être fortement ébranlés par les bouleversements provoqués par les changements climatiques au cours des prochaines décennies, le mouvement syndical revendique une place pour les travailleurs à la table, lorsqu’il sera question de la planification de la restructuration des modes de production et de l’organisation du travail.

Parmi les mesures proposées, on trouve des investissements substantiels dans des technologies et des secteurs peu polluants et générateurs d’emplois, la diversification des économies locales, la bonification des mesures de protection sociale, et la création d’outils de formation et de développement de la main-d’œuvre afin de soutenir le déploiement de nouvelles technologies et d’encadrer les mutations industrielles.

Toujours peu connu

En 1998, le syndicaliste canadien Brian Kohler fut parmi les premiers à faire mention de la transition juste : « On n’a pas de choix à faire entre l’économie et l’environnement. C’est soit les deux, soit ni l’un ni l’autre. »

Bien que le concept de transition juste se soit répandu progressivement à travers la couche militante du mouvement syndical québécois au cours des deux dernières décennies, il ne s’est toujours pas enraciné dans les milieux de travail des secteurs d’activité affectés. C’est la raison pour laquelle le comité exécutif de la CSN a proposé la lutte contre les changements climatiques comme enjeu à débattre au cours de la consultation précongrès.

Pour Pierre Patry, trésorier de la CSN et responsable politique des questions environnementales et du développement durable, la méconnaissance de la notion de transition juste s’explique en partie par l’absence de politiques concrètes ayant des objectifs chiffrés quant aux gains d’emplois et aux balises entourant la formation des travailleurs touchés par ces changements. « Maintenant que la transition juste se trouve enchâssée dans le préambule de l’Accord de Paris, le temps est venu de revendiquer un plan d’action crédible ancré dans ces principes, qui vise l’élimination de notre dépendance aux hydrocarbures », explique le trésorier de la CSN.

Le rôle de l’État

Récemment, Pierre Patry a eu l’occasion de présenter la vision que défend la CSN lors d’une conférence intitulée « Les travailleuses et travailleurs : des acteurs incontournables pour réussir la transition énergétique », qui s’est tenue à la Maison du développement durable à Montréal. « La transition n’est pas une chose pour laquelle on peut être pour ou contre, en faveur ou en défaveur, car elle se passe, qu’on le veuille ou non. Il faut donc se préparer pour ces changements et les anticiper afin d’en tirer des bénéfices, plutôt que de simplement en subir les conséquences. Nous avons la capacité en tant qu’êtres humains d’envisager l’avenir et de s’y préparer. Profitons-en ! »

Le trésorier de la CSN, Pierre Patry, déclarait lors d’une récente conférence que les travailleurs sont des acteurs incontournables pour réussir la transition énergétique et qu’il faut anticiper les changements afin d’en tirer des bénéfices plutôt que d’en subir les conséquences. | Photo : Martin Reisch

Le trésorier de la CSN dénonce également le fait que le gouvernement de Philippe Couillard parle des deux côtés de la bouche lorsqu’il est question de développement durable. « Le gouvernement se dit écologique tout en s’engageant activement dans le démantèlement de l’État, notamment en déstructurant les organisations régionales de concertation et en matière de création d’emplois. Les centres locaux de développement (CLD) et les corporations de développement économique communautaire (CDEC) étaient porteurs d’une vision de création d’emplois et de développement durable. Leur disparition représente une occasion ratée de se doter d’un développement local et régional respectueux de l’environnement ! Quel sera le rôle des villes et des municipalités dans la transition ? Comment cet enjeu sera-t-il pris en compte ? Impossible de le dire pour l’instant, mais l’absence de joueurs de différents milieux dans la réflexion — incluant le milieu syndical, est une perte importante. »

Le travailleur oublié

Pierre Patry remarque aussi que la parole des travailleuses et des travailleurs est souvent négligée lors des débats sur les enjeux écologiques. « La conversation porte souvent sur l’option qui crée le plus d’emplois, et bien que ces facteurs soient intéressants et importants pour la société, nous oublions souvent le rôle du travailleur dans toute cette grande mêlée. Comment se sent-il face à cette transition ? Comment allons-nous l’accompagner et répondre à ses préoccupations ? »

Ces questions sont justement au centre des activités d’Iron & Earth, une organisation composée de travailleurs et travailleuses qui œuvrent ou ont œuvré dans les sables bitumineux, qui souhaite faire de la place aux énergies renouvelables dans l’économie fragile de l’Alberta. Elle offre entre autres de la formation aux travailleurs du secteur pétrolier qui sont sans emploi ou sous-employés pour qu’ils puissent se trouver du travail dans le secteur solaire ou en construction durable.

« Oui, les sables bitumineux ont créé beaucoup d’emplois en Alberta, mais ce ne sont pas les travailleurs qui ont bénéficié des profits avant la crise économique actuelle. Et maintenant, plusieurs d’entre eux sont sans abri ou ont dû vendre leur voiture, ce qui nuit grandement à leur capacité de se trouver un nouvel emploi. Ce que nous vivons présentement à Calgary est de loin la pire chose qui est arrivée à notre ville depuis une génération, déplore Kerry Oxford, soudeuse et membre du Conseil d’administration d’Iron & Earth. Je n’étais pas sur le marché du travail lors du dernier ralentissement économique, les personnes de mon âge ou plus jeunes n’ont donc jamais vécu une situation semblable. La violence conjugale a augmenté de 10 % au cours des dernières années et le taux de suicide est en hausse ; des milliers d’entreprises ferment leurs portes. L’heure est grave. Il est très important que notre gouvernement soutienne les initiatives qui visent à former les travailleurs pour qu’ils puissent travailler dans un nouveau secteur énergétique. C’est la raison pour laquelle Iron & Earth souhaite jouer le rôle de facilitateur afin que toutes les parties prenantes — travailleurs, développeurs, gouvernements — aient leur place à la table. Il faut créer des ponts avant qu’il ne soit trop tard. »

Des états généraux, pourquoi ?

À la lecture des conclusions des États généraux de l’éducation de 1995-1996, il est stupéfiant de constater que les choses n’ont guère changé. Les derniers états généraux ne s’étant pas avérés un moteur de changement, pourquoi vouloir organiser en 2017 des États généraux de l’enseignement supérieur ? Peut-être simplement parce que nous en avons le devoir !

On a vu s’organiser, au cours des dernières années, une mobilisation citoyenne autour de l’éducation. L’enseignement supérieur semble cependant moins mobilisateur, étant considéré moins en danger. Quand on voit la rémunération toujours croissante de certains chefs d’établissement, quand on voit les projets pharaoniques de certaines universités, quand on voit les projets avec les entreprises privées… bien peu de cœurs saignent pour nos collèges et nos universités. Pourtant, sur le terrain, dans les salles de classe bondées, les conditions d’études et de travail se détériorent et l’offre de cours diminue. La situation est dramatique et nous croyons que nous devons nous porter à la défense des universités et des collèges québécois.

Mais comment mener cette bataille ? À la Fédération nationale des enseignantes et enseignants du Québec (FNEEQ–CSN), nous sommes fiers d’avoir atteint une première étape, celle de réunir l’ensemble des acteurs en enseignement supérieur autour d’enjeux, de questions et de problématiques qui font consensus. Depuis 2013, la FNEEQ–CSN, en collaboration avec de nombreux partenaires, cherche à mettre en place une coalition capable de porter un tel projet. Nous y sommes parvenus en réunissant les représentants étudiants et ceux de toutes les catégories de personnel présentes dans les collèges et les universités du Québec. L’événement aura lieu à l’Université Laval, du 18 au 20 mai. Les principaux objectifs partagés par l’ensemble de ce collectif sont les suivants :

  • Créer un espace de débat et de réflexion autour des enjeux en enseignement supérieur.
  • Remettre à l’ordre du jour certains enjeux, comme la gratuité, l’aide financière aux étudiantes et étudiants, la marchandisation de l’éducation, l’assurance qualité, le financement, la gouvernance, l’éducation populaire et la formation continue, l’accessibilité, la recherche, la tâche enseignante, etc.
  • Créer ou renforcer les liens avec d’autres organisations qui œuvrent en éducation pour partager nos analyses et unir nos actions pour faire de l’éducation une priorité nationale.
  • Débattre des solutions qui correspondent à notre vision de l’enseignement supérieur et des conditions nécessaires à sa réalisation.
  • Prévoir un plan d’action et mobiliser la société québécoise pour faire pression sur les pouvoirs politiques.

 

Ces éléments de consensus doivent maintenant être discutés dans une perspective d’avenir. Depuis près d’un an, la FNEEQ–CSN et ses partenaires travaillent de façon accélérée à la programmation. Le 1er mars dernier, le collectif s’entendait sur le programme final. Après une table ronde, le jeudi 18 mai en soirée, trois grandes conférences thématiques auront lieu le vendredi matin. Suivront plus d’une douzaine d’ateliers différents. Le tout se terminera en plénière, le samedi matin, où nous souhaitons profiter de la présence de représentants de la communauté de l’enseignement supérieur dans un même lieu pour nous projeter vers l’avant. Nous espérons pouvoir dégager des pistes d’action, qui tiendront compte des diverses consultations gouvernementales et du calendrier électoral québécois. 

Ménager le portefeuille des employeurs au détriment des futurs retraités

En 2017, la CSN poursuit la lutte pour un revenu décent tout au long de la vie, pour toutes et tous. Cette lutte se mène sur plusieurs fronts : hausse des prestations d’aide sociale, rémunération convenable pour les travailleuses et travailleurs (incluant le salaire minimum à 15 $ l’heure) et rente décente à la retraite pour tous les Québécois et Québécoises.

Ce dernier enjeu se discute actuellement à l’Assemblée nationale dans le cadre des réformes annoncées du Régime de rentes du Québec (RRQ) et du Régime de pensions du Canada (RPC). Le 19 janvier dernier, Francine Lévesque, vice-présidente de la CSN, présentait le mémoire de l’organisation devant la Commission des finances publiques dans le cadre des consultations sur le document intitulé Consolider le régime pour renforcer l’équité intergénérationnelle, proposé par le gouvernement libéral.

D’entrée de jeu, la CSN a tenu à affirmer que le statu quo n’était plus une option. Avec environ 60 % des travailleuses et travailleurs qui n’ont toujours pas la possibilité de participer à un régime complémentaire de retraite, le RRQ constitue pour plusieurs le seul régime leur garantissant une rente. « Cette rente offre aujourd’hui à bon nombre de personnes un revenu de retraite bien en deçà des 70 % de remplacement reconnus comme nécessaires pour vivre décemment. Une bonification du RRQ est donc essentielle », a affirmé Francine Lévesque.

Deux régimes, deux visions

Après avoir analysé les projets de réforme du fédéral et du provincial, la CSN estime que la réforme proposée par le gouvernement Trudeau pour le RPC, bien que trop modeste, est de loin le scénario le plus intéressant. Échelonné sur une quarantaine d’années, le projet du fédéral haussera graduellement les cotisations et les prestations pour toutes et tous, si bien qu’à terme, la rente maximale combinée à celle de la Sécurité de la vieillesse passera de 20 000 $ à 26 800 $.

La proposition du Québec est tout autre. Elle préconise un statu quo pour les revenus sous 27 450 $ (ce qui représente 50 % du maximum des gains admissibles) : aucune hausse de cotisations et aucune hausse de prestations à la retraite. Avec ce scénario, les bas salarié-es ne verraient donc pas d’amélioration de leur situation financière. Les travailleuses et travailleurs de la classe moyenne seraient aussi désavantagés par rapport à leurs homologues canadiens, puisque les cotisations et les prestations supplémentaires ne toucheraient que la part du revenu supérieur à 27 450 $. Leur rente serait inférieure d’au moins 15 % à celle des autres provinces. Pour Francine Lévesque, la situation est simple : « Tous les futurs rentiers du Québec seraient touchés puisqu’ils auront contribué moins que les autres Canadiens au cours de leur carrière. »

La recette néolibérale

Si tout le monde y perd, pourquoi donc mettre de l’avant cette réforme ? Il faut regarder du côté des employeurs pour trouver la réponse. Les grandes gagnantes du scénario du Québec, s’il se réalise, seront les entreprises, puisqu’elles n’auront pas à cotiser sur les premiers 27 450 $ pour l’ensemble de leurs salarié-es. Ce congé de cotisation pourrait même devenir un incitatif pour les employeurs à maintenir de faibles salaires ou des emplois précaires pour se soustraire à la contribution au régime. Avec la réforme du RRQ telle qu’elle est proposée, les employeurs québécois passeraient de ceux qui cotisent le plus au Canada à ceux qui cotisent le moins.

Pour la CSN, le projet libéral sur la table actuellement passe à côté de l’objectif principal, soit de procurer une rente de retraite décente à tous les Québécois et Québécoises. « Les travailleurs d’ici doivent avoir accès aux mêmes bénéfices que ceux des autres provinces, et ce, pour des générations à venir », a conclu Francine Lévesque.

La solution à tous nos problèmes ?

Le principe d’un revenu minimum garanti (RMG) revient à l’avant-scène ces derniers temps. Certes, l’idée que les États puissent garantir un niveau minimal de revenu à tous leurs citoyens ne date pas d’hier — même Napoléon y a fait allusion. Applaudie tant par des économistes néolibéraux que par des militants anti-pauvreté, cette idée représente-t-elle un outil d’émancipation ou un cheval de Troie ? Une bonne idée se convertit-elle nécessairement en bonne politique ?

Il existe déjà au Québec une série de programmes visant à assurer une certaine qualité de vie aux populations démunies et défavorisées, notamment l’aide financière de dernier recours, communément appelée « aide sociale ». Malheureusement, ces programmes ne répondent pas adéquatement à la situation de plus d’un million de Québécoises et Québécois vivant avec un trop faible revenu pour subvenir à leurs besoins de base. Quelqu’un qui reçoit de l’aide sociale et qui n’a pas de contraintes à l’emploi gagne à peine 8000 $ par année, ce qui représente 50 % du montant nécessaire pour couvrir les besoins de base, selon la mesure du panier de consommation. « On est très loin d’un système satisfaisant qui donne un coup de main aux personnes mal prises pour qu’elles soient capables de sortir de la pauvreté », dénonce Virginie Larivière, organisatrice politique et co-porte-parole du Collectif pour un Québec sans pauvreté. Les sacrifices consentis par les personnes assistées sociales pour arriver à joindre les deux bouts sont nombreux. Et c’est souvent leur santé qui écope. Si l’on compare le quartier le plus riche et le quartier le plus pauvre de Montréal, il y a non seulement un écart de revenu moyen de 77 000 $ par année, mais aussi un écart de onze ans pour l’espérance de vie. C’est assez parlant. »

Sécuriser le revenu

Depuis plusieurs années, la CSN revendique des moyens pour sécuriser le revenu tout au long de la vie. C’est d’ailleurs l’un des cinq thèmes qui ont été abordés lors de la consultation précongrès, et qui fera l’objet de discussions à son 65e Congrès qui se tiendra en juin à Montréal. Elle préconise principalement une réforme majeure de la Loi sur les normes du travail et de ses règlements (salaire minimum, congés, vacances, équité de traitement, licenciement collectif, etc.). Dans ce contexte, l’adoption d’un modèle de RMG, s’il est bien balisé et qu’il ne nuit pas à d’autres programmes ou services sociaux, représenterait-elle une solution pour contrer la pauvreté ?

« Bien que l’idée d’un RMG soit attrayante en principe, il y a plusieurs autres pistes que nous devons explorer en tant que société afin de réduire les inégalités et éliminer la pauvreté, explique Jean Lortie, secrétaire général de la CSN. Près de quatre employé-es sur dix occupent un emploi précaire et sont ainsi moins bien protégés par la Loi sur les normes du travail. Pourquoi ne pas s’attaquer à ses lacunes ? Aux disparités de traitement dans les régimes de retraite ou encore à l’augmentation du salaire minimum, une mesure qui aiderait plus de 210 000 salarié-es, dont une majorité de femmes, à joindre les deux bouts ? »

En eaux inconnues

À part le projet Mincome, mené entre 1974 et 1979 par le gouvernement néodémocrate du Manitoba pour une partie des populations de Winnipeg et de la petite ville rurale de Dauphin, les gouvernements du Québec et du Canada n’ont pas d’exemple concret de RMG en Amérique du Nord duquel ils pourraient s’inspirer.

Malgré cela, le gouvernement québécois s’intéresse actuellement à l’idée. Il a d’ailleurs mandaté un comité de travail composé de trois économistes pour se pencher sur la question. Le rapport et les recommandations du comité devraient être déposés d’ici l’été 2017. Le gouvernement ontarien, quant à lui, est sur le point de lancer un projet pilote dans quelques villes afin d’étudier les tenants et aboutissants de l’adoption de telles mesures à travers la province.

Illustration : Benoît Tardif

« Depuis plusieurs décennies, le RMG revient périodiquement dans les débats sociaux à travers le monde, mais ce qu’on remarque en ce moment, c’est qu’il y a plus de discussions concrètes que par le passé, précise Julien Laflamme, conseiller syndical au Service des relations du travail de la CSN. Ce qui est intéressant, c’est que les débats sont menés non seulement par la gauche, mais aussi par la droite. En France, le candidat socialiste à la présidence propose un RMG dans sa plateforme, mais c’était aussi le cas pour quelques candidats défaits à la présidence du parti de droite. Autant à gauche qu’à droite, il y a des thématiques qui reviennent assez fréquemment. L’une étant l’urgence de se préparer pour l’effritement de la société salariale engendrée par les changements technologiques de ce qu’on appelle la “4e révolution industrielle”. Autrement dit, le système économique ne sera plus en mesure de fournir un salaire à suffisamment de travailleurs et il ne sera plus à même d’être un véhicule de redistribution de la richesse adéquat, donc il faudrait pallier les programmes de l’État pour tout le monde. Cela dit, peut-être que dans 50 ans la question se posera différemment au Québec. Mais en ce moment, entre autres à cause du vieillissement de la population, on n’est pas dans une situation de pénurie d’emplois. Alors pourquoi en parlons-nous ? Est-ce parce que l’on est encore pris avec les politiques d’austérité qui maintiennent, et même accentuent les inégalités ? On ne regarde peut-être pas au bon endroit. »

Fantasme néolibéral ?

Pour Julien Laflamme, nous devons nous questionner sur les raisons pour lesquelles certains joueurs de la droite sociale et économique sont ouverts à la possibilité d’un RMG. « Plusieurs penseurs de la droite souhaitent que le RMG puisse se substituer aux programmes offerts actuellement par l’État. Il ne faut pas oublier que nous avons déjà des transferts qui sont de nature universelle. Ce ne sont pas des transferts en argent, mais plutôt en biens et services. Quand l’État offre une éducation gratuite à ses citoyennes et citoyens, c’est un transfert universel, offert à l’ensemble de la population. C’est le même principe pour le réseau de la santé et des services sociaux. Malheureusement, il y a un courant de droite qui voit une occasion en or de dire “on donne un chèque à tout le monde, puis on n’aura plus besoin des autres programmes”. Bien que ce débat ne soit pas encore au centre de la réflexion sur l’avenir des programmes sociaux québécois, nous pouvons déjà l’entendre dans certains milieux. Nous n’avons qu’à penser aux services de garde éducatifs. Plusieurs personnes prônent l’idée d’envoyer un chèque aux parents plutôt que de leur offrir un accès universel à un CPE. »

Le Centre canadien des politiques alternatives (CCPA) partage certaines des préoccupations de la CSN quant aux effets néfastes que pourrait avoir un éventuel système de RMG. « Ce n’est pas suffisant de simplement émettre un chèque à tout le monde », prévient Trish Hennessy, directrice du bureau ontarien du CCPA. « Les services publics offerts par l’État sont nécessaires et leur perte lors d’une transition vers un modèle de RMG serait catastrophique, surtout pour les personnes à faible revenu ou issues de communautés vulnérables. C’est pourquoi tous les regards seront tournés vers l’Ontario lorsqu’ils annonceront les paramètres de leur projet pilote et plus particulièrement vers la fin du processus quand les recherchistes dévoileront leurs résultats, positifs et négatifs. Plusieurs juridictions risquent de suivre l’exemple de l’Ontario lors du développement de leurs propres programmes. »

De toute évidence, nous parlerons encore beaucoup du revenu minimum garanti, tant au Québec qu’ailleurs dans le monde occidental. Et, bien qu’il y ait de quoi stimuler l’imaginaire, un mais important s’impose.

Contre la précarité, pour la stabilité

Les 2100 travailleuses et travailleurs des casinos membres de la CSN et de la Fédération des employées et employés de services publics (FEESP–CSN) font partie des 600 syndicats qui renouvelleront leur convention collective en 2017. Le dépôt des demandes a débuté au mois de février et s’est poursuivi jusqu’au mois de mars. Leur convention collective arrivait à échéance le 31 mars 2017.

La CSN représente en tout sept unités de négociation réparties dans les quatre casinos du Québec situés à Charlevoix, à Gatineau, à Montréal et à Mont-Tremblant. Il s’agit d’un secteur très diversifié. Ainsi, les syndicats représentent des personnes qui travaillent dans la restauration, la sécurité, l’entretien, le jeu et plusieurs autres corps d’emploi. C’est une des raisons pour lesquelles, tout comme lors des dernières négociations, l’objectif des syndicats est d’avoir une négociation regroupée avec une table centrale pour traiter des questions salariales.

La précarité dans la mire

Pour Stéphane Larouche, président du syndicat du Casino de Montréal, la précarité est l’un des enjeux majeurs de cette négociation, notamment avec le remplacement automatique des absences. Cette mesure implique que l’employeur doit respecter le nombre d’heures de travail qu’il attribue chaque année, ce qui n’est pas toujours le cas lorsque des employé-es ne peuvent se présenter au travail de façon ponctuelle, à court terme ou à long terme.

« Nous demandons à l’employeur de respecter le nombre d’heures qui sont attribuées à chacun des casinos en début d’année lorsqu’on alloue les budgets pour chacun des corps d’emploi. Comme nous n’avons pas la sécurité d’emploi, nous demandons qu’au moins ces heures soient utilisées. Souvent, lorsqu’un employé est absent, il n’est pas remplacé. Cela crée beaucoup de stress et d’incertitude pour les travailleurs occasionnels et à temps partiel, en plus d’affecter le service à la clientèle », affirme Stéphane Larouche.

Cette question risque d’être au cœur de la négociation puisque parallèlement, tout comme dans l’ensemble des secteurs public et parapublic, l’employeur souhaite prendre la direction inverse en voulant augmenter son droit de gérance. Comme l’ajoute le président du syndicat, « on s’attend à davantage de demandes sur la flexibilité ».

Avec l’arrivée de nouveaux restaurants, les syndicats des quatre casinos souhaitent aussi resserrer les clauses de sous-traitance, toujours en gardant à l’esprit de s’attaquer à la précarité.

L’Alliance syndicale demande au gouvernement de ne pas renouveler les mandats des médiateurs

L’Alliance syndicale de la construction a demandé, par écrit, à la ministre du Travail de ne pas renouveler les mandats des médiateurs afin d’éviter un prolongement inutile et couteux de la négociation pour les travailleurs et travailleuses.

« À partir 30 avril prochain, les travailleurs perdront 51 $ par semaine en augmentation de salaire, lesquels iront directement dans les poches des employeurs, et ce, à cause de l’absence de rétroactivité dans la loi qui régit l’industrie », a indiqué Michel Trépanier, porte-parole de l’Alliance syndicale de l’industrie de la construction. « Dans ces circonstances, un renouvellement des mandats des médiateurs aux différentes tables entrainerait une période de négociation supplémentaire de 30 jours durant lesquels les travailleurs et travailleuses laisseraient plus de 35 millions de dollars sur la table », a poursuivi le porte-parole de l’Alliance syndicale.

En effet, l’industrie de la construction ne possède pas de clause de rétroactivité dans la loi qui la régit. Par conséquent, l’augmentation de salaire prévue à partir du 1er mai dans les soumissions des entrepreneurs ne sera pas versée avant qu’une nouvelle entente ne rentre en vigueur.

Par ailleurs, la loi prévoit une période de 21 jours après la fin de la médiation avant que des moyens de pression ne puissent être exercés. « Nous considérons que cette période de 21 jours est amplement suffisante pour que les employeurs entendent raison et laissent tomber leurs demandes abusives qui affecteraient considérablement la vie de famille de tous nos travailleurs », a ajouté monsieur Trépanier.

Parmi ces demandes, nous retrouvons la diminution de la rémunération des heures supplémentaires travaillées dans tous les secteurs de l’industrie. Dans les secteurs institutionnel, commercial et industriel, la partie patronale demande aussi la reprise obligatoire des heures perdues pour intempérie durant la semaine le samedi à taux simple, l’abolition de l’horaire de travail fixe et la disponibilité obligatoire des travailleurs de 5 h à 20 h.

« Nos membres méritent une négociation qui se réalise sur un pied d’égalité. À partir du 30 avril, chaque journée de négociation supplémentaire entraine un gain monétaire pour les entrepreneurs et une perte pour les travailleurs. Ce déséquilibre ralentit la négociation et nous empêche de réaliser notre objectif ultime : obtenir une entente négociée dans les meilleurs délais pour le bien des travailleurs et de leur famille » a expliqué Michel Trépanier.

L’Alliance syndicale pense que le gouvernement peut envoyer un signal fort en décidant de ne pas renouveler le mandat des médiateurs pour l’ensemble des secteurs de l’industrie de la construction. « Ne pas renouveler le mandat des médiateurs augmentera la pression sur toutes les parties pour obtenir une entente négociée. C’est ce que nos membres nous demandent de faire », a conclu le porte-parole de l’Alliance syndicale.

À propos de l’Alliance syndicale

L’Alliance syndicale représente les 175 000 travailleurs et travailleuses de la construction dans le cadre des négociations de la construction. Elle regroupe les 5 syndicats représentatifs de la construction, soit la FTQ-Construction, le Conseil provincial (International), le Syndicat québécois de la construction (SQC), la CSD Construction et la CSN-Construction.